A voir : 3 expositions d’artistes américaines en France

Trois Américaines en France, libres de toute appartenance aux courants artistiques dominants, ont vécu les grands bouleversements du XXe siècle. Chacune à sa manière, pinceau à la main, en témoigne.

Du Centre Pompidou à Paris, aux Abattoirs de Toulouse, les artistes américaines sont à l’honneur cette saison. Découverte de l’œuvre de 3 femmes puissantes.

Paysages et sentiments avec Joan Mitchell

La Grande Vallée (1983), de Joan Mitchell, huile sur toile.
La Grande Vallée (1983), de Joan Mitchell, huile sur toile. LLC New York

C’est un immense champ jaune traversé de coups de pinceau gris-bleu qui ouvre cette rétrospective. Et dans l’œuvre de Joan Mitchell, artiste singulière qui s’affranchit de l’expressionnisme abstrait américain comme de la peinture lyrique européenne, Minnesota (1980) immerge d’office le visiteur. Née à Chicago en 1925, elle s’exile en France, dans un village du Vexin où vécut Claude Monet. Contrairement à l’impressionniste, qui déplace son chevalet pour mieux saisir les paysages et les lumières changeantes, c’est dans son atelier, la nuit, que Joan Mitchell reproduit ses Feelings, inspirés par les étendues vallonnées. Ces grands formats, dans lesquels elle « cherche à arrêter le temps », évoquent à la fois le travail de Van Gogh et celui de Cézanne. Peintures, photos et vidéos composent la plus importante exposition consacrée à l’artiste en Europe depuis trente ans. 

> « Rétrospective Joan Mitchell ». À la Fondation Louis Vuitton, à Paris (XVIe), jusqu’au 27 février. Fondationlouisvuitton.fr

Un monde en couleurs avec Niki de Saint Phalle

La jardin des Tarots de Niki de Saint Phalle.
La jardin des Tarots de Niki de Saint Phalle. DR

Que découvrir de l’œuvre de Niki de Saint Phalle (1930-2002) qui n’ait pas été révélé en 2015 à l’occasion de la magistrale rétrospective présentée au Grand Palais ? Annabelle Ténèze et Lucia Pesapane délaissent les « Tirs » et les « Nanas », qui l’ont rendue célèbre, et, se limitant aux années 80 et 90, démontrent que la plasticienne fut une artiste libre – en dépit de ses liens avec les néoréalistes –, féministe et engagée dans la démocratisation de l’art. En témoignent les meubles, broches, foulards ou pin’s qu’elle commercialisa pour financer les travaux du chantier monumental du Jardin des Tarots, en Toscane, ouvert au public. C’est ce parcours de créatrice-cheffe d’entreprise, balisé de plus de 200 œuvres aux courbes et couleurs si caractéristiques, que retrace cette exposition. 

> « Niki de Saint Phalle. Les années 1980 et 1990. L’art en liberté ». Aux Abattoirs, à Toulouse, jusqu’au 5 mars 2023. Lesabattoirs.org 

Alice Neel, collectionneuse d’âmes

Marxist Girl, Irene Peslikis (1972), d’Alice Neel, huile sur toile, 150 x 105,5 cm. Daryl and Steven Roth.
Marxist Girl, Irene Peslikis (1972), d’Alice Neel, huile sur toile, 150 x 105,5 cm. Daryl and Steven Roth. David Zwirner and Victoria Miro

Son œuvre immense a été comparée à La Comédie humaine, de Balzac, tant il est vrai qu’Alice Neel (1900-19N84) a peint nombre de « sans dent », des marginaux bannis de la société en raison de leurs origines, de leur couleur, de leur orientation sexuelle ou de leur engagement politique. Pourtant, elle ne se considérait pas comme portraitiste, mais plutôt comme une « collectionneuse d’âmes ». Communiste surveillée par le FBI, elle n’a eu de cesse de témoigner de son époque, immortalisant ceux qu’elle aimait, « les perdants, les outsiders ». Mais aussi « les autres, et même quelques gens bien », des artistes (de la Factory, d’Andy Warhol) ou des critiques d’art (Linda Nochlin)… Six ans après la rétrospective organisée par la Fondation Van Gogh (Arles), le Centre Pompidou rend un hommage magistral en 70 peintures et dessins à cette icône féministe. 

> « Alice Neel. Un regard engagé ». Au Centre Pompidou, à Paris (IVe), jusqu’au 16 janvier. Centrepompidou.fr