Fondatrice de DesignChain, une plate-forme en ligne proposant plus de mille marques européennes de mobilier et objets à destination des architectes, décorateurs et autres créatifs chinois, Stephanie Zhao s’est jointe au jury du concours Rising Talent Awards China pour sélectionner les six designers invités à exposer lors de la session de janvier de Maison & Objet. Mais avant de départager Frank Chou, Chen Furong, Mario Tsai, Hongjie Yang, Ximi Li et le studio Bentu, cette experte du marché local nous livre son regard sur l’actuelle émergence du design chinois.
En Chine, la scène du design contemporain s’est incroyablement développée au cours de la dernière décennie. Comment s’explique ce dynamisme ?
S. Z. : Suite au boom économique des dernières décennies, la question esthétique est devenue plus présente. Les gens ne se satisfont plus d’un mode de vie basique. Les idées et les pensées du grand public deviennent plus indépendantes et stimulent ainsi le développement de l’industrie du design chinois.
Malgré cette évolution, à quels défis sont encore confrontés les designers chinois ?
Rester fidèle à soi-même… Comparée à de nombreux pays occidentaux, notre industrie du design contemporain est apparue très tard et nous en sommes encore à un stade immature. Dans le même temps, nous sommes fortement influencés par les grandes tendances commerciales. Résister à ces tentations, à la rentabilité de la copie pour s’exprimer vraiment, tel est le défi de ces designers émergents.
Vous avez activement participé à la sélection des designers présentés aux Rising Talents Awards. En quoi reflètent-ils la scène chinoise actuelle ?
Comme je l’ai déjà mentionné, nous avons une industrie émergente. Les designers sont sélectionnés parmi un large éventail de candidats jeunes et dynamiques. Leurs créations témoignent de la diversification et de l’énergie de notre industrie en pleine croissance.
A partir de quels critères les lauréats ont-ils été désignés ?
En dehors de la forme, des matières et des tissus, je crois également à une créativité qui puisse séduire au premier regard. Mais je ne me concentre pas uniquement sur l’aspect final, le processus de réflexion et de conception joue aussi un rôle significatif.
Existe-t-il un dénominateur commun entre leurs différentes pratiques ?
Je pense que beaucoup de leurs pratiques sont enracinées dans une pensée ouverte à différentes cultures, telle que l’alliance de l’Orient et de l’Occident. En particulier pour une société chinoise en rapide mutation, qui se confronte à une modernité principalement inspirée par la civilisation occidentale. Cela nous amène à réfléchir sur notre propre identité. L’autre point commun est la recherche d’un équilibre entre innovation et fonctionnalité comme entre forme et fonction. Cet équilibre permet de répondre à la demande du marché tout en conservant son attrait esthétique.
Quels sont les aspects de la culture chinoise qui s’expriment aujourd’hui à travers leur travail ?
La Chine est une nation avec une longue histoire et un héritage culturel abondant. Je crois qu’un petit détail de n’importe quel aspect culturel pourrait en quelque sorte déclencher une nouvelle inspiration, ce qui est très important dans un domaine comme la conception de produits. Sous le Moyen Empire, le peuple chinois a connu de nombreuses idéologies successives, qui influencent encore son mode de vie, même dans la Chine contemporaine. Ces idéologies viendront compléter le spectre de l’industrie mondiale du design.
Le design chinois pourrait donc jouer un rôle plus central sur l’échiquier mondial des styles dans les années à venir…
En ce qui concerne la culture chinoise, les Occidentaux ont longtemps eu à l’esprit les arches de Chinatown, le défilé de dragons ou le festival du printemps, et non pas ce qui se passe dans la Chine contemporaine, mis à part la croissance économique couverte par l’actualité. Nous espérons qu’à l’avenir, nous construirons une nouvelle conception de la culture chinoise contemporaine par le biais de l’industrie du design.