Dessinée par Henri, l’architecte, et construite par Jean, l’ingénieur, la Villa Dollander est conçue à quatre mains par les frères Prouvé au sortir des années 40. Alors que le cadet, Henri, fait ses armes au sein de l’agence de son aîné, la famille Dollander commande à la fratrie une maison de vacances face à la plage de Saint-Clair, sur le front de mer du Lavandou.
Complétée en 2014 par une dépendance de 85 m2, la résidence d’origine n’excède pas les 100 m² mais devrait tout de même séduire les amateurs de grands espaces grâce un jardin de deux hectares et demi qui dialogue avec l’horizon.
Classée aux Monuments historiques depuis 1991, la villa peut se targuer d’un système constructif emblématique du génie de Jean Prouvé. En tôle d’acier plié, ses célèbres portiques soutiennent une poutre centrale du même acabit. Excepté le mur du fond réalisé en pierres, tous les éléments porteurs sont préfabriqués en usine, à l’image des bacs acier de la toiture, des cloisons intérieures en bois et des portes percées de hublots.
Autant de composantes qu’il utilise jusque dans sa maison personnelle à Nancy, et avec lesquels il élabore un nouveau concept d’architecture industrialisée. Décliné à travers une quinzaine de réalisations disséminées à Royan, Tourcoing et Meudon, ce principe doit notamment répondre à l’urgence de la reconstruction dans la période d’après-guerre.
Pour les deux frères, cette villégiature est l’occasion d’initier un nouveau rapport à la nature. De grandes baies vitrées invitent à communier avec le paysage, tandis qu’une galerie couverte favorise la vie en plein air. Habillé de bambous, elle relie les espaces de vie avec trois chambres et une salle de bains.
Au sol, les tomettes en terre cuite débordent jusque sous les auvents astucieusement agrémentés de bancs par Henri Prouvé. Moins connu que son frère, l’architecte a pourtant imaginé des projets d’envergure après avoir fondé sa propre agence nancéienne.
Dans le fief de la famille Prouvé, Henri signe notamment la tour Joffre Saint-Thiébaut en 1963. Preuve de son talent, l’immeuble de 24 étages a été labellisé « Patrimoine du XXe siècle » en 2015. Une reconnaissance tardive qui est encore loin d’égalée celle de son frère.
Comme pour la Villa E-1027 d’Eileen Gray et le Cabanon de Le Corbusier, espérons que l’Etat via le Conservatoire du littoral puisse un jour acquérir cette demeure exceptionnelle afin de la préserver et d’en faire profiter un large public.