En octobre 2016, la maison Martell, trois fois centenaire, annonçait l’ouverture de sa fondation d’entreprise à Cognac. Son ambition ? Promouvoir à la fois la culture au sens large et ses savoir-faire. Une tradition à laquelle elle n’a jamais failli, elle qui symbolise à merveille un certain art de vivre à la française. « Par son héritage, cette fondation doit devenir un vrai lieu de destination culturelle, un espace d’exposition, d’immersion et d’échange, devant rayonner à l’international », déclare Axelle de Buffévent, directrice de style pour le groupe Martell Mumm Perrier-Jouët (MMPJ), filiale de Pernod Ricard.
Une ambition partagée par la pétillante Nathalie Viot, historienne de l’art, qui occupa précédemment les fonctions de conseillère en art contemporain pour la Ville de Paris et qui, propulsée directrice de la Fondation Martell, promet d’en ouvrir la programmation à tous les arts, sans hiérarchie aucune.
L’agence bordelaise Brochet Lajus Pueyo (qui s’est fait connaître avec la rénovation du musée de l’Orangerie à Paris) a été chargée de restaurer l’austère bâtiment en béton armé destiné à l’accueillir. Construit en 1929 dans la mouvance du Bauhaus, l’édifice, baptisé la « tour d’embouteillage » parce qu’il servit à la mise en bouteille du cognac jusqu’en 2005, sera réhabilité par étapes. Aussi, en attendant l’ouverture progressive de ses 5 000 m2, Nathalie Viot a donné carte blanche à José Selgas et Lucía Cano. Le tandem madrilène a décidé d’investir la totalité de la cour pavée située derrière la Fondation en adaptant les principes développés lors de la réalisation de leur pavillon à la Serpentine Gallery, à Londres, en 2015 : transparence et ouverture sur l’extérieur.
Ils ont donc dessiné 133 rangées d’une structure en acier recouverte d’un matériau translucide composé de polyester et de fibre de verre. À partir de cet élément, que les deux architectes n’hésitent pas à comparer à du papier de riz traditionnel japonais, ils ont créé un labyrinthe ondulant qui semble extrêmement léger. « La légèreté a vraiment été un aspect constant et fondamental de notre travail, expliquent-ils. Nous avons considéré ce projet comme la possibilité unique d’expérimenter et de pousser encore plus loin l’exploration de ce concept. » Première création du duo dans l’Hexagone, le pavillon abrite une estrade bâtie avec le bois récupéré d’une installation temporaire que le plasticien Vincent Lamouroux, invité inaugural de la Fondation, a réalisée n 2016. Il sera ensuite démantelé puis remonté à l’étranger afin de lui donner une seconde vie.
Sous cette vague transparente, qui incite le visiteur à déambuler et à se perdre, des coussins jaunes, remplis d’eau, ont été disséminés. Ils jouxtent les balancelles en châtaignier fabriquées à la main par Sarah Babaud et Martin Lecomte, diplômés des métiers d’arts en ébénisterie et créateurs de l’Atelier W110. Autant de sièges qui permettent d’assister aux activités pluridisciplinaires (ateliers, concerts, conférences…) proposées. Définitivement ouverte sur la ville – les murs d’enceinte d’origine ont été abattus et un passage en chêne prenant la forme d’une coque de bateau (prix de l’innovation 2016) mène désormais de la rue au jardin –, la Fondation Martell s’ancre dans le territoire tout en briguant un rayonnement mondial.
Le site comprendra donc, outre une salle d’exposition de 900 m2, un atelier de production (doté notamment d’une imprimante 3D ou d’un four à céramique), des espaces pour résidences d’artistes, un restaurant gastronomique où officieront de jeunes chefs, un bar avec vue panoramique… Un projet qui devrait favoriser le renouveau de Cognac, belle endormie charentaise dont la « tour d’embouteillage », un temps considérée comme une «verrue» vouée à la destruction, est devenue l’élément de fierté.
Le pavillon Martell de SelgasCano est installé à la Fondation d’entreprise Martell, Cognac (16) jusqu’au 30 juin 2018.
Fondationdentreprisemartell.com