À quelques minutes de la petite gare de Roquebrune, le site de Cap moderne vient de rouvrir pour la saison estivale. Le programme de restauration de cet ensemble architectural exceptionnel a démarré en 2015 et se poursuivra sur cinq ans avec l’assainissement du terrain ainsi que le réaménagement des espaces verts. Des travaux qui permettront à Cap moderne de retrouver sa légendaire configuration d’origine.
Son histoire commence en 1926, lorsqu’Eileen Gray, designer confirmée, trouve son « refuge » au bord de la Méditerranée, soutenue par son compagnon Jean Badovici, architecte et directeur de la revue L’Architecture vivante. Elle conçoit ce projet d’inspiration marine en fonction de la lumière et du vent qu’elle ressent sur place. Depuis la plage du Cabbé, on peut l’apercevoir, lovée entre rochers et maquis. Icône de l’architecture moderne, elle est identifiée sous l’appellation E-1027 « Maison en bord de mer » : E pour Eileen, 10 du J de Jean, 2 du B de Badovici, 7 du G de Gray.
Posée sur des pilotis et répartie sur deux étages, la structure se compose d’une entrée, d’une cuisine avec des cloisons mobiles, d’une grande pièce à vivre avec cheminée, de deux chambres-studio et de salles de bains. Un escalier hélicoïdal réunit les étages et le toit-terrasse afin d’assurer une ventilation naturelle. Tous les espaces sont habilement utilisés et le blanc domine partout. La designer a réalisé la totalité du mobilier, fixe comme amovible et tout était étudié pour optimiser le confort. Aujourd’hui, il ne reste plus aucune pièce du mobilier d’origine, tout ayant été vendu aux enchères par le dernier propriétaire de la villa. C’est surtout grâce à la revue L‘Architecture vivante qu’il a été possible de reconstituer l’intérieur de la villa. En effet, Jean Badovici lui avait consacré un hors-série en 1929.
C’est sur le terrain mitoyen que Thomas Rebutato, arrivé à la retraite, décide construire une cabane de pêcheur, qui sera transformée par la suite en bar-restaurant. C’est ainsi que naît l’enseigne Etoile de mer. Le jour de l’ouverture, Le Corbusier, hôte de Jean Badovici dans la villa blanche, est son premier client. L’architecte est fasciné par le lieu. Les deux hommes se lient d’amitié. Durant l’été 1950, l’architecte peint le portrait de Thomas encadré d’une fresque murale à même la façade. En 1952, Le Corbusier acquiert une parcelle du terrain et installe son Cabanon de 3,66m x 3,66m de superficie, adossé à l’Etoile de mer.
En échange, il propose de construire cinq Unités de camping sur l’un des jeux de boules de la propriété de Rebutato. S’inspirant des principes appliqués au Cabanon, il crée des petits logements très spartiates mais fonctionnels, le tout installé sur pilotis. Les Unités de camping hébergeront des estivants jusqu’aux années 1980. Quant à Le Corbusier, il trouve la mort le 27 août 1965 au cours d’une baignade dans la Méditerranée en contrebas.
Après des années d’abandon, le Cap Moderne a finalement été reconnu en tant qu’icône de l’architecture moderne. Car si le Cabanon, les Unités de Camping et l’Étoile de Mer se visitaient depuis des années, la villa d’Eileen Gray n’était ouverte que de façon exceptionnelle. Depuis l’année dernière, la rénovation s‘amplifie. Installé dans le hangar désaffecté de la gare de Roquebrune, un espace d’exposition permet aux visiteurs de mieux appréhender le site. Un nouveau concept a pris forme, la Gare culturelle. Encore fragile, le site Cap Moderne se visite par petits groupes, sur réservation uniquement. Le dimanche, des brunchs sont proposés dans le jardin de la villa E-1027 suivis d’une visite guidée, ainsi que des dîners sur la terrasse. Des rendez-vous exceptionnels pour vivre une plongée dans les Années folles de l’architecture.
Réservations : contact@capmoderne.com
ou par téléphone : 06 48 72 90 53
www.capmoderne.com