Gien, nouvelle vague : quand la faïence flirte avec le design contemporain

Résolument ancrée dans son histoire, la Faïencerie de Gien regarde vers l’avenir avec sa première Résidence Croisée. Une collaboration inédite entre artisans d’art, designer et manufacture qui redonne à la faïence ses lettres de noblesse version contemporaine.

Et si la faïence redevenait un terrain d’expression contemporaine ? À Gien, dans le Val de Loire, une résidence singulière redonne souffle et désir à un savoir-faire patrimonial. Sous l’impulsion de la designer Léa Zeroil, la matière se métamorphose en mobilier-bijou, les archives deviennent langage et la tradition s’offre un nouvel horizon. Un dialogue sensible et sculptural, où chaque pièce raconte une histoire d’alliance, de feu et de forme.


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Design d’héritage ou héritage du design ?

À Gien (Val de Loire), on pourrait croire que le temps s’écoule doucement, au rythme des pinceaux trempés dans les oxydes des ateliers de cette maison fondée en 1821. Pourtant, derrière les murs de cette manufacture estampillée « Entreprise du Patrimoine Vivant », une petite révolution a pris forme. Son nom ? Résidence Croisée. Son principe ? Croiser — justement — les savoir-faire, les énergies et les disciplines : un designer, des artisans indépendants et les équipes du fabricant. Son objectif ? Secouer la poussière (dorée à l’or fin, certes) et faire entrer la faïence dans une nouvelle ère.

La première invitée de ce format hybride et ambitieux est la designer Léa Zeroil, passée chez India Mahdavi et Laura Gonzalez et désormais à la tête de son propre studio. En s’entourant de la ferronnerie Affaires d’Enclumes et du ciseleur d’exception Mehdi Harzallaoui (fondateur du collectif Rhizome), Léa Zeroil orchestre un quatuor aux accents d’avant-garde artisanale.

Du mobilier-bijou qui réenchante la faïence

Ici, pas question de « revisiter » la tradition à coups de gimmicks néo-provençaux. Ce que propose Léa Zeroil est un vrai dialogue avec la matière et les archives, un jeu d’échos entre passé enfoui et formes futures. Le feu comme fil conducteur. Le végétal comme motif secret. Et l’ornement… réhabilité comme une vertu, pas une faute de goût.

Résultat, une collection de quatre pièces qui convoquent aussi bien l’Art déco que les bijoux étrusques. Console sculpturale, vase-corolle sur piédestal forgé, applique solaire et bougie architecturée : tout ici est pensé comme une alliance d’opulences maîtrisées. La faïence s’allie au fer forgé, au laiton doré, au ciselage fin. La technique, d’une précision chirurgicale, se met au service de l’émotion. Mention spéciale pour les carreaux anciens exhumés des archives, retravaillés en motifs indiens sur la console Lasa, ou encore pour le travail du motif sur la bougie Nehemia.

Mais surtout, cette résidence n’est pas un one shot mais une mise en bouche. Gien annonce déjà une deuxième édition croisée – cette fois autour de la faïence et du cuir. Comme un manifeste pour une nouvelle génération d’art décoratif, plus fluide, plus collaborative, et franchement plus désirable.


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