Des bouteilles renversées et ajourées à travers lesquelles gouttent des filets rougeoyant, un mini-totem surmonté d’un entonnoir vide et cerclé par un tuyau gris d’où s’écoule une eau bleue turquoise, des éponges jaunes qui supportent des plats en marbre et des bols en porcelaine d’où s’écoulent des liquides colorés… Lors de l’édition 2017 de Design Parade à Hyères, les fontaines fantaisistes d’Arthur Hoffner ont conquis le cœur du public, qui a voté en masse pour le retour de ces ready-made colorés.
Honoré du « Prix du public », le jeune designer a pu poursuivre ses étude sur les fontaines : « Je suis obsédé par ces accessoires urbains qui me permettent de travailler autour de la notion décorative, contemplative, dans un monde pétri par la fonction. Entre la forme dessinée par l’homme et le fluide vital, j’apprécie de slalomer entre les faux semblants provoqués par cette typologie kitsch, désuète. Mais ce que j’aime par dessus tout, c’est jouer avec le fonctionnement de ces fluides. » De fait, on ne sait jamais vraiment d’où vient l’eau et par où elle s’enfuit… « Je provoque des moments d’hésitation », se réjouit, goguenard, ce diplômé de l’école Boulle et de l’Ensci qui a remporté en 2012 le premier prix du concours Cinna.
Le jeu se poursuit avec le choix des matériaux. Il construit ses fontaines avec des éponges (sic), en grès ou en utilisant un émail qui ressemble à s’y méprendre à une thermolaque epoxy, deux matériaux qu’il a pu utiliser grâce au partenariat noué avec la Manufacture de Sèvres…
D’autres professionnels ont repéré Arthur Hoffner comme Nicolas Bellavance-Lecompte, à la tête de la Carwan Gallery de Beyrouth, qui a exposé certaines de ses œuvres lors du salon du dernier meuble de Milan, et qui représente désormais une partie de son travail : « J’ai été séduit par ces créations ironiques qui s’inscrivent dans l’histoire des fontaines, de la Renaissance à aujourd’hui. Les assemblages, le choix des matériaux et l’idée de cacher les systèmes d’irrigation… J’ai aimé les stratégies design qu’Arthur a développées pour surprendre l’observateur. Pour moi, un grand spécialiste de la fontaine est né. Il ne s’impose aucune limite ; il a même collaboré avec un danseur… »
Après avoir scénographié l’exposition « Domestic Pools » en février, on retrouve les fontaines d’Arthur cet été à la Villa Noailles dans « Le cours de l’eau » (jusqu’au 30 septembre). Dans cette exposition personnelle qui s’étale dans les étages de la villa, il décline l’art de la fontaine dans plusieurs pièces furieusement pop. « L’année dernière, j’ai dû me contenter d’éponges. Cette fois, j’ai pu aller plus loin puisque j’ai utilisé le marbre, le grès ainsi que d’autres matériaux plus luxueux. » Pas cachottier, Arthur Hoffner expose aussi un répertoire des accessoires qui composent ses œuvres, en dévoilant ainsi une partie de leur mécanisme. Et pourtant la magie fonctionne toujours…
« Le cours de l’eau » d’Arthur Hoffner, jusqu’au 30 septembre à la Villa Noailles. Montée de Noailles, 83400 Hyères. Tous les jours sauf mardis et jours fériés, de 14 h à 19 h (15-21 heures le vendredi. Entrée libre.