Homo Faber 2024 : Luca Guadagnino combine l’artisanat d’art à la magie de Venise

Entre la splendeur de Venise et l'artisanat mondial, Homo Faber 2024 propose un voyage exceptionnel au cœur de la création. Sous la direction artistique de Luca Guadagnino, l'île de San Giorgio Maggiore se transforme en un théâtre d'émerveillement. Plongée immédiate dans cette biennale unique qui célèbre l'excellence et la beauté des savoir-faire du monde entier.

Venise a le vent en poupe en cette rentrée. Entre la Biennale d’art contemporain qui se prolonge jusqu’à fin novembre, la Mostra qui éblouit de stars et de paillettes la Cité des Doges jusqu’au 7 septembre et Homo Faber 2024, la Biennale des métiers d’art organisée par la Michelangelo Foundation for Creativity and Craftsmanship avec le soutien du groupe Richemont, qui vient d’ouvrir ses portes, il y a de quoi faire. Si cette dernière, qui célèbre l’artisanat contemporain originaire des quatre coins du globe, est moins médiatisée, elle mérite de s’y attarder. Ne serait-ce parce qu’elle investit la magnifique île de San Giorgio Maggiore, propriété de la Fondation Giorgio Cini, que l’on peut admirer, face au palais des Doges, se dressant dans toute la majesté de sa basilique construite entre 1566 et 1610. Et aussi parce que cette année, la direction artistique est signée Luca Guadagnino, le réalisateur de Call Me By Your Name et Challengers et architecte d’intérieur à ses heures. Visite guidée.


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Luca Guadagnino : quand le cinéma rencontre l’artisanat

800 objets, 400 artisans, 70 pays différents, 105 savoir-faire. Homo Faber 2024, la troisième édition de la biennale des métiers d’art organisée par la Michelangelo Foundation for Creativity and Craftsmanship avec le soutien du groupe Richemont réunit pour la première fois la crème de l’artisanat du monde entier – les deux précédentes éditions se focalisaient sur les savoir-faire européens et japonais.

Le cadre enchanteur de l’île de San Giorgio Maggiore est sublimé par une scénographie signée Luca Guadagnino.
Le cadre enchanteur de l’île de San Giorgio Maggiore est sublimé par une scénographie signée Luca Guadagnino.

Le thème de l’exposition ? The Journey of Life (comprendre “le voyage de la vie”). Explications. “Je tenais à rendre à l’artisanat sa dimension humaine, à ce que chacun se sente concerné grâce à une thématique qui parle chacun, confie Hanneli Ruper, Vice-présidente de la Michelangelo Foundation for Creativity and Craftsmanship. Le parcours suit donc les étapes d’une vie de la naissance à la mort.” Cette toile de fond permet au directeur artistique, le cinéaste Luca Guadagnino – accompagné de l’architecte Nicolò Rosmarini, le chef de projet de son studio – de plonger le visiteur dans un nouvel univers. Un peu comme Mary Poppins sautant à pieds joints dans un monde enchanté de dessin animé.

Luca Guadagnino & Nicolò Rosmarini posent dans le cloître, première étape de ce voyage. © Giulio Ghirardi pour la Michelangelo Foundation
Luca Guadagnino & Nicolò Rosmarini posent dans le cloître, première étape de ce voyage. © Giulio Ghirardi pour la Michelangelo Foundation

Quel que soit le cadre que l’on m’impose, je cherche toujours à raconter une histoire, révèle le réalisateur dans le communiqué. “The Journey of Life” est une thématique fascinante qui renvoie à un concept simple et universel. Elle nous a permis de trouver le juste équilibre entre mettre en valeur les créations artisanales et immerger le public dans l’extraordinaire architecture de la Fondazione Giorgio Cini, en révélant toute la pertinence de ce lieu. Ce fut pour nous une formidable expérience réflexive autour de grandes sources d’inspiration telles que Carlo Scarpa ou encore l’histoire et le patrimoine artistique de la ville de Venise.

En tout, dix salles racontent les moments clés de l’existence, la naissance évidemment, l’enfance, la célébration, l’héritage, l’amour, le voyage, la nature, le rêve, le dialogue et l’ultime périple, l’au-delà. “Nous avons souhaité proposer un périple harmonieux à travers différentes salles, ponctué de moments marquants au moyen d’installations de grande envergure, poursuit Nicolò Rosmarini. Chaque détail a été pensé avec soin et cela a abouti à des collaborations remarquables avec les plus grands artisans et les meilleurs experts, pour créer des objets porteurs de valeurs rares et de savoir-faire hors du commun. Devoir mettre en valeur et jouer avec l’architecture de la Fondazione Giorgio Cini a été un exercice fabuleux.

Homo Faber 2024 : plongée dans un voyage métaphorique

L’entrée est spectaculaire : en cette journée ensoleillée, le cloître apparaît dans toute sa beauté. Sous les arches, des tissus pailletés signés Rubelli déclinés dans un camaïeux de rose et de rouge sang virevoltent au gré du vent. Ici, le jeu de l’oie se veut une analogie de la vie, où la chance et le hasard ont un rôle non négligeable – en particulier à son commencement.

Le jeu de l’oie est ici une analogie de la vie.
Le jeu de l’oie est ici une analogie de la vie.

Sous la houlette de l’artiste et illustrateur Nigel Peake, vingt ateliers du monde entier ont été commandités pour réaliser chacun 3 cases de ce jeu que l’on dit inventé à Florence à la fin du XVIe siècle. En tout, soixante carrés brodés selon des techniques spécifiques ont été accrochés aux murs. Parmi nos préférés, on retient les pièces monochromes acidulées réalisées par l’atelier rwandais Kisany ou encore les modèles colorés confectionnés par les brodeuses mexicaine de l’atelier Uedi di Pehni Arcoiris en collaboration avec Arte de mi Tierra.

Autre salle qui s’imprègne sur les rétines : Célébration. Dans le réfectoire de la Fondation, le tableau Les Noces de Cana, peint par le Vénitien Paul Véronèse en 1563, est mis en miroir d’une table monumentale qui s’étend sur toute la longueur de la pièce, drapée dans un plissé de tissu rose bubble-gum. Dessus, on retrouve tout l’art de la table indispensable pour décorer dîners et réceptions huppées, des objets les plus traditionnels, les plus classiques, aux plus excentriques. Les trompe-l’œil sont légions. Impossible de ne pas être intrigué – voire époustouflée – par le plateau dégoulinant d’œufs cassés, de jaune dégoulinant et de cornets de glace renversés en céramique signé Bertozzi & Casoni, ou encore par l’English Breakfast réalisé en broderie 3D par la Britannique Youmeng Liu, découverte en plein travail à l’entrée.

Ce gâteau à la fraise plus beau que nature a été réalisé en broderie 3D par la Britannique Youmeng Liu.
Ce gâteau à la fraise plus beau que nature a été réalisé en broderie 3D par la Britannique Youmeng Liu.

Plus loin, dans le piscine, le voyageur est invité à rêver. La pièce est plongée dans le noir. En son centre, des dizaines de silhouettes vêtues de la fameuse robe à capuche Alaïa portée par Grace Jones dans Dangereusement vôtre (John Glen, 1985) issu de la saga James Bond. Tout autour, des masques scrutent, inquiètent, rappelant évidemment le carnaval de Venise, quand chacun peut se prétendre autre. L’atmosphère presque angoissant évoque sans mal la scène du bal du film Labyrinthe (Jim Henson, 1986), lorsqu’une toute jeune Jennifer Connelly se retrouve piégée en pleine réception masquée, déambulant parmi les monstres à la recherche d’un David Bowie tout en mèches effilée, en ombre à paupière et en gloss pailleté.

Et, partout, des artisans font des démonstrations de leurs habiles techniques, hypnotisant les novices. Des workshops sont organisés et on peut même participer à une œuvre collective XXL réalisée à l’occasion du centenaire de la Maison Lesage. Sans parler de ce qui se passe en ville, quand des fabricants vénitiens ouvrent les portes de leur atelier et dévoilent leurs trésors…

> Plus d’informations sur Homo Faber 2024 : The Journey of Life, ici


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