Changement de cap pour Alinéa. L’ancienne filiale du groupe Auchan s’est engagée dans une importante série de mutations depuis son rachat en 2017 par la société Holdinéa : nouvelle direction, nouvelles collaborations, nouveau modèle de vente et surtout une identité recentrée autour de ses racines méditerranéennes. En 2019, la marque fondée par Alain Mitaux en 1989, avec un premier magasin à Avignon, célèbre un anniversaire important. Car en plus de souffler ses trente bougies, elle dévoile les premiers fruits d’un plan établi collectivement depuis deux ans par ses 2 200 employés.
Comme l’explique Alexis Mulliez, son nouveau président : « Depuis sa naissance, l’entreprise s’était développée selon le modèle de la grande distribution, jusqu’à se hisser au rang des plus grandes marques déco. Mais elle avait perdu en singularité. Notre positionnement manquait de lisibilité, il fallait revitaliser l’enseigne. Alors nous avons consulté tous nos collaborateurs pour aboutir à notre nouvelle stratégie. » Suite à cette vaste concertation, la direction redéfinit des orientations : « Remettre le produit – et non plus le prix – au coeur de nos actions, devenir une marque lifestyle et développer la vente en ligne. » Trois idées essentielles qui vont guider Alinéa dans sa mutation. En deux ans, la marque va d’abord renouveler intégralement son offre, quitte à renoncer à certains services, comme les cuisines sur mesure, pour se concentrer sur l’essentiel : la déco.
Renforçant son bureau de design et de style pour proposer des collections 100 % exclusives, elle entame aussi une série de collaborations ponctuelles. Cet été, le designer Guillaume Delvigne était le tout premier à travailler avec l’enseigne en proposant « Aldo », une gamme outdoor éphémère. Et pour sa collection d’automne, c’est Sophie Ferjani (fidèle cliente d’Alinéa) qui signe une collection capsule inspirée par Marseille. « Ce renouvellement du processus créatif s’accompagne d’un concept commercial original, ajoute le président. Nous voulons sortir du parcours généralement imposé dans les grands magasins en triant nos produits non plus par rayon mais par univers, et en répartissant les caisses ici et là, ce qui donne le choix de faire ses courses en dix minutes ou en deux heures. »
Déjà mis en place à Bordeaux, ce système de vente devrait progressivement s’étendre aux autres sites, comme à celui d’Avignon, l’adresse historique dont la rénovation est prévue d’ici à l’été 2020. Mais en plus d’entreprendre la refonte de ses grands magasins, la marque entame aussi une démarche de proximité en investissant les centres-villes. Le 4 octobre, elle inaugurait un pop-up store dans le quartier Docks Village de Marseille. Et en septembre 2020, une boutique permanente ouvrira en plein coeur de Lille, dans un bâtiment classé. Enfin, pour accompagner le développement de la vente en ligne, Alinéa vient d’acquérir un nouvel entrepôt de 70 000 m2 à proximité de Paris.
Renouer avec ses racines
« Toutes ces transformations amorcées il y a deux ans sont visibles depuis cet été, explique Alexis Mulliez. Mais notre anniversaire est aussi l’occasion de revenir à nos valeurs méditerranéennes. » Avec un siège installé à Aubagne (13) depuis 1997, près de son magasin laboratoire, Alinéa revendique, en reprenant pleinement les commandes de la création, une identité provençale trop longtemps malmenée par les diktats de la grande distribution. « À ses débuts, la marque créait beaucoup en interne. Mais le rouleau compresseur qui impose de proposer toujours plus de produits pour faire du chiffre l’avait contrainte à devenir principalement importatrice », raconte le président.
Après les collections estivales « Trastevere » et « Gueliz » (inspirées par Rome et Marrakech), la récente collaboration avec Sophie Ferjani met elle aussi le Sud à l’honneur. Et si sa production est aujourd’hui à 50 % européenne, l’enseigne promet d’améliorer progressivement ce taux dans les trois prochaines années, en montant des partenariats avec des entreprises de sa région, comme le confiseur Le Roy René, le créateur de senteurs Plantes et Parfums ou la coutellerie Jean Dubost.
Véritable moteur d’une cohérence retrouvée, ce retour aux sources est aussi la meilleure façon de se distinguer de la concurrence, souvent noyée sous une identité universaliste. « Nous sommes une entreprise du Sud et il était temps de le mettre en avant », conclut Alexis Mulliez. Réaffirmer son identité pour mieux se réinventer ? Un challenge que cet âge de raison lui permettra certainement de relever.