Textile : Les femmes du Bauhaus célébrées chez Studio Ford

Pour sa nouvelle collection, la marque de textile californienne entrelace les techniques artisanales indiennes à l’histoire de l’art, à l’œuvre des artistes féminines de l’école allemande.

C’est un séjour en Inde, à la rencontre des diverses communautés textiles, qui marque la carrière de Josie Ford. L’impression aux blocs et surtout l’approche sensible des artisans indiens fascinent la créatrice textile qui fonde en 2017 son atelier éponyme. Studio Ford est un hommage à cet art ancestral et intemporel. Auprès d’imprimeurs de la région de Jaipur, elle développe leurs savoirs par le biais des différentes thématiques explorées. Avec Interwoven, son dernier ensemble de linge de maison, elle rend hommage aux femmes du Bauhaus, s’inspirant de leurs esthétiques et des propos manifestes du mouvement.

Une communauté créative au cœur du Studio Ford

A gauche, édredon « Gunta», à droite, édredon Benita.
A gauche, édredon « Gunta», à droite, édredon Benita. Austin Leis

Dès la création du label, la fondatrice met en lumière le savoir-faire de l’impression aux blocs et les artisans qui sauvegardent cette culture indienne. En explorant les différentes régions spécialisées, elle entend, non pas se former et exporter les techniques dans son atelier, mais s’entourer de graveurs et d’imprimeurs pour créer une communauté. Une collaboration étroite avec les différents corps de métiers qui maîtrisent à la perfection chaque étape de la production textile.

Car l’impression à la planche indienne est une technique de patience qui, influencée par le geste manuel, révèle des pièces uniques, parfois imparfaites mais toujours chargées d’histoires. Du thème décliné en motif dans l’atelier de Los Angeles, à la gravure puis à l’impression en bloc à Jaipur, le Studio Ford renouvelle ainsi la notion de confrérie à chaque série limitée de créations.

Pour sa cinquième collection, c’est un mouvement, celui du Bauhaus, qui attire l’attention de Josie Ford. « Créer une nouvelle guilde d’artisans, sans les distinctions de classe qui élèvent une barrière arrogante entre l’artisan et l’artiste ». Ce discours fondateur, énoncé un siècle auparavant par Walter Gropius, résonne dans l’esprit de la créatrice qui relève un nouveau défi de conception. L’occasion de repousser les limites de ce procédé et de l’ancrer dans l’histoire de l’art.

Interwoven, un hommage aux artistes engagées du Bauhaus

A gauche, serviette Gunta, à droite, torchon Otti.
A gauche, serviette Gunta, à droite, torchon Otti. Austin Leis

Au cours de ses études en gravure et en histoire de l’art, la fondatrice du studio découvre avec émotion la contribution fondamentale des créatives du Bauhaus. Longtemps oubliées, leurs rôles au sein de l’école ont pourtant permis de valoriser le métier d’artisan, en tant que femme mais aussi en tant que personne engagée dans le monde de l’esthétique.

Interwoven, c’est la volonté d’entrelacer les statuts d’artisan et d’artiste. De réunir et fondre leurs connaissances pour produire une œuvre commune. Auprès de son équipe d’imprimeurs et de graveurs, la créatrice textile rend ainsi hommage à ces femmes, créant pour chacune de nouveaux motifs qu’elle décline dans une ligne de linge de maison. C’est un tournant pour le studio qui s’éloigne des silhouettes organiques pour un dessin plus radical. Où les formes géométriques et abstraites s’imbriquent comme une architecture et s’accordent dans un nuancier de couleurs primaires, cher au Bauhaus. On y devine l’influence précolombienne d’Anni Albers, l’agencement complexe de Gunta Stölz, les associations méthodologiques d’Otti Berger ou encore les compositions musicales de Benita Koch-Otte.

Après cette approche moderne de l’impression au bloc, le Studio Ford poursuit l’exploration du textile et envisage les prochaines créations : une première collection permanente qui révèle la riche culture indienne de manière intemporelle.