« Can you open the curtain, please ? » Il est 18h30 tapantes quand le chef coréen Esu Lee demande au responsable de salle d’ouvrir les rideaux du Jip, son restaurant situé à Paris dans le 11e arrondissement. Derrière la fine paroi qui lui arrive à la taille et délimite les fourneaux, il accueille tout sourire les convives qui ne se font pas prier, même pour dîner aussi tôt.
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Cuisine libre
À la manière d’une pièce de théâtre, les trois coups ont retenti et les seize places se remplissent à la vitesse d’un plat dévoré, à table ou au comptoir face au chef, renforçant le sentiment d’assister à un spectacle privilégié. On avait quitté Esu Lee la veille de la pandémie dans son restaurant CAM Import-Export (IIIe), délivrant une cuisine relevée et inspirée des livres de recettes oubliées et de la tradition monastique de son pays natal.

On le retrouve chez Jip (XIe) – qui signifie maison –, ouvert en collaboration avec David Israël et Jonathan Gainville, déjà à l’origine du micro-restaurant Double (XVIIIe ). Le chef, qui a fait ses armes parisiennes chez Passerini (XIIe) et auparavant chez le Britannique Jeremy Strode, en Australie et au Garçon Saigon, à Hong Kong, propose ici un menu disponible en version végétarienne.
En entrée, un poisson en sashimi sur des feuilles de radicchio rehaussé d’une sauce gochujang à la prune fermentée se révèle aussi beau que bon. Le croustillant d’une friture de crevette et son aïoli au poivre de Sichuan le dispute à un plat réconfortant dont il a fait sa signature, des nouilles façon udon, sauce au poivre.

Pas étonnant pour ce fils d’un architecte et d’une restauratrice que l’aménagement ait son importance. Il a fait appel au studio Aus (créé par Manon Guéguen et Ulisses Machado) pour relever le défi d’aménager cet antre de 27 m2 en un restaurant chaleureux grâce à un éclairage tamisé, des textures naturelles comme le bois placage chêne teinté ou du granit vert.
« Nous avons travaillé la perception, raconte Ulisses, par un jeu de perspectives et de reflets: une menuiserie sur mesure accompagne le regard et structure la circulation centrale, tandis que des miroirs disposés en face-à-face et au plafond multiplient les volumes et prolongent la profondeur. » Sans compter la cuisine en longueur, ouverte sur la salle, pour « emprunter aux codes de la vie domestique ». Esprit « comme à la maison », es-tu là ?
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