Marjan van Aubel bouscule les codes de l’énergie solaire

De nombreuses solutions voient le jour pour affronter le réchauffement climatique. Marjan van Aubel, elle, imagine des pièces lumineuses aux lignes futuristes.

«Si nous intégrons l’énergie solaire dans notre vie quotidienne, si nous la rendons belle et accessible, nous pouvons la démocratiser à grande échelle. Les designers peuvent jouer un rôle important à cet égard.» Voilà le mot d’ordre de la designeuse Marjan van Aubel, établie aux Pays-Bas. Depuis quelques années, elle conçoit des panneaux photovoltaïques d’intérieur, aussi discrets qu’esthétiques.

A la découverte de l’énergie solaire

Portrait de Marjan van Aubel (à gauche) / Prototype issu de la collection Ra (à droite).
Portrait de Marjan van Aubel (à gauche) / Prototype issu de la collection Ra (à droite). Sander Plug / Pim Top

Tout juste sortie de la Rietveld Academie, Marjan van Aubel s’installe à Londres. Au cours de son master en design au Royal College of Art, elle fait une rencontre qui marque un tournant dans sa vie. Celle du chimiste suisse Michael Graetzel, qui invente, dans les années 1990, le principe d’une énergie solaire artificielle, à l’aide de pigments colorés photosensibles.

«Les cellules utilisent les propriétés de la couleur pour générer un courant. Une couche de dioxyde de titane est imprimée entre deux feuilles de verre et fait office de nano-éponge pour le colorant. Lorsqu’un photon (dans ce cas, un rayon du soleil) frappe ce « sandwich », de l’électricité est formée.» nous éclaire Marjan van Aubel. Le sujet la passionne et elle se l’approprie.

Dans un Ted Talk qui se tient en 2019, la designeuse explique que le soleil peut fournir, en une heure, assez d’énergie pour nourrir le monde entier en électricité pendant un an. Une réflexion qu’elle doit à la lecture du livre The Solar Revolution de Steve McKevitt : l’énergie solaire n’est pas utilisée à bon escient mais les solutions sont à portée de main.

Le pavillon néerlandais avec un toit en verre dont les motifs font référence à la lampe Suune, récemment créée par Marjan van Aubel.
Le pavillon néerlandais avec un toit en verre dont les motifs font référence à la lampe Suune, récemment créée par Marjan van Aubel. DR

Le studio de la designeuse a pour objectif de rendre l’énergie accessible à tous, de manière durable. Exposées au MoMA à New York, ses solutions solaires sont considérées comme de véritables œuvres d’art. Dans ses tableaux d’un genre nouveau, les couleurs vives semblent fondre à la chaleur d’un halo lumineux.

Le principe ? Des cellules photovoltaïques circulaires sont imprimées sur de fines feuilles. Elles sont composées de silicium amorphe que l’on trouve généralement dans les panneaux solaires et permet de capter la lumière, laquelle est ensuite stockée dans une batterie alimentant un papier électroluminescent. Tout au long de la journée et en fonction de la position du soleil, les couleurs de l’œuvre changent. Le soir, un halo lumineux s’illumine d’un bleu éclatant.

Ses créations prennent parfois une ampleur exceptionnelle, comme lors de l’exposition universelle de Dubaï de 2021, où l’artiste a coiffé le pavillon néerlandais d’un toit en verre composé de panneaux photovoltaïque. La lumière, pleine de poésie, venait alors se refléter dans tout l’espace : son projet est d’ailleurs élu « Projet de construction Durable» de l’année.

Le panneau photovoltaïque pensé comme une oeuvre d’art

La collection Ra de Marjan van Aubel.
La collection Ra de Marjan van Aubel. Pim Top

Il émane des pièces photosensibles de Marjan van Aubel une réelle émotion. Et la collection Ra — hommage au dieu soleil égyptien— ne déroge pas à la règle : «Tout comme les vitraux des églises racontaient des histoires du passé, cette série raconte l’histoire de notre avenir […] C’est une histoire d’espoir, où nous regarderons vers le ciel au lieu de creuser dans le sol.»

Elle ajoute : «Je pense qu’il est bon de montrer que l’énergie solaire peut aussi devenir une forme d’art […] Elle devient quelque chose de désirable, quelque chose dont nous aimerions être entourés plutôt que de la cacher.» De quoi apporter de la chaleur à nos intérieurs.

Son dernier projet, Sunne, est une lampe d’ambiance auto-alimentée : « Elle le point de départ d’une série de produits accessibles à un public plus large et qui contribueront à faire prendre conscience de la façon dont l’énergie solaire peut être intégrée dans notre vie quotidienne.» Un véritable manifeste, donc.

Pour aller plus loin, Marjan van Aubel et son équipe travaillent sur l’idée d’une biennale autour de l’énergie solaire qui rassemblera des designers ayant à cœur d’en faire l’énergie principale de demain. Et la designeuse de rêver : « Les façades des bâtiments, la peinture, les routes, les vêtements : toute surface pourrait, à l’avenir, permettre de stocker de l’énergie solaire … » 

> Découvrir l’univers de la designeuse et sa collection Ra.