Interview de Tom Dixon : « Je veux faire une différence dans le monde grâce au design »

Lors de la dernière Design Week de Milan, le Palazzo Serbelloni a vu se presser les foules curieuses. Là, Sotheby's invitait le designer Tom Dixon à exposer vingt ans de création lors d'une installation rétrospective. L'occasion pour IDEAT de parler du temps qui passe avec le Britannique...

Tom Dixon a vingt ans… C’est avec son humour tout britannique que le designer a remonté le temps avec nous, à l’occasion de l’exposition qui célèbre l’anniversaire de sa marque.


Interview de Tom Dixon, à l’occasion de l’exposition Twenty

IDEAT : Vous fêtez donc vos 20 ans de carrière…
Tom Dixon :
Non ! C’est une fake news ! Ma carrière est beaucoup plus longue que ça. Mais vous avez raison, la marque Tom Dixon fête bel et bien ses vingts ans cette année.

Quel est le premier objet estampillé Tom Dixon ?
T. D. :
Je me souviens d’un écran architectural en plastique extrudé qui n’a pas marché du tout. Je pense que j’étais dans un mauvais timing… J’aurais dû le ressortir pendant la pandémie ! C’était comme un paravent qui s’enroulait, qui pouvait délimiter plusieurs espaces. Très Covid, finalement.

Le premier succès de la marque ?
T. D. : Peut-être la Mirror Ball, la boule argentée qu’on ressort en matériaux recyclés, commercialisée dès la seconde année d’exercice de la marque. D’une façon globale, le luminaire a pris rapidement. A l’époque, je n’avais pas imaginé que les clients oseraient plus investir dans cette typologie de produit plutôt que dans le mobilier. Et pourtant ! Ils voient ça avec beaucoup de modernité, tandis que dans le meuble reste un achat conservateur. On peut faire des trucs de dingue autour d’une lampe, alors les gens s’amusent avec.

La lampe Mirror Ball, best-seller de la marque Tom Dixon.
La lampe Mirror Ball, best-seller de la marque Tom Dixon.

Est-ce sur cette typologie que vous vous amusez le plus ?
T. D. : J’aime me dire que tout est possible grâce à une lampe. Mais je m’amuse aussi avec les matières classiques ou traditionnelles, comme le liège et le papier, et avec celles qui feront le futur, comme les champignons. Finalement, c’est une typologie qui est en perpétuelle évolution d’un point de vue technologique. Il y a eu l’arrivée des LED, la lumière électrique qui passe désormais à l’électronique… Il n’y a pas de type de mobilier qui a subi la même révolution. Les tendances design changent quand la technologie, les matériaux ou la façon de vivre évoluent. La dernière fois que ça s’est passé dans le mobilier, c’était dans les années 60 avec l’arrivée du plastique, qui répondait aux nouvelles normes de la vie quotidienne. Aujourd’hui la révolution se passe sur le web : pas vraiment au niveau du mobilier, donc. Et le luminaire est à la lisière de ces deux mondes.

Tom Dixon fait bon usage du confinement pour confectionner lui-même des lampes en papier afin de tracer les contours du futur proche de la marque.
Tom Dixon fait bon usage du confinement pour confectionner lui-même des lampes en papier afin de tracer les contours du futur proche de la marque. Tom Dixon

Qu’est-ce qu’on ressent, quand on a 20 ans ?
T. D. : La marque est entre deux âges : middle-aged. Du coup, c’est comme si les gens attendent quelque chose de nous. Alors, trouver de nouvelles façons d’innover ou de s’amuser devient plus compliqué qu’aux débuts, à ce moment où tout est possible, chaque matière ou produit inédit, et où personne ne s’attend à rien. Cette exposition est d’ailleurs intéressante à un niveau personnel : elle m’a permis de me rendre compte de tout ce que nous avons testé, qui n’a pas marché à une époque, de comprendre pourquoi et surtout comment certaines techniques ou produits pourraient être retravaillés aujourd’hui. C’est la force de la maturité.

Dans 20 ans, vous considérerez-vous comme un senior ? Qu’adviendra-t-il de Tom Dixon ?
T. D. : J’espère que la marque sera toujours là mais aussi que je ferai autre chose. L’avantage de cette profession est qu’elle touche à tout, au bâtiment, aux systèmes, à la mode, aux produits… On peut évoluer mais aussi changer du tout au tout, notamment de secteur, tout en utilisant une même méthodologie. J’aimerais beaucoup faire plus de bâtiments, pour marquer une réelle différence dans la vie quotidienne des gens. J’ai travaillé pour le luxe mais aussi sur des projets de grande consommation. Ce sont désormais les problèmes d’ordre mondial qui m’intéressent. Comment y répondre grâce au design ? J’aimerais faire des choses plus importantes. Je trouve notamment que bâtir de façon conventionnelle est si cher ! Si on y travaillait comme du point de vue d’un produit, on trouverait de nouvelles solutions… J’ai déjà quelques idées !

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