Les arts de la table ont toujours été un exercice particulier dans l’écosystème du design. Une nouvelle génération d’éditeurs, de designers et de céramistes s’en empare en revendiquant son côté hautement émotionnel. La table autrefois formelle et standardisée fait place à des mises en scène plus spontanées où dialoguent des pièces singulières, dotées d’une histoire et d’une âme. Portrait de dix-sept créateurs qui comptent.
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1 – Les objets de rituels signés Natalia Criado
Il y a un an, Natalia Criado faisait sensation à la Design Week de Milan en exposant ses pièces dans la cuisine de la Villa Borsani, bijou préservé du modernisme italien. Sur ses assiettes, couverts, théières et seaux à glace de métal se lisent de multiples références du design transalpin, de la géométrie d’un Ettore Sottsass à l’élégance d’un Gio Ponti. Pour avoir étudié à l’Institut européen du design de Milan, Natalia Criado connaît sa grammaire stylistique.



Mais pour ses collections, elle revendique des influences plus intimes et lointaines, celles de sa terre natale, la Colombie, où le savoir-faire de la ferronnerie y est encore enraciné. À ses débuts, elle dessinait là-bas des bijoux, avant de s’installer à Milan. Désireuse de passer à une plus grande échelle, elle prend des cours de sculpture et se rapproche d’artisans florentins qui produisent ses modèles pour la table.
Dans un mélange d’inspirations, elle réalise une synthèse entre des formes industrielles et des savoir-faire artisanaux, entre sa culture colombienne et son pays d’adoption, l’Italie. Sa vaisselle précieuse, nommée « Joyas en casa » (« bijoux dans la maison »), est ornée de pierres fines. « Mes objets contiennent de la mémoire, ils mixent l’ancien et le nouveau, raconte-t-elle. Ils accompagnent les repas, qui sont des rituels pleins de joie et de souvenirs. »
2 – Savourer le temps long avec Léa Baldassari
La sensibilité de Léa Baldassari se lit dans la finesse du grès modelé à la main. Dans son atelier parisien (XIe ), elle façonne instinctivement ses assiettes dentelées, ses bols où l’on décèle le pincement du bout des doigts, ses tasses à anses en forme d’oreille. Ce qui était au départ un passe-temps est devenu son métier par la grâce de quelques semaines de confinement.



Durant cette période, l’artisane a goûté la sérénité du temps long, acheté un four, partagé ses premiers pas sur les réseaux sociaux et rencontré sa communauté. « La lenteur fait partie du processus, assure-t-elle. Après le modelage, il y a le séchage, la cuisson, le ponçage, c’est comme un rituel. J’aime laisser les irrégularités, je suis hypersensible et mes émotions se lisent dans mon travail. »
Sa palette de couleurs est volontairement neutre, elle navigue entre le blanc laiteux et le noir charbon, en passant par le crème et le sable. Sa délicatesse a séduit des chefs qui revendiquent le même tempo dans leurs cuisines. « Eux font mijoter leurs mets et moi, je mets le même temps pour fabriquer leurs assiettes », s’amuse-t-elle. Sa vaisselle chargée d’émotions accompagne les mets délicats.
> Leabaldassari.com et Brutalceramics.com
3 – Glassette, la Queen of cool
Besoin d’un conseil en décoration ? Suivez Laura Jackson sur Instagram. Elle est la star de l’art de vivre en Grande Bretagne. Sur les réseaux, elle dispense avec une fantaisie contagieuse ses conseils à 376000 followers dans des Reels baptisés The Art of Hosting (« l’art de recevoir »). Sur la chaîne Channel 4, elle est jurée dans deux émissions assez insolites : The Great Big Tiny Design Challenge, une sorte de concours Top Chef où les candidats s’esquintent les yeux à décorer des maisons de poupée miniatures, et Britain’s Best Beach Huts, littéralement « les plus belles cabines de plage britanniques ».



Quand elle n’arpente pas les bords de mer ou les plateaux télé, Laura Jackson gère Glassette, un site de e-commerce considéré outre-Manche comme le Net-à-Porter de la maison, qu’elle a co-fondé avec Daniel Crow. Il y a trois ans, ils levaient 1,5 million d’euros afin de développer leur plateforme où ils distribuent la crème de la crème des marques indépendantes et artisanales, en plus de collections qu’ils éditent. La section arts de la table est à la fois originale, authentique et raffinée.
« Si nous avions tout l’or du monde, nous achèterions tout ce que vend Glassette », s’exclame le magazine Country & Town House. « Nous cherchons des produits uniques, très bien fabriqués, avec un design percutant », analyse Laura Jackson. Quand on demande à cette spécialiste de fermer les yeux et d’énumérer ses cinq essentiels pour un dîner idéal, la réponse fuse : « Des fleurs, une très belle nappe, une excellente playlist, un éclairage tamisé avec des bougies et, le plus important, être en bonne compagnie. »
4 – Ensemble, une affaire de famille
Des stocks de tissus dormants et des pièces recalées pour défaut, l’industrie en compte des kilos. Domiciliées en Belgique, Pascale et Camille Gibert voient dans le berceau séculaire de l’industrie textile un gisement inépuisable pour leur esprit créatif. Pascale est diplômée de l’ENSAD et ancienne directrice artistique de produits textiles. Sa fille Camille est architecte d’intérieur, diplômée de l’école Camondo. En janvier 2023, mère et fille s’allient pour créer Ensemble, une maison d’édition qui redonne ses lettres de noblesse aux tissus anciens.


Entre chine et surplus, un stock de mouchoirs devient nappe patchwork, un lot de napperons en dentelle est assemblé en centre de table, des métrages de tissus vichy reprennent vie en serviettes, sets, maniques. Idem pour les tissus basques et torchons à carreaux. Les pièces de tissus, sourcées en France et en Belgique, sont d’abord lavées et repassées. Pascale passe de longues heures à assortir les motifs, les couleurs, faisant de chaque article une pièce unique.
L’atelier de confection est situé en France, à Roubaix, dans un ancien monastère, à l’endroit même où les sœurs pratiquaient la couture. Au final, la collection prend tout son sens, à la fois écoresponsable et cousue de réminiscences du passé. « Combien de fois des clients m’ont dit: “Ma grand-mère avait ces serviettes, elles dorment dans le placard de mes parents”, raconte Camille. Ce sont des souvenirs sincères et, quand on passe à table, chacun se raconte son histoire. »
5 – Savourer les couleurs avec Géraldine Pinault
Géraldine Pinault fabrique ses céramiques dans son tout petit atelier parisien de 8 m2 (XIe ). C’est là qu’elle façonne les moules en plâtre, coule ses pièces, avant de les cuire à plus 1200 °C. Le procédé lui permet de produire des séries d’une centaine d’exemplaires. Si ses assiettes, bols et carafes sont moulés, et donc à peu près semblables, elle prend soin de laisser sur le modèle des traces de grattage qui leur confèrent tout leur charme.



L’émail achève de les singulariser, car il est appliqué à la main, avec des variations de couleurs subtiles, objets de longues heures de recherche. « C’est la partie que je préfère, confesse-t-elle. J’aime l’équilibre hasardeux des teintes qui se chahutent entre elles. À l’ouverture du four, c’est la révélation, un moment merveilleux. »
Après des études aux Arts décoratifs de Paris, Géraldine Pinault a été graphiste, puis a enseigné les arts plastiques dans un atelier pour enfants. Elle se consacre désormais à la céramique. Sa vaisselle est indissociable de la nourriture qu’on y servira, elle-même joue à choisir ses contenants en fonction des recettes: jaune œuf-mimosa, orange-citrouille, vert-haricot. La tonalité de ses tables varie avec les saisons. « Surtout, ne vous donnez aucune règle, conseille-t-elle. Laissez faire l’humour et l’aléatoire. »
6 – Déjeuner de soleil avec la Romaine Éditions
La Romaine est une maison d’édition née des souvenirs de vacances de Pauline Vincent dans la maison familiale de Vaison-la-Romaine (84). Dresser la table y était un art autant qu’une fête, orchestrée par une tante et une grand-mère décoratrices et une mère conservatrice. Diplômée de l’Institut français de la mode et de l’École du Louvre, cette trentenaire a fait ses armes à Paris en tant qu’acheteuse et curatrice pour À Rebours, la boutique arty de la fondation des Galeries Lafayette.



En 2021, elle crée La Romaine Éditions, avec pour projet d’apporter beauté et poésie au quotidien. Assiettes, verres, bijoux de table, porte-couteaux et chandeliers sont inspirés des savoir-faire et de la tradition du Sud. Les verres bullés sont soufflés à Biot (06) dans une manufacture centenaire, la vaisselle est produite au Portugal dans une fabrique artisanale. Périodiquement, Pauline rassemble les nouveautés en collections, qu’elle conçoit comme une commissaire d’exposition: après « La Mer », « La Noce », « Le Matin » ou « La Fleur », elle prépare un ensemble consacré aux animaux.
Selon le thème, des artistes sont invités au banquet, comme Pierre Boncompain, peintre et coloriste, qui se dit « passeur d’instants parfaits ». « Sur mes tables, je commence par placer une nappe blanche, puis je dispose chaque élément comme un peintre, détaille Pauline. D’abord les grandes assiettes, puis des accessoires colorés dépareillés qui créent des surprises et brisent le classicisme. »
7 – De la terre à la table avec Omé Studios
Omé Studios doit son nom à la contraction des mots home et du mantra OM, chanté lors des séances de yoga. L’atelier de céramique d’Emma Lisi-Gautier est né de son désir de ralentir le temps et de vivre en harmonie avec la nature. Après avoir étudié les métiers du luxe puis la direction artistique, plutôt que d’intégrer une entreprise internationale, la jeune femme s’est orientée vers l’artisanat d’excellence, la partie la plus artistique des métiers de l’art de vivre et une école de la patience.



Après s’être formée à la poterie, elle installe son atelier dans le village préservé de Grambois, perché sur les coteaux du parc naturel du Luberon. Avec son tour, elle façonne ses tasses Terrae en prenant soin d’y inscrire des variations afin que l’ensemble ne soit pas trop homogène. Ses assiettes sont modelées à la plaque, ses bols gardent la trace sensible du pincement de ses doigts. Les argiles employées conservent leur couleur authentique, du brun sombre au beige sable, jusqu’au rouge de la terre de Bourgogne.
Certains plats sont laissés bruts à l’extérieur pour mieux sentir la rugosité de l’argile chamotté. D’autres pièces sont émaillées d’un blanc nacré comme des coquillages, avec des courbes évoquant les flots. « Mon travail est intuitif, analyse Emma, il s’inspire de la nature, je cherche l’intemporel. Ma table parfaite, ce sont d’abord des fleurs et un assortiment de multiples contenants de tous les tons, sur une nappe en lin naturel. Après tout, la nature, c’est ce que l’on mange aussi. »
8 – Repas cousu main par Oeuvres Sensibles
Si elle a étudié les arts visuels à l’Ensaama Olivier de Serres, Sarah Espeute renoue par hasard avec un loisir d’enfance, la broderie. Dans son appartement marseillais, elle brode ses rideaux, ses coussins de dessins végétaux en trompe-l’œil. Par la magie des réseaux, ces balbutiements interpellent par leur poésie.


Sa marque Œuvres Sensibles naît en 2021. Sarah Espeute brode les objets du quotidien de points piqués à la main en ligne claire et minimaliste. Ses dessins sont des instants de vie, des souvenirs. Le procédé fonctionne particulièrement bien sur une nappe, où elle trace des fantômes d’assiettes, de verres, de couverts, parfois une bouteille, un chou, des mains. Ses scènes de repas animées font penser aux tableaux pièges de Daniel Spoerri (1930-2024), à qui elle rend hommage.
Par philosophie éco-responsable, ses nappes, serviettes, sets et chemins de table sont faits de draps en métis chinés, qui ajoutent leur vécu à l’histoire qu’elle raconte. Depuis, elle a formé quelques brodeurs à la technique du point arrière et d’autres pièces sont cousues sur une machine Cornely du XIXe siècle. En plus des collections régulières, elle propose un service sur mesure.
9 – L’humilité de Marion Gaux
Elle se définit comme potière plutôt que céramiste. « La céramique me semble trop conceptuelle, analyse Marion Graux. Le potier, c’est la campagne, le “manger”, je fais de la vaisselle. » Son style se veut brut, fonctionnel et minimaliste. Elle a appris la rigueur du tour auprès de maîtres, chez Augusto Tozzola, puis Dauphine Scalbert dans son atelier bourguignon.


Elle a aussi mis au point une ligne plus accessible avec la Manufacture de Digoin, fondée en 1875. Son œil de styliste, qu’elle a été autrefois, lui a donné le sens de l’élégance et des teintes subtiles, comme ces roses signature inspirés de la peau. « Mes couleurs doivent exister dans la nature, c’est mon filtre, dit-elle. Mon travail est assez sourd, je ne fais pas de motifs. »
Si les chefs lui commandent leur vaisselle sur mesure, en circuit court, elle vend aussi aux particuliers, via son e-shop, ou en direct à l’atelier, qu’elle vient d’installer à Port-Louis, dans le Morbihan. « C’est un endroit de rêve, aménagé à mi-chemin entre le style amish et japonais. » Elle y travaille inlassablement le bon bord, la robustesse, la fonction juste du contenant. « On va de plus en plus vers des formes creuses, a-t-elle remarqué, ainsi que des formats réduits, pour les petites portions. »
10 – L’art en partage selon Fefo Studio
Designer pluridisciplinaire d’origine argentine, également chef, Fernando Aciar, dit « Fefo », a ouvert plusieurs cafés à New York avant de se consacrer au design artisanal. Chef de bande, il a créé le OStudio, à Brooklyn, à la fois atelier, showroom, restaurant et bureau partagé. C’est aussi un lieu de réception, car l’artiste adore les mises en scène festives.


Sa marque, Fefo Studio, produit des meubles, des luminaires et des arts de la table. « Tout part de la nourriture, lance-t-il. J’adore les ambiances de partage. Si l’on vient déjeuner ici, tout est ouvert, on voit les ateliers, les sculpteurs, mon agence. » Fernando Aciar produit aussi à Brooklyn des pièces uniques qui racontent une histoire, souvent en lien avec un moment partagé autour d’une table. Il a ainsi organisé un happening avec l’architecte Kamilla Csegzi, qui crée des meubles en mycélium.
Sur l’une de ses tables, il est venu souffler plusieurs contenants en verre à même la matière, marquant la surface de l’objet, et les mémoires aussi. Et Fernando Aciar, de constater : « Il y a plus de designers que d’artisans ici, à New York. » Alors avec sa femme Anna, d’origine française, qui a contribué à l’implantation du Fooding à New York, ils déménagent bientôt en Normandie. Affaire à suivre…
11 – En verre et contre tout avec La Soufflerie
Sébastien et Valentina Nobile sont de véritables passionnés, à la fois artistes, artisans et philanthropes. Sébastien est franco-suisse, mouleur statuaire. Valentina est italo-américaine, peintre, photographe. Tous deux vivent à Paris quand ils découvrent que les ateliers de soufflage de verre de la capitale sont en voie de disparition. C’est le déclic, ils décident d’apprendre ce savoir-faire. Leur pratique est radicale : aucune machine, juste un four, des outils et du verre fondu.


Leurs premières pièces sont des vases, livrés à vélo aux fleuristes. Sébastien n’a aucun mal à créer les moules, c’est son métier. Le verre recyclé provient de bouteilles de vin ou de bière, de flacons de parfum, de vitres de voitures… Il est refondu à 1000 °C, parfois coloré à l’aide d’oxydes naturels. Au fil des ans, ils créent des collections pour la table : carafes, verres, bougeoirs, souvent inspirés de formes antiques, comme le gobelet Pocula.
Tout est fait main, à Paris. « Une table réussie, c’est avant tout des amis, un bon repas et des verres uniques», clament-ils. Une ligne artisanale d’objets en terre cuite complète la verrerie. Ils ont leur propre boutique rue de l’Odéon (VIe ), en circuit court. Pour perpétuer l’art du soufflage de verre sans machine, ils aident d’autres verriers à s’installer dans le monde entier, comme l’année dernière, en Turquie.
12 – Alimenter ses rêves avec Laetitia Rouget
« Ce que j’aime, c’est apporter de la joie. » Laetitia Rouget rêve d’un monde meilleur et, comme dans la légende du colibri racontée par l’écologiste Pierre Rabhi, elle fait sa part. Avec son amie Colombine Jubert, elle a créé Pangea durant le confinement, un projet hybride, entre art et design, basé sur une utopie, celle d’un monde meilleur où la communauté des humains serait gouvernée par des ministères de la Joie, du Rêve, de la Sagesse, de la Conscience…


Les deux jeunes femmes matérialisent leur idéal par des performances artistiques, mais aussi en brodant des œuvres textiles uniques. Artisan, artiste, peintre, créatrice, Laetitia Rouget est diplômée de la Saint Martins School, à Londres. En parallèle de Pangea, elle possède depuis quatre ans sa marque d’objets et d’arts de la table en céramique et en verre.
On y lit son trait fantaisiste et poétique. Afin de se trouver au plus près des ateliers de production, elle s’est installée à Lisbonne, au Portugal. « Ce déménagement a débridé chez moi l’usage de la couleur », déclare-t-elle. Sur ses tables joyeuses, elle dispose des fruits, des légumes, des fleurs, la beauté simple de la nature.
13 – Nourrir le monde avec Table
Des sets de table en fibre naturelle tissés au Ghana par une coopérative de femmes. Une ligne de linge de table en coton bio imprimé au blockprint à Jaipur, en Inde. Une collection de céramiques à leurs couleurs en faïence tournée à la main à Aubagne, dans les ateliers de Ravel: avec Alice Moireau et Caroline Perdrix, le voyage ne commence pas dans l’assiette mais déjà sur la table. Table, c’est le nom de la maison d’édition créée par ces deux passionnées de dîners festifs, qu’ils soient en famille ou entre amis.


La maman d’Alice dessinait et peignait de la vaisselle pour Gien, Designer’s Guild et Paola Navone. Ancienne rédactrice du Fooding, elle passe du contenu au contenant en s’associant à Caroline, designer textile et conseillère en développement durable auprès de grandes marques de luxe. Basée à Marseille, Caroline source les textiles responsables et les ateliers à même de réaliser leurs collections dans un souci de commerce équitable.
À Marseille, Table possède aussi un atelier de confection de pièces uniques, réalisées à partir de tissus chinés: serviettes, nappes, tabliers et sets assemblés en patchwork. Leurs propositions s’enrichissent au fil des rencontres, comme dernièrement avec la céramiste Anne-Sophie Matrella pour une collection d’assiettes et de tasses fleuries fabriquées à la main. Outre les couleurs et la joie du partage, Table, c’est aussi des gammes qui ont une âme et des histoires sans fin à raconter.
14 – Vaisselle Vintage, full sentimental
À l’origine de Vaisselle Vintage, il y a une future mariée qui décide de dresser sa table de noces avec de la vaisselle chinée. L’idée fait des petits, se professionnalise et, onze années plus tard, la collection de l’entreprise compte plus de 20000 assiettes, et plus encore de couverts et de verres à louer. Le succès est tel que Vaisselle Vintage est désormais une filiale d’Options, le leader de la location de matériel de réception.


« Le gros de notre travail reste le sourcing,explique Justine Bossavy, la directrice générale. Nous avons mis au point un “catalogue de chine” stipulant la taille, le coloris et le prix d’achat. Même sur une vaisselle de 100 ans d’âge, l’état doit être impeccable. »
Dans les stocks de la maison Options, outre les 2000 assiettes en terre de fer, on en trouve aussi des italiennes, les charmantes Toscana de la marque Popolo ainsi que des centaines d’assiettes à fleurs désuètes et toutes différentes. La collection compte aussi des coupes à glace chromées comme au café, des chandeliers de toutes époques, des chaises cannées en bois, des soliflores colorés. Le vintage, ce sont aussi les tables branchées des années 1980, tendance Andrée Putman, très prisées dans les dîners de la Fashion Week.
15 – Sophie Lou Jacobsen, made in Manhattan
Franco-américaine, Sophie Lou Jacobsen a installé son atelier à New York en 2019. Si elle a grandi aux États-Unis, elle a préparé les écoles d’art aux Ateliers de Sèvres, avant d’être diplômée en design industriel à la Saint Martins School, à Londres. Préférant sa liberté à l’industrie, elle jette son dévolu sur la verrerie, façonnant verres, carafes, vases, chandeliers et théières comme des compagnons du quotidien. Ne soufflant pas elle-même, trouver à New York les artisans qui l’accompagnent a été un véritable défi.


Elle rencontre une communauté de passionnés, formés en Italie, avec qui elle peut laisser libre cours à sa créativité. Ces objets de haute facture sont la base d’inspiration pour des lignes plus accessibles, fabriquées artisanalement en Chine. « Je veux créer des objets intemporels, confie-t-elle. C’est pourquoi j’étudie les modèles historiques, je regarde comment les styles ont été recyclés au fil des siècles puis je les resitue dans l’époque contemporaine. Quand je fais un verre à pied, je me renseigne sur la cristallerie Daum, l’Art nouveau, les arts du verre autrichien. »
Son verre signature, décliné sur pied, en corolle, en tulipe, en flûte ou en gobelet, est en verre cannelé. Elle a aussi twisté le verre à cocktail américain ou le ballon de rouge français avec des effets de couleur. La justesse de son regard lui a valu d’intégrer la liste « USA 400 » du magazine Wallpaper des personnalités les plus créatives des États-Unis, aux côtés de Beyoncé ou Jeff Koons.
16 – À voir et à manger avec L’Oeil de KO
Karl Fournier et Olivier Marty du Studio KO travaillent à toutes les échelles : architecture, architecture intérieure, design de mobilier. Avec l’œil de KO, ils ajoutent une marche à leur univers en s’intéressant à l’objet : « Nous rencontrions au quotidien nombre de créateurs, alors nous avons monté un département mécénat, raconte Karl Fournier. Nos choix sont dans la continuité de notre architecture, un côté brut, des matières primaires, la pierre, le cuir, le métal et, surtout, la trace de la main. »


Avec leur complice Nathalie Guihaume, ils font réaliser de petites séries d’objets où la table tient une place centrale. « Nous avons intitulé cette section “La Cène”. Non pas par fascination pour la religion, mais j’ai toujours été frappé par l’intensité des représentations du dernier repas du Christ. Ce que je regardais, c’était surtout la nappe ! », lance-t-il en riant.
L’œil de KO sélectionne des créations d’auteurs sensibles, à forte personnalité. « C’est de l’artisanat d’art. Il y a de l’humain derrière », renchérit Nathalie Guihaume. « Quelque chose est passé de leur tête jusqu’à leurs mains, poursuit Karl. Ce sont des objets qui ouvrent les conversations à table. »
Pour leur premier service, ils sont allés voir Joseph Culot, le fils du célèbre céramiste Pierre Culot. Édité en six exemplaires, en émail noir, il compte 82 pièces. On peut s’offrir aussi de petites œuvres d’art tels les porte-couteaux « crabe » en bronze de la joaillière Chloé Valorso, ou des panières à pain Vent des récoltes en coton laqué (urushi) de Lucie Damond. Singulier.
17 – Helle Mardahl Stusio, dragée haute
Le e-shop d’Helle Mardahl ressemble à un magasin de bonbons. Son objet signature est d’ailleurs une bonbonnière ronde et colorée. Toute sa vaisselle, ses verres, ses vases et ses plats à gâteau sont des fantaisies en verre soufflé acidulé coloré comme des Dragibus. Abricot, bubble-gum, lavande, pamplemousse, banane et caramel, sa palette de couleurs éveille l’appétit. Helle Mardahl a établi son studio de design à Copenhague. Après des études à la Saint Martins School, à Londres, elle a travaillé dans la mode avant de se prendre de passion pour la verrerie.



« Le verre est vivant, imprévisible, toujours plein de surprises, je ne m’en lasse jamais ! » La designeuse est fascinée par les différentes étapes de production de chacune de ses pièces, dans des ateliers au Danemark ou ailleurs en Europe, en fonction de la technique requise : l’art de la couleur, le feu, le souffle, la précision du geste, le long processus de refroidissement, la fragilité, la beauté de l’imperfection. « Quand vous choisissez une pièce pour chez vous, elle est véritablement unique », souligne-t-elle.
Dans ses verres soufflés, elle s’attache à insuffler de l’humour, de la fantaisie, du jeu « et un peu de magie ». Composer une table est pour elle un exercice créatif et une façon de choyer ses invités. Elle mélange les souvenirs de famille, ses dernières trouvailles en même temps que ses propres créations. « Mais ce qui rend ce moment si particulier, ça reste les personnes autour de la table ! »
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