Écriture, architecture : une question de plan
On se console donc avec les autres résidences, dont la taille ne dépasse pas 30 m2 pour la plus grande, ayant obligé leurs architectes à déployer des trésors d’astuce et parfois d’humour. En surplomb de la grande place centrale et de la bibliothèque, la cabane Rintala-Eggertsson, conçue par l’agence du Finlandais Sami Rintala, de l’Islandais Dagur Eggertsson et du Norvégien Vibeke Jenssen, s’organise par fonction sur quatre demi-étages (entrée, cuisine, chambre et bureau) habillés de chêne.
Le projet MK27 de l’agence brésilienne de Marcio Kogan offre, lui, un parallélépipède blanc dehors, lambris dedans. À l’intérieur, un cube entièrement recouvert de panneaux de bois contient une cuisine cachée, des placards et un escalier dérobé qui dessert la chambre invisible située au-dessus (d’où le panorama est décoiffant), alors que le bureau occupe toute la façade du premier niveau.
Le contraste est frappant avec la cabane Mangeat-Wahlen, aussi minimaliste que monacale, découpée en deux parties distinctes – habitat d’un côté, bureau de l’autre – reliées par un palier extérieur. La maison des Zurichois Fuhrimann-Hächler joue, elle, au contraire, et avec bonheur, la carte de la couleur : cuisine vert sapin, murs et escalier vertical plaqués de mélèze blond poncé, banquette Grid, signée Pool (Petite Friture), embellissent l’espace souplement conçu avec une terrasse dont l’auvent se replie à volonté.
Également zurichois, le module Schaub-Zwicky reçoit des écrivains handicapés et déroule un plan horizontal en loft, poétiquement ravivé de tons orangés au sol et sur le mobilier, de grandes banquettes vert-degris et d’immenses vitres encadrant la nature. L’écrivain qui occupera la cabane Bonnet, du nom de ses architectes genevois, se retrouvera pris derrière une résille métallique sur les quatre côtés, lui garantissant une magnifique intimité tout en lui ménageant une vue en coulisse.
Enfin, Jean-Gilles Décosterd, architecte à Lausanne, a accroché lui aussi sa petite habitation entre les piliers de la canopée, la seule côté Jura. Les parois extérieures arborent une citation du philosophe naturaliste Henry David Thoreau… en morse : « In addition to simplicity, nudity (en plus de la simplicité, la nudité) » (dans Walden, Life in the Woods). À l’intérieur, le ton est celui d’un strict cocon japonisant, orné de claustras de bois qui grimpent jusqu’au toit.
Reposant sur une esthétique aussi simple que soignée, ces sept résidences et leur salle commune souhaitées par Vera Michalski remplissent leur mission : offrir une page blanche aux créateurs de la littérature qui peuvent y vivre en n’ayant d’autre souci que d’y produire un beau projet d’écriture.
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