Chef d’oeuvre d’Alvar Aalto achevé en 1959, la maison Louis Carré accueille actuellement les créations d’Illka Suppanen, designer et architecte finlandais parmi les plus influents de sa génération. Baptisée Vanishing Point, l’exposition « explore l’esthétique du fragile et de la transformation » à travers des sculptures réalisées en verre de Murano en même temps qu’elle tisse des liens entre les œuvres des deux créateurs.
Des œuvres « évanescentes et architecturales » dont la transparence cherche à évoquer les différents états naturels de l’eau : gelée, liquide ou à la limite de l’évaporation. Le tout à travers des formes directement inspirées de la nature ou à l’inverse, beaucoup plus sobres, presque minimales. Une rigueur géométrique qui contraste avec la richesse des textures où l’argent se mêle parfois au verre.
D’une étonnante finesse pour évoquer l’ébullition ou appliqué en fines feuilles entres les strates d’une Vanishing Barge, le métal acquiert une fragilité inattendue, accentuée par l’épaisseur du verre, comme pour nous rappeler l’évanescence de la vie et le passage du temps. Tout aussi éphémères, du moins en apparence, les fragments Fission, taillés tels des glaçons, s’empilent pour former la sculpture Fusion, dans un équilibre tellement précaire que le temps semble s’être arrêté.
Avec la série Reunited, Illka Suppanen imagine des œuvres semblables à des centres de tables, composées de milliers de fragments de verre, savamment rassemblés grâce une cuisson stoppée au moment précis où les cristaux commencent à fondre tout en conservant chacun sa forme. Une prouesse technique pour un résultat des plus sensibles, à mi-chemin entre la sculpture et le design qui n’aurait pas déplu à Alvar Aalto, grand adepte du mélange des disciplines.
En plus de ses sculptures, Illka Suppanen présente deux pièces de mobilier éditées par la galerie Maria Wettergren, à l’initiative de cette exposition : la lampe Porcupine, recouverte de picots en résine sur l’intégralité de sa surface, et le fauteuil Stick, porté par une structure en frêne démultipliée, digne d’une micro-architecture. Un design à chaque fois basé sur la répétition pour accentuer « le point de fuite de la perspective » (Vanishing Point) en référence aux principes architecturaux chers à l’auteur de la maison Louis Carré.
Une filiation avec l’architecte et designer dont Illka Suppanen se réclamait déjà avec l’iconoclaste Burning Aalto, également exposé. Réalisé en brulant le fameux 60 Stool d’Alvar Aalto, préalablement recouvert d’une structure métallique qui résiste aux flammes, le tabouret rend ainsi hommage à l’esprit de celui qui nourrit son travail. Un esprit à découvrir en même temps que l’exposition, au sein de la maison Louis Carré, jusqu’au 26 novembre.
Exposition « Vanishing Point ». Maison Louis Carré. 2, chemin du Saint-Sacrement, 78490 Bazoches-sur-Guyonne.
Les samedis et dimanches, de 14 heures à 18 heures.
La maison Louis Carré, bijou d'architecture
Achevée en 1959 pour accueillir les œuvres accumulées par le marchand d’art Louis Carré, la maison rachetée en 2006 par l’Association Alvar Aalto s’ouvre désormais au public pour promouvoir la vision de son architecte. Convaincu que l’art améliore et embellit notre quotidien, Alvar Aalto y a tout dessiné, des poignées de portes aux luminaires, pour créer une œuvre d’art totale, mêlant autrefois les toiles de Picasso et les sculptures de Giacometti à une architecture toujours d’avant-garde…