Fi de la pandémie, Paris est une fête et le restera. Sa mémoire collective, son allure, son aura – virus ou pas –, allons les chercher au fin fond de ces lieux nouveaux et pétillants qui, sans cesse, ravivent la flamme. Depuis qu’Orso, la petite marque hôtelière parisienne qui monte, qui monte, s’est entichée des beaux restes de ce grand hôtel décati, longtemps le bon plan des backpackers (« routards ») futés, l’impatience était à son comble.
Un côte-de-Nuits et au lit !
Avec le duo Festen à l’architecture intérieure, on savait déjà que l’on ne serait sûrement pas les seuls à tomber dans le panégyrique. Au mitan de l’été, la façade Art déco à peine décoffrée de ses vilains oripeaux préparait fébrilement son come-back, comme resurgie intacte du Pigalle d’avant-guerre où la gouaille d’Arletty croisait le déhanché de Joséphine Baker avant de faire la tournée des grands-ducs dans les music-halls alentour, La Cigale en tête, juste en face.
Autres temps, autres mœurs. Mais comme jadis, c’est aussi grâce à son restaurant que l’Hôtel Rochechouart projette de renouer avec l’âge d’or de son boulevard. Revampée jusqu’aux dents, la salle a retrouvé toute sa superbe. Arches sculpturales, modénatures léchées, larges miroirs et vitrophanies flirtent à nouveau avec la splendide mosaïque cerclée d’or, savamment restaurée. L’éternel retour du chic parisien. « C’est cet ancien restaurant, ses lignes géométriques et graphiques, son charme Art déco un peu désuet mais en concordance avec les valeurs de l’hôtellerie classique, qui a servi de fil rouge à notre esquisse », explique Hugo Sauzay, binôme fondateur de Festen avec Charlotte de Tonnac, sa compagne à la ville . « Ensuite, nous avions envie de penser l’agencement, le choix des matériaux, des couleurs rabattues et la production du mobilier – en France – dans ces mêmes codes. L’ajout du marbre et de la loupe d’orme pour le bar ou des touches de laiton et des boiseries travaillées dans les chambres va dans le même sens. »
L’un des plus beaux panoramas de Paris
Tout juste attablés en octobre dernier, tandis que l’hôtel Rochechouart ouvrait doucement, quelques chanceux réservaient déjà leur rond de serviette : 180 pièces, toutes uniques, amoureusement chinées par Anouk et Louis Solanet, le couple derrière Orso et ses bonnes manières hôtelières. À peine le temps de s’élever neuf étages plus haut, au Bar sur le toit, un love at first sight dans les verres, entre le Sacré-Cœur, côté face, et le soleil couchant sur les charbons ardents de la Défense, côté pile. L’un des plus beaux panoramas de Paris, offert sur un plateau.
À peine le temps d’allumer. À peine le temps de goûter à l’été indien, que le couvre-feu plombait l’ambiance, pourtant au garde-à-vous. « N’eussent été le reconfinemenent et ses répercussions sur l’activité de nos 107 chambres et suites difficilement tenables économiquement parlant, plusieurs dizaines de convives seraient en train de déguster notre sole meunière ou notre gâteau de crêpes », déplore Louis, agile fils de famille hôtelière qui, au lendemain du couvre-feu, refusait de s’avouer vaincu en lançant illico sur les réseaux sociaux l’offre « qui-dîne-dort » à prix cadeau. Un succès immédiat. « L’hôtel a minima mais rempli en moins de deux, sans plan média, par la simple force de nos petits bras, se félicite l’hôtelier. On a vu les gens fous de joie de pouvoir s’offrir une parenthèse de liberté. Une sorte de prohibition légale ! »
A l’Hôtel Rochechouart, des solutions créatives au confinement
Autre façon de « transformer chaque contrainte en opportunité », l’hôtel a ensuite enchaîné avec le « pick assiettes », son menu à emporter quotidien, en attendant de voir rouvrir ses écrins de nuit qui regardent Paris dans le rétro – la 614 et ses accords de paille, la 703 et son vert sourd, la 306 en rotonde –, mais pensent déjà à l’avenir. Au Rochechouart, c’est bel et bien tout un art… de revivre.
> Hôtel Rochechouart. 55, boulevard de Rochechouart, 75009 Paris. Tél. : 01 42 81 91 00. Hotelrochechouart.com