Qui est Daniel Hayden, ce designer sauvé par la création ?

Créatif par nature, Daniel Hayden n’a pu mettre en pratique sa vision que très récemment. Un changement de carrière radical qui a donné naissance à une première collection remarquable. Portrait.

Installé dans la ville anglaise de Bristol, Daniel Hayden, la quarantaine, n’en est qu’aux prémices de sa carrière de designer, débutée en 2022 suite à une reconversion professionnelle. Et pourtant, en à peine deux ans, il rejoint le catalogue de la prestigieuse galerie en ligne Invisible Collection et crée une ligne le plaçant sur le radar du monde du design. Rencontre avec cet amoureux du bois qui se livre sans retenue, dévoilant l’âme derrière l’objet.


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Sauvé par la création

Dès son plus jeune âge, Daniel Hayden se démarque par sa grande sensibilité envers les intérieurs qu’il côtoie. Réalisant que certaines lumières, certaines couleurs, le mettent plus à l’aise que d’autres, il pose sans en avoir conscience un regard critique sur la décoration. Adolescent, le Britannique, qui passe ses heures perdues à crayonner et à dessiner des bandes-dessinées, se rêve animateur de cinéma d’animation. Mais la vie en décide autrement, l’entraînant dans un monde de cols blancs et une vie de bureau peu enthousiasmante. Un univers dans lequel il évolue sans joie, souffrant de dépression chronique avant qu’une hémorragie cérébrale ne le pousse à voir les choses en face : pour sa survie, un changement drastique s’impose.

L’ébéniste Daniel Hayden à l’œuvre.
L’ébéniste Daniel Hayden à l’œuvre.

Il commence par des cours du soir. Puis, profitant du monde en pause à l’heure de la pandémie, il démarre une formation à plein temps la Williams & Cleal Fine Furniture School, dans le Somerset, écrivant les premiers mots du nouveau chapitre de son histoire. « En plus du dessin, je joue de la guitare et, adulte, j’ai commencé à suivre des cours du soir en métallurgie, en céramique, bijouterie, couture, et enfin en menuiserie. En seulement quelques cours j’ai compris que je voulais travailler le bois », confit Daniel Hayden.

Daniel Hayden : la révélation du bois

« J’aime être proche du bois, continue le designer. Cette matière me permet de me reconnecter au monde sûrement parce que le travail de ce matériau est un élément fondamental de l’être humain. Le contraire de l’éphémère et de l’abstrait qui constituent une grande partie de nos vies aujourd’hui, et, matériellement, il est si chaleureux, si accueillant. J’ai de vifs souvenirs d’enfance dans la maison de mon parrain – leurs murs étaient recouverts de lambris  rainurés et languettes de pin verni – et déjà à l’époque j’adorais leur caractère tactile, la convivialité et le calme qu’il s’en dégageait. Il y a quelque chose de magique dans la façon dont le bois réagit à la lumière : il a une manière de briller qui me touche profondément, sans que je ne sache expliquer comment. »

La relation de Daniel Hayden à cette matière est au centre de sa première collection éditée par The Invisible Collection. Pour son entrée le monde du mobilier, le bois se fait matériau unique. Dessinateur avant tout, le Britannique aime coucher ses idées sur le papier – ou sur l’écran. Quand l’une d’elles lui semble bonne, il la développe, pousse la recherche, la dessine, la redessine, la fignole. La seconde étape est sa réalisation en 3D sur ordinateur, qui n’aboutit selon lui que lorsque la pièce peut “marcher par elle-même”, expression qu’il emprunte au céramiste Jeremy Anderson. Enfin, la matière entre en scène, taillée, découpée, poncée.

La chaise « Chapel » de Daniel Hayden à l’assise en jonc tissé inspirée des créations de Charlotte Perriand.
La chaise « Chapel » de Daniel Hayden à l’assise en jonc tissé inspirée des créations de Charlotte Perriand.

Une muse de légende

Les sources d’inspiration sont multiples pour le designer anglais, passant du mouvement Arts & Crafts pour lequel il se passionne, à la création contemporaine, du mobilier à l’art en passant par le milieu de la mode, dans lequel évolue sa compagne. Mais l’une des ses sources d’inspiration principale reste la figure emblématique du design français, Charlotte Perriand.

« J’adore son modernisme français et rustique – ma chaise Chapel possède un siège en jonc tissé simplement parce que je voulais me rapprocher des assises de cette grande dame, en capturer une partie des sensations. Dans l’une de ses biographies elle parle d’un « modernisme fait main » qui m’a vraiment interpellé. Elle le pensait d’une manière plus explicitement politique ou économique, ce avec quoi je suis d’accord, mais même à un niveau purement esthétique, je trouve l’idée vraiment convaincante : j’aime les choses qui réussissent à équilibrer la simplicité du modernisme, la texture et l’âme du fait main ».

Une première collection plurielle

Immédiatement après avoir terminé sa formation en menuiserie, Daniel Hayden se lance dans la création de sa première collection qui rassemble les nombreuses idées et inspirations que le designer a accumulé au fil des années. Pouvant enfin laisser libre cours à sa créativité, il possède désormais les outils nécessaires pour traduire ses idées en objets. « Il s’agit de ma toute première collection, donc forcément elle contient des bribes d’idées qui se sont accumulées dans ma tête depuis des années. J’ai commencé par fabriquer la chaise Chapel, le tabouret Angel puis le miroir Quiet Loud. J’étais très clair dans mon esprit quant aux pièces que je voulais créer. Je voulais qu’elles soient suffisamment sophistiquées pour équilibrer la sensation de joie et la résonance émotionnelle – dont j’avais vraiment besoin, après avoir lutté contre la dépression pendant si longtemps – avec une élégance qui les rendrait belles, plutôt que fantaisistes. J’ai également rapidement constaté que dans mon travail, de manière inconsciente, une esthétique catholique moderniste s’imposait. Cette influence vient directement de tous mes dimanches passés, lorsque j’étais enfant, dans des églises construites au milieu du siècle dernier. À mes yeux, cette collection est un étrange mélange de grand théâtre et d’ascèse brutale » décrit le designer.

La première collection de Daniel Hayden, éditée par Invisible Collection.
La première collection de Daniel Hayden, éditée par Invisible Collection.

Son projet attire rapidement l’attention de Invisible Collection qui propose de l’aider à développer sa collection. La ligne de trois pièces étant trop limitée à leur goût, elles lui demandent de retourner dans son atelier et de revenir avec de nouvelles idées. Une opportunité dont Daniel Hayden n’aurait jamais osé rêvé, et qui l’amène aujourd’hui à présenter six pièces. Soit le début d’un nouveau chapitre dans la vie de ce créatif qui pense déjà à la suite et à sa prochaine collection.

> Plus d’informations sur Daniel Hayden ici, et sur la collection ici.


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