À Bordeaux, Cécile d’Amade Briand métamorphose un hôtel particulier

Installée à Bordeaux, Cécile d’Amade Briand a fondé Casapiane, une structure qui habille les intérieurs par des mises en scène dans lesquelles chaque objet trouve sa place, le temps d’une vente. Et transforme ainsi des logements en lieux intimistes où se rencontrent artistes, artisans, antiquaires et événements inattendus.

Rendez-vous rue de la Croix-Blanche, à quelques pas de la basilique Saint-Seurin, superbe édifice du XIe siècle qui a donné son nom à tout un quartier, à deux pas du centre-ville bordelais. C’est devant un hôtel particulier récemment vendu et en attente de travaux que l’on retrouve la fondatrice de Casapiane, Cécile d’Amade Briand.


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Métamorphoses éphémères

Celle qui a été élevée à Brive raconte son itinéraire : « Ma mère est artiste peintre, mon père, géographe, spécialisé dans le patrimoine. J’ai grandi dans un univers où l’architecture et les arts occupaient une place importante. » Pourtant, elle prend d’abord une autre voie : « J’ai fait des études de droit à Bordeaux avant de m’orienter vers le patrimoine culturel et la réglementation des monuments historiques. »

Pendant dix ans, elle travaille comme juriste du patrimoine, à Paris puis à Orléans. Il y a quatre ans, elle revient en famille à Bordeaux avec une intuition : « Connaissant la ville et son potentiel culturel, je me suis dit que c’était ici qu’il fallait tenter ce projet. Au départ, je voulais créer des mises en scène éphémères pour offrir une vitrine aux artistes et aux artisans. Le volet immobilier est venu plus tard. Il y avait des espaces vides qui ne demandaient qu’à être révélés. »

Une première opportunité marque le début de l’aventure : « J’ai contacté une agence immobilière pour savoir s’ils avaient des biens difficiles à vendre, parce qu’ils étaient vides ou atypiques. C’est aux Chartrons que j’ai développé mon premier projet, dans un appartement singulier avec un patio central qu’il fallait traverser pour accéder aux chambres. Un espace plein de charme. »

Cécile d’Amade Briand puise dans son réseau de partenaires – antiquaires, artistes, artisans – tout en explorant de nouvelles collaborations, comme avec la Maison Sersk. En mars 2022, elle met en scène le lieu en une dizaine de jours. D’autres éditions suivront : un appartement rue Fondaudège, une maison contemporaine au Bouscat, puis cet hôtel particulier. « Un endroit assez extraordinaire », s’enthousiasme celle qui conçoit aussi des projets plus classiques de décoration intérieure.

Suspendu dans le temps

Une surface de 535 m², une façade de 14 mètres de large, une majestueuse entrée traversante menant à un jardin arboré, deux vastes salons, une hauteur sous plafond de 4 mètres… Mais au-delà de ces dimensions, c’est son atmosphère qui frappe la décoratrice. « Il était resté vide pendant trente ou quarante ans, suspendu dans le temps, mais habité par une présence presque palpable. »

Elle revient aussi sur le contraste des styles : « Au rez-de-chaussée, un décor presque palatial, très fastueux. À l’étage, une salle de bains tapissée de moquette et de liège des années 1970, une baignoire arrondie, des carreaux signés Roger Capron… »

Cécile d’Amade Briand compose avec l’existant, sans peinture ni travaux, et le transcende. Le temps joue aussi : « Je ne peux pas me lancer dans de gros chantiers. En général, j’ai un mois maximum. Je visite et j’installe tout dans la foulée avec le soutien d’une cinquantaine de créateurs. »

Sur ce projet d’hôtel particulier, ils étaient une quinzaine, tous installés dans le Sud-Ouest. L’ancrage local a son importance, sans être une contrainte : « J’aime l’éclectisme, le mélange des époques et des styles, la couleur. Je travaille avec des artistes peintres, des artisans, des brocanteurs, des antiquaires, des designers… »

Ici, un chêne français (Goat Lab Furniture) façonné par un ébéniste sri-lankais, du mobilier de la galerie Modernista, spécialisée dans le design brésilien du XXe siècle, des peintures réalistes de Nick Stock, des vues aux couleurs pop inspirées du bassin d’Arcachon d’Hélène Vac, du linge de maison signé Nerima, des luminaires et paravents d’Angélique Delaire.

Ce projet a aussi fait évoluer la démarche de Cécile d’Amade Briand : « J’ai perçu le potentiel d’en faire un véritable lieu de vie. Cela m’a donné l’idée d’organiser des événements. » Ainsi, dans cet hôtel particulier, elle a invité le premier violon de l’Opéra de Bordeaux et une danseuse contemporaine pour réaliser une vidéo, et imaginé un dîner orchestré par Le Moment (Léa Lalo et Julie Castel)… Autant d’expériences qui prolongent l’histoire de l’édifice.


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