Federica Biasi, une énergie volcanique au service d’un design apaisé

La designeuse italienne de 36 ans se dépeint volontiers comme excentrique, voire volcanique. Ce qui n’empêche pas le style de son travail de diffuser plutôt un sentiment de calme, à l’image de son atelier du quartier de Lambrate, à Milan, où elle s’est installée il y a dix ans.


L’esthétique de la designeuse Federica Biasi, c’est celle de la simplicité. Mais sans l’ennui. Née à Milan, elle y a étudié à l’Istituto Europeo di Design avant de commencer à créer des objets et du mobilier sobres mais élégants pour des éditeurs reconnus tels que Lema ou Gervasoni. Les Français la découvrent mieux quand, parrainée par l’Italien Andrea Branzi, elle reçoit un Rising Talent Award au salon Maison & Objet 2018.


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Arpège en beige

Trois ans plus tard, elle est sacrée jeune talent du design aux Elle Déco International Design Awards (Edida). Et son atelier du quartier de Lambrate, à Milan – à l’ambiance village et peuplé de jeunes pousses de la discipline – est moins un laboratoire qu’un cocon calme où elle se sent libre d’expérimenter. Installé dans l’un des nombreux anciens ateliers industriels du coin, le studio occupe un vaste espace à double hauteur divisé en deux par une paroi en verre.

« J’aime tellement la nature, explique-t-elle, que j’ai choisi cet endroit qui ne ressemble pas à Milan. Nous avons un petit jardin et, à travers les grandes fenêtres, je peux voir des arbres et des bambous. » Federica Biasi puise ses inspirations au-delà du design, dans le cinéma ou ses voyages. Le lieu évoque certes la recherche, mais sans le côté clinique, et ressemble davantage à un atelier de haute couture. Les échantillons de tissus et les mini-maquettes de structures fixées au mur suggèrent aussi son intérêt pour le fait main et l’artisanat.

L’entrée fait office de véritable salon, largement meublé par ses propres créations, prototypes ou produits finis : le fauteuil Livre pour Gallotti & Radice, le banc Uma pour Lema, des essais de tapis, la bibliothèque en métal Marianne pour Mingardo, ainsi que ses trois dernières réalisations, toutes en bois, la lampe ailée Thula pour Tooy, les chaises Cecile pour Mingardo et Easy pour Manerba.

Ici, chaque objet a une histoire référencée, comme l’Applique de Marseille de Le Corbusier (Nemo Lighting), ou la lampe Taccia, d’Achille et Pier Giacomo Castiglioni (Flos). La designeuse a choisi des classiques qui lui parlent, comme en témoignent aussi ces chaises Modus, d’Osvaldo Borsani pour Tecno, ou cet étonnant et méconnu miroir portemanteau Gronda, de Luciano Bertoncini, autre icône seventies à redécouvrir. « Je crois fermement au design intemporel, confie-t-elle. Et je suis également convaincue que l’industrie peut véhiculer des valeurs artisanales. »

L’art de l’équilibre

Si Federica Biasi ne prêche pas de façon prescriptrice et autoritaire, les objets placés en rang, comme un bouclier de référence, sur ses étagères, illustrent bien ses idées. Cet atelier fait aussi un peu maison même si elle n’y vit pas. La cuisine, ainsi que l’ensemble de l’espace sont rangés de façon stratégique.

Les tissages ou les plateaux qu’elle a conçus pour Coin côtoient des souvenirs de voyages ou des échantillons de matériaux. Tous ont en commun de n’exister que dans des tons naturels. Il n’y a ici aucun objet de couleur vive, pas même une touche de kitsch, ne serait-ce qu’au second degré. La designeuse affirme pourtant ne nourrir aucun a priori sur les couleurs et précise : « Je préfère analyser la matérialité et les textures des surfaces ainsi que leur réaction au toucher et à la lumière. »

Imprégnée des préceptes des designs néerlandais et japonais, Federica Biasi décrit son univers comme étant caractérisé par « des formes simples, un style délicat, toujours dans une approche épurée ». Si elle réfléchit et conçoit souvent en solitaire, cela ne signifie pas que la jeune femme vive recluse. Bien au contraire, elle est d’un naturel enjoué, aime s’entourer et profiter de l’existence. Les murs de l’atelier se souviennent d’ailleurs des rires et des agapes conviviales, notamment en été, quand intérieur et extérieur ne font plus qu’un.


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