Un pied à Lisbonne, l’autre à Barcelone, les fondatrices du studio de création et d’architecture d’intérieur Dora Daar œuvrent à faire de chaque maison un refuge, un espace sacré où trouver son équilibre. Rencontre avec Natalia Sly et Pepi de Boissieu.
2007. Pepi de Boissieu et Natalia Sly se rencontrent à Buenos Aires par des amis communs. La première, franco-argentine, est pourtant née à New York, à des milliers de kilomètres de la seconde qui vient au monde en Grande-Bretagne. Leur relation toute entière est ponctuée de voyages : en 2008, le hasard les mène à Londres où leurs liens se renforcent jusqu’à ce qu’elles soient meilleures amies.
Quand Pepi de Boissieu pose ses valises à Barcelone et devient créatrice culinaire en 2009, Natalia Sly retourne vivre en Argentine pour lancer une galerie d’art. C’est finalement à la faveur d’un nouveau déménagement que leurs chemins vont se recroiser à Lisbonne, en 2017.
« Le chef Estanis Carenzo allait ouvrir le restaurant Casa dos Prazeres/Rei da China et nous a confié la décoration d’intérieur : on ne l’avait jamais fait mais c’était très intuitif et ça nous a rapproché» se rappelle Pepi de Boissieu. Abreuvé de références cinématographiques comme l’univers fantasque et décadent de Charlie et la Chocolaterie, le duo esquisse une adresse composée de trois espaces : un bar à nouilles, un speakeasy et une table dans l’esprit de Macao, l’ancienne colonie portugaise de Chine. « Nous avons abordé cette première collaboration sous l’angle du ressenti qu’allait procurer ce lieu.» ajoute Natalia Sly. L’expérience plaît tellement aux deux amies que Pepi de Boissieu décide de s’installer à Lisbonne quelque temps.
Les chantiers s’enchaînent jusqu’à ce que la pandémie invite le binôme à « imaginer d’autres visions de la maison.»
« Nous avons besoin d’un refuge pour conforter nos états d’âme.»
A force de travailler ensemble, Pepi et Natalia suivent le même cheminement spirituel. Alors que le monde entier tourne au ralenti, elles réalisent que leurs projets doivent aller au-delà de la simple décoration. Elles s’intéressent à l’influence de leur environnement sur la façon dont elles se sentent au quotidien et une citation du philosophe Alain de Botton les confortent dans cette réflexion : « Nous avons besoin d’un refuge pour conforter nos états d’âme.»
Une vision holistique de la maison
Leur studio Dora Daar naît en juin 2020 et invite d’abord à mettre en place des rituels pour renouer avec sa maison et en tirer une source d’énergie. Cette vision holistique suggère que c’est chez soi que l’on est vraiment entier : elle rencontre un écho particulier sur Instagram, à une période où les sorties ne sont pas permises.
Portées par cet élan, Natalia Sly et Pepi de Boissieu dévoilent une première création quelques mois plus tard. Le tapis circulaire «Oraculo» se déploie autour des troncs d’arbres : une idée inspirée de leur voyage au Sénégal où les familles se réunissent à l’ombre des feuillages. « Il est réalisé en alfa et est tressé à la main par des tisserands espagnols.» nous éclaire Pepi de Boissieu. Car leur démarche est dictée par l’éco-responsabilité : Dora Daar privilégie les productions locales et en petites séries.
Si toutefois, une création est produite à l’étranger, c’est pour soutenir une communauté, comme dans le cas des coussins « Nube» brodés en Casamance par des artisanes sénégalaises dont c’est la tradition. Natalia Sly abonde : « Nous ne créons pas des objets pour qu’ils s’ajoutent à ceux que vous avez déjà. Ils ont une histoire et une utilité.»
Certaines collaborations naissent aussi de leur amitié avec d’autres esthètes. L’applique en laiton « Helios Séléné» est par exemple le fruit d’une rencontre avec la marque barcelonaise Après Ski : on y dépose une bougie pour passer en douceur de la lumière à l’obscurité, à la tombée de la nuit. Pareils à des tableaux, les paravents « Biombo» ont, eux, été peints par l’artiste Joshua Perkins et permettent de créer des recoins intimistes dans la maison.
En parallèle de la conception de ces beaux objets, Pepi de Boissieu et Natalia Sly travaillent également sur des projets de décoration d’intérieur pour des hôtels et des particuliers. Il n’existe pas de formule magique pour autant, les fondatrices de Dora Daar estiment que « tout repose au contraire sur un facteur invisible, un état d’esprit, un sens de la convivialité.»
Après avoir privilégié le développement de leur studio en ligne, elles renouent désormais avec le monde physique. Fortes du succès d’une première vente éphémère sur la côte portugaise à l’été 2022, elles prévoient déjà une saison estivale baptisée « United Summer Of Love » dans le même village de Melides en août prochain. Chaque soir, le chef argentin Ezequiel Bressia dressera une table pour douze personnes, autour de spécialités de saison et de vins naturels. Sous les étoiles, il y a fort à parier que de nouvelles collaborations verront le jour …
> Les créations de Dora Daar sont en vente sur leur site doradaar.com
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