Amoureux des matières
Sans répit depuis 2011, Félix Millory travaille aujourd’hui essentiellement pour les particuliers, très souvent en réhabilitation. « Je trouve beaucoup moins de complexité jouissive dans les constructions neuves qu’en rénovation. Avec mes clients, j’aime travailler sur l’histoire de leur bien, sur la valeur non pas financière mais sentimentale des lieux, je m’attache à ne pas perdre la valeur des choses », explique-t-il. Il réinvente ainsi des appartements et des maisons tout en réalisant aussi quelques showrooms où se poursuit le plaisir de pouvoir « travailler dans des lieux somptueux ».
De ses études d’architecture, il a hérité l’amour des matériaux, des détails bien dessinés. À mille lieues d’une approche purement décorative, il manie avec dextérité la cohabitation des matières. Dans un bel appartement haussmannien du XVIIe arrondissement, il révèle les moulures, une belle cheminée ou un magnifique parquet, y ajoute des miroirs noirs, une colonnade de béton brut.
À Aix-en-Provence, dans une luxueuse maison conçue pour Armand Hadida, fondateur de L’Éclaireur, qui lui a rapidement fait confiance, il exalte le marbre et l’âme du lieu. À ausculter son travail, on comprend que les couleurs vives et les fioritures ne font pas partie de sa palette. Influencé par l’architecture japonaise, Félix Millory est en quête d’une perfection non démonstrative : « Nos projets convoquent un peu d’audace et beaucoup de simplicité. Les espaces sont plus suggérés qu’imposés. J’accorde beaucoup d’importance aux proportions, aux circulations et, bien évidemment, à la matière dont j’aime conserver le côté hypersensuel. J’ai un vrai plaisir à toucher les choses. »
L’énergie communicative de Félix Millory est un véritable antidote à la morosité ambiante. Il sourit de son succès comme s’il en était le premier étonné. Pourtant – et on lui souhaite que cela dure –, l’ego ne semble pas être au cœur de ses préoccupations. « J’adore mon métier qui m’apporte beaucoup de satisfaction et un sentiment d’accomplissement. J’essaye pourtant de le considérer comme un travail et non comme une identification de ma personne. Nous aidons les gens en leur apportant le meilleur de ce que l’on sait faire, en les assistant dans toutes les difficultés liées au fait de construire. C’est déjà suffisamment gratifiant pour ne pas y ajouter son ego. Mon métier demande un véritable engagement émotionnel. On s’y retrouve immergé dans la vie personnelle des clients et gérer leurs exigences n’est pas toujours facile. Mais j’ai du plaisir à être avec les gens, à être sur un chantier. Je n’ai pas choisi la profession la plus reposante mais je ne pourrais tout simplement pas faire autre chose. »
Pour autant, il ne s’est pas dessiné de plan de carrière et observe son parcours avec distance. À l’avenir, il aimerait fonder une famille ainsi que travailler sur des projets plus importants et donc, des budgets plus conséquents, moins par ambition personnelle que pour pouvoir aller plus loin dans la recherche et l’audace. Un architecte à suivre !