Dernièrement, Bernhard Willhelm s’est tourné vers la conception de mobilier. « C’est en cours avec un éditeur allemand, dont je tais le nom pour l’instant. C’est mon hobby. Il s’agit de six pièces : chaises, table, sofa, etc. » Aussi atteint de collectionnite aiguë, il accumule les plantes depuis l’adolescence, dont des cactus californiens : « Mes parents avaient une serre et c’est là que nous discutions. Aujourd’hui, mes loisirs sont tournés vers la nature. » Fan de design, il avoue un faible pour le confidentiel Pentagon Group, collectif allemand formé à l’orée des années 80 dont faisait partie Wolfgang Laubersheimer : le Pentagon promouvait un style néobrutaliste à travers des créations en béton aussi froides que puissantes. Bernhard Willhelm confesse aussi un intérêt pour une certaine pornographie. « Je collectionne les magazines gays des années 80 pour leur typographie et leurs couleurs, contemporaines du mouvement Memphis. Ces revues pointent une époque de liberté sexuelle, de 1980 à 1990, et finalement une forme de poésie moderne. »
À notre grande stupéfaction, on découvre aussi un adorateur de la Renaissance. « Né au cœur du baroque et du gothique de l’Allemagne du Sud, j’aime sentir les influences romaines, grecques et byzantines, et j’adore les pièces contemporaines de Léonard de Vinci. Je me promène très souvent dans le Kupferstichkabinett (Cabinet des estampes) de Berlin, à la Gemäldegalerie (Galerie de peintures) et au Pergamonmuseum (musée archéologique). Les animaux et le mobilier de Tilman Riemenschneider (1460-1531), dans lesquels on peut déceler sa main et son geste, sont pour moi d’une beauté frappante. J’ai aussi un goût prononcé pour les lieux spirituels : le Vatican, le sanctuaire du mont Koya, au Japon, et les monastères des Météores, en Grèce. Des lieux de pouvoir non commerciaux, avec bibliothèques, jardins et même, parfois, des ruches. Parfaits pour s’entendre penser. Enfin, si l’architecture Bauhaus me plaît beaucoup en Allemagne, mon pays va protéger d’affreuses villes années 50 comme Cologne ou Ulm… que, paradoxalement, je détruirais volontiers. »
Aujourd’hui, le styliste allemand vend essentiellement – très bien – aux États-Unis et au Japon. « Ils apprécient ma perception artistique liée à la spiritualité, à l’interaction des coloris, à l’humour et au sexe. Je fais fabriquer à Tokyo, où les ateliers conservent un sens aigu des couleurs – je ne fais jamais de noir – et savent tisser des étoffes incomparables. Ils ont le chic pour y introduire volontairement de petits accidents qui en font tout le sel. Selon moi, la mode est un artisanat dans lequel la main joue un rôle prépondérant. Il m’arrive de construire mes collections à partir d’une broderie, d’une technique japonaise traditionnelle. »
Aidé de son ancien jardinier parisien Morgan Courtois (désormais jeune parfumeur remarqué pour une première création olfactive, baptisée Fond de Sac), Bernhard Willhelm met au point un parfum inspiré des roses qui fleurissaient sa terrasse lors de sa vie parisienne précédente. Notre nez en frétille déjà d’impatience !