« Autrefois, la gastronomie et l’hôtellerie de luxe étaient des univers très formels, synonymes d’obséquiosité, mais la nouvelle génération de clients attend surtout du confort », résume André Fu, 41 ans, qui décline pour eux une expérience sur mesure dans des hôtels, restaurants, galeries d’art et boutiques au style ultraléché. « Nous avons l’expérience des chambres d’hôtel chics mais tellement inconfortables ! André a su imaginer le contraire, il se concentre sur les détails essentiels et les rend extraordinaires », surenchérit Regina Chan, directrice du salon Maison & Objet Asia, qui a consacré le designer et architecte d’intérieur hong-kongais créateur de l’année en mars. En préambule de l’ouvrage que lui a consacré l’éditeur Assouline, le galeriste Emmanuel Perrotin l’évoque ainsi : « La méticulosité des détails m’a presque échappé lorsque j’ai passé ma première nuit, sans le savoir, dans une chambre d’hôtel dessinée par André. Mais rarement j’avais ressenti autant de douceur émanant d’un lieu. J’ai su alors que ce serait lui qui dessinerait ma galerie hong-kongaise, car il saurait rendre un cachet “résidentiel” à un lieu a priori froid. » Et Stephen Alden, président du Set Hotel Group, de compléter : « Un bon design d’hôtel se résume à ce que l’hôte ait envie d’être là et nulle part ailleurs, et c’est exactement ce que propose André Fu. »
L’intéressé s’en explique : « J’ai développé une idée du luxe qui se concentre sur le bien-être. Je m’intéresse au degré de satisfaction que l’on ressent quand on s’affale dans un fauteuil. Je pense au plaisir tactile d’un meuble, à la sérénité qui émane du lieu. » Une esthétique au service d’une histoire dans laquelle il nous embarque. André Fu décline chacune d’elles dans son agence, AFSO, qu’il a ouverte à Hong Kong en 2000, aussitôt après avoir obtenu son diplôme d’architecture à Cambridge. Dès lors, il a développé en Asie une activité plutôt confidentielle, jusqu’à ce que son premier projet d’envergure, l’hôtel The Upper House, voie le jour à Hong Kong. Sa marque de fabrique ? Des matériaux naturels et nobles, des couleurs profondes dans un environnement quasi baroque, telle la réception du Shangri-La d’Istanbul. Dans ses réalisations plus épurées, on remarquera des espaces fluides qui sont le cadre d’un style asiatique contemporain et sophistiqué.
Ce style « East Meets West », il l’occulte sur certains chantiers pour mieux le revendiquer ailleurs, lui qui entend bien développer des projets dans le monde entier. Il fait ainsi ses premiers pas en France avec Villa La Coste, développée par le château éponyme, près d’Aix-en-Provence, où s’est ouvert un parc de sculptures et de microarchitectures. « Le propriétaire a voulu fusionner l’art, l’architecture et l’œnologie en une expérience lifestyle. Vingt-cinq villas autour d’un lieu de vie dans un bâtiment en longueur face aux montagnes du Luberon, indique l’architecte. C’est ma vision d’une Provence infusée de modernité. On a utilisé du bois vieilli, des pierres rustiques, des meubles en noyer fabriqués sur mesure et des rideaux en lin. Une ambiance intimiste, soulignée par un éclairage délicat et des œuvres de Tracey Emin. Ici, tout est suggéré. » Un projet global, comme tous ses chantiers, dont il dessine 95 % du mobilier. C’est ainsi que lui est venue l’idée de développer sa marque, AFL (André Fu Living). Il a aussi dessiné « Skyliner », une collection de robinetterie pour Cooper & Graham, et propose cet automne un ensemble de luminaires pour Lasvit. Heureuse opportunité pour chacun de décliner chez soi cette atmosphère feutrée, refuge face au tumulte extérieur.