À l’origine, la première version de Foscarini naît à Murano, ville de l’artisanat du verre, et produit, dès 1981, des systèmes d’éclairage sur mesure pour le secteur tertiaire. Carlo Urbinati et Alessandro Vecchiato, architectes de formation, y travaillent alors comme designers (le second est parti en 2014).
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Des luminaires intemporelles
En 1983, les deux hommes rachètent l’entreprise pour se lancer dans l’édition de luminaires qui durent. Carlo Urbinati est formel : « C’est seulement en partageant la véritable passion des créateurs que l’on peut comprendre le sens du mot design, dans sa signification la plus pure et la plus authentique. »
En témoigne, depuis 1990, le succès de Lumière, de Rodolfo Dordoni (1954-2023). Seul son pied tripode est révélateur de son âge. La lampe de table se distingue également par son globe arrondi blanc à la surface luisante, symbole de l’excellence du savoir-faire artisanal de la maison. N’ayant pas d’ateliers en propre, celle-ci est toujours libre de choisir avec quel meilleur spécialiste travailler.
Peut-être est-ce la raison pour laquelle on ne peut pas réellement parler de « style » Foscarini, mais plutôt de couple éditeur – artisans. Impossible, dans ce schéma, de s’enfermer dans des habitudes. L’autre qualité de Foscarini est d’être un éditeur industriel qui, grâce à son vaste vivier de collaborateurs, est capable de s’adapter à des projets très divers.
Un nouveau tournant
En 1993, la société quitte Murano pour Marcon, toujours en Vénétie, sans s’éloigner de son réseau de verriers. Cette année-là, ce n’est pas de verre soufflé qu’est composé le lampadaire Orbital, mais de verre industriel, ensuite remplacé par du polyéthylène. Expressif, coloré, il trône depuis, avec Lumière, au musée du Design de la Triennale de Milan.
En 2000, c’est un Compasso d’Oro remporté pour la lampe Mite, du designer Marc Sadler, une sorte de fine tornade blanche faite d’un mélange de fibre de verre et de fil de carbone ou de Kevlar. En 2003, dans le nouveau siège, toujours à Marcon, les créations originales se multiplient. Le plus bel exemple en est Caboche, conçue par Patricia Urquiola et Eliana Gerotto en 2005. Inspirée d’un bracelet vintage des années 50 constellé de perles, elle se décline en lampe de table, applique, plafonnier ou lampadaire, composés d’un dôme recouvert de bulles transparentes ou ombrées que l’acheteur monte lui-même une à une.
L’effet est spectaculaire, opulent sans être kitsch. Même couverte de poussière, comme entrevue récemment au plafond d’un certain théâtre parisien (alors que la démonter pour la nettoyer est très simple), Caboche arborait l’allure d’un beau luminaire ancien.
Fonctionnelles et élégantes
Au-delà de ses produits, Foscarini s’investit dans la culture, et pas seulement en éclairant certains lieux de la Biennale de Venise. En 2010, elle lance et sponsorise la revue Inventario sous la houlette érudite de l’expert Beppe Finessi. La publication aborde une infinité de sujets, partant du principe que « tout est projet ». Et malgré la variété de ses contributeurs – plus souvent des spécialistes que des journalistes –, elle fait entendre d’une voix affirmée une grande multiplicité de points de vue.
En 2014, Inventario s’est d’ailleurs vu décerner un Compasso d’Oro. Aujourd’hui, le pan culturel de Foscarini s’exprime aussi dans VITE, un projet mené par Gianluca Vassalo, qui a voyagé sur trois continents pour photographier des lampes de la marque italienne dans les maisons de leurs usagers.
En 2022, l’éditeur s’est investi encore plus concrètement dans la culture du design avec l’acquisition de 90 % des parts de la société fondée en 1966 par le grand designer de luminaires allemand Ingo Maurer. L’idée était de préserver la force de son entité et de la faire rayonner par le biais d’un réseau de distribution international. Foscarini n’a donc rien d’un label conventionnel. Pas d’usines, beaucoup de souplesse, pas de liens d’exclusivité avec les designers; c’est sa façon de maintenir son assise en toute liberté.
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