Il est sans aucun doute l’un des architectes les plus discrets et les plus mystérieux de sa génération. Peter Zumthor choisit ses projets au compte-goutte, quittant rarement sa maison du canton des Grisons, à l’est de la Suisse, où est également installé son studio. Il accepte tout de même, en 2014, de participer au programme Living Architecture, lancé en 2006 par l’auteur Alain de Botton, qui invite des architectes à concevoir des villas d’exception destinées à des locations saisonnières. Le projet de Peter Zumthor trouve sa place dans les collines verdoyantes du Devon, au sud-ouest de l’Angleterre et ne se sera terminé qu’en 2021. Sept années de construction qui rappellent la valeur au cœur de la pratique de l’architecte suisse : la lenteur.
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Architecture de l’émotion
« Cette maison sur la colline est baigné d’une atmosphère sereine qui semble venir de son histoire », a pu confier Peter Zumthor, l’architecte de la Secular Retreat. Un lieu en pleine nature où se ressourcer, loin des foules, qui trouve sa place sur un terrain autrefois occupé par une maison bâtie dans les années 1940, dont ne restaient que les aménagements extérieurs et les nombreux pins de Monterey plantés par les anciens propriétaires.
Peter Zumthor décide de conserver ces éléments et d’inscrire le bâtiment dans son paysage. Située sur les hauteurs du Devon, au sud-ouest de l’Angleterre, la demeure ne se laisse découvrir dans son ensemble qu’au dernier moment. « Ce n’est pas une question d’esthétique. Du moins, dans un premier temps, il ne s’agit pas d’établir un contact formel avec les alentours, mais de chercher une forme de contact, de réaction émotionnelle à l’environnement, et de l’exprimer par l’architecture », commentait l’architecte à l’issue des sept années de travaux.
Une approche par l’affect qui se retrouve aussi bien depuis l’extérieur que de l’intérieur. L’architecture et le paysage cultivent en effet un lien fort, notamment par l’utilisation massive du verre en façade et la distribution des espaces. La maison est construite de plain-pied et composée d’un bloc central accueillant les pièces communes, tandis que les chambres sont réparties dans deux ailes séparées.
Le béton prend son temps
Désireux d’ancrer encore davantage la maison dans le paysage et sa région d’adoption, Peter Zumthor décide de privilégier des matériaux locaux… et du béton pisé. Une technique de construction qui consiste à appliquer la matière couche par couche, en ajoutant de l’argile et de la chaux, laissant ainsi transparaître les lignes de démarcation de chaque journée de travail. Un choix plus chronophage, qui explique en partie la longueur de la construction, mais en adéquation avec les principes de l’architecte connu pour sa passion des savoir-faire artisanaux et son éloge de la lenteur.
Le béton fait partie intégrante de l’identité de la Secular Retreat, omniprésent de la structure au design d’intérieur, des piliers aux murs en passant par le toit en débord, lui apportant un caractère résolument minimaliste, voire brutaliste. Pour dialoguer avec cette froideur apparente, Peter Zumthor choisit pour le sol une pierre calcaire, locale, ajoute de nombreuses baies vitrées et utilise des essences de la région afin de réchauffer l’atmosphère.
Dans les espaces communs de la Secular Retreat, le plan ouvert est privilégié, rythmé par les piliers de béton, dont le caractère brut est adoucit par l’ajout d’éléments décoratifs en bois, à l’image de la baignoire rectangulaire réalisée sur-mesure, et de meubles pensées spécifiquement pour l’occasion.
Peter Zumthor a en effet lui-même dessiné le mobilier, dont une imposante table à manger autour de laquelle se retrouver, des fauteuils alliant géométrie formel et confort et un espace de travail composé d’un bureau et d’une assise donnant sur les collines jalonnées de pins. Le décor se veut dépouillé, presque monacal, ne laissant de place qu’à l’essentiel.
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