À l’hiver 1974, il a fallu que sur Hashima chacun remballe ses affaires pour se tenir prêt le jour du déménagement. En seulement quelques semaines, la cité s’est vidée de tous ses habitants. La société Mitsubishi en avait décidé ainsi : le gisement houiller n’était plus assez rentable et tout le personnel devait migrer vers d’autres sites miniers, à quelques dizaines de kilomètres de là, sur Kyushu (l’une des îles majeures du Japon). Cette décision presque soudaine rend l’histoire d’Hashima encore plus paradoxale.
Tout d’abord, l’endroit n’est pas un complexe industriel comme les autres. C’est une petite île située à 4 kilomètres de la côte – et à une quinzaine de Nagasaki – et que l’homme a colonisée au fil du XXe siècle jusque dans ses moindres recoins.
En 1810, on y découvre un gisement de charbon. Mais ce n’est qu’à partir des années 1890 que celui-ci va être exploité par Mitsubishi. La compagnie décide non pas d’organiser des navettes entre le rivage de Kyushu et l’îlot mais d’y ériger une cité minière comprenant des logements, des commerces, une école et même un hôpital et un théâtre. Une ville à part entière où les travailleurs ne vont pas venir seuls mais accompagnés de leurs familles.
Dans les années 1950-60, la population avoisine les 5 300 personnes sur ce bout de terre de 6,3 hectares (480 mètres de long pour 160 mètres de large). Aussi faut-il construire haut et en rangs serrés. Des immeubles de neuf étages jouent à touche-touche et engendrent forcément une promiscuité poussée à son paroxysme. On dit même qu’à cette époque la densité de population d’Hashima (83 500 habitants au kilomètre carré !) était la plus élevée du monde.
Presque un demi-siècle plus tard, celle que l’on appelle aussi Gunkanjima en raison de sa silhouette évoquant un navire de guerre (traduction littérale) a des airs d’île fantôme. Les constructions sont toujours là, mais on se demande pour combien de temps encore, tant la nature semble avoir repris ses droits.
Les aménagements en bois jonchent en grande partie le sol, et même le béton armé n’a pas résisté aux agressions de la mer et du vent qui ont éventré les façades et raviné le sol. En déambulant à travers les décombres, et en occultant l’histoire des lieux, on pourrait se demander si l’île n’a pas connu un cataclysme ou une guerre.
Parfois, on tombe sur des chaussures, une télé ou des ustensiles de cuisine abandonnés, comme s’il avait fallu partir à la hâte. On pense à une épidémie ou, pire encore, à une déportation. Les images en évoquent d’autres, historiques mais aussi actuelles, de ces villes ravagées par les conflits armés.
Depuis 2009, Hashima connaît un regain d’intérêt et a été aménagée par la municipalité (dans un périmètre très restreint) pour permettre aux touristes ainsi qu’aux anciens mineurs de venir voir ce qu’elle est devenue. Les producteurs de James Bond ont même pensé y tourner une séquence de Skyfall, mais les ruines étaient tellement impraticables qu’ils ont préféré reconstituer un environnement similaire en studio. Seule une séquence en survol de l’île est restée au montage. Mais Google n’a pas hésité à se lancer dans un relevé des lieux, que l’on peut découvrir sur Internet en Street View.
En 2015, l’île a finalement été classée au Patrimoine mondial de l’Unesco, après des années de contestations de la part de la Corée, des ressortissants prisonniers de ce pays y ayant été réduits en esclavage durant la Seconde Guerre mondiale. Aujourd’hui, cette folie humaine pour la modernité a quelque chose de fascinant mais, dans le même temps, elle laisse songeur face aux forces incontrôlables de la nature.
Se rendre à Hashima
Exclusif Voyages, agence de voyages d’exception, propose un séjour à Nagasaki comprenant une visite de l’île d’Hashima à partir de 5 730 € par personne.
Ce tarif inclut les vols A/R Paris-Tokyo-Nagasaki sur All Nippon Airways en classe éco, 3 nuits en Premium Harbor Suite au Garden Terrace Nagasaki, les petits déjeuners, tous les transferts et une journée d’excursion avec guide privé.
Tél. : 01 42 96 00 76.
Exclusifvoyages.com