Amoureux des belles images ? La rédaction a sélectionné trois expos photos à Paris qui subliment par leur regard intime petite et grande histoire.
Une portraitiste engagée
Militante attachée aux valeurs sociales, l’Américaine Judith Joy Ross a commencé sa carrière dans les années 60. Sensible aux univers de Dorothea Lange, August Sander, Lewis Hine et Diane Arbus, elle réalise de soigneux tirages mettant en avant les principes humanistes qui lui sont chers. Après plusieurs voyages en Europe, elle se spécialise dans le portrait. Depuis les années 80, elle rend un hommage vibrant à tous les activistes manifestant contre la guerre et le racisme, mais aussi aux adolescents en échec scolaire accompagnés de leurs professeurs. Ses grands formats, où la jeunesse est largement représentée, témoignent de son profond attachement au monde qui l’entoure. La scénographie du Bal, avec une sélection d’œuvres très resserrée, illustre admirablement l’immense maîtrise de Judith Joy Ross. L’une des plus belles expos photos à Paris de l’année.
> « Judith Joy Ross – photographies 1978-2015 ». Au Bal, 5, impasse de la Défense, 75018 Paris, jusqu’au 18 septembre. Le-bal.fr
Journal intime
L’album de voyage de 1926 du grand-père de Mathieu Pernot est le point de départ du projet La ruine de sa demeure. Un album qui vient cartographier l’itinéraire entre le Liban, la Syrie et l’Irak qu’a suivi le Français, lauréat du prix HCB 2019, malgré les contraintes du confinement. De Beyrouth à Mossoul, entre les ruines des civilisations millénaires du Moyen-Orient et les ravages des conflits récents, il confronte les scènes de désolation actuelles à des archives familiales, du temps où ses grands-parents et son père vivaient au Liban. Un appartement retrouvé qui menace de s’écrouler lorsqu’il retourne à Beyrouth en 2020, par exemple. À la frontière du documentaire, Mathieu Pernot remet en question le rapport au temps, entre les récits de la grande histoire et ceux de son histoire intime.
> « Mathieu Pernot – La ruine de sa demeure ». À la Fondation Henri Cartier-Bresson. 79, rue des Archives, 75003 Paris, jusqu’au 19 juin. Henricartierbresson.org
Réalisme magique
Après des études de cinéma, Graciela Iturbide rencontre Manuel Álvarez Bravo, grande figure de la photographie mexicaine, qui l’encourage à passer à la photographie pendant le deuil de sa fille. Si l’influence de Cartier-Bresson a imprégné sa pratique, elle s’en affranchit par des voyages au cours desquels elle fixe les habitants qu’elle côtoie. Être une jeune femme dans le Mexique des années 70 n’a pas été un frein. La série des femmes du Juchitàn de Zaragoza, fruit d’un travail de dix ans, révèle combien cela lui a permis d’être accueillie chaleureusement. Sensibilisée par l’imaginaire catholique et les rituels populaires de son pays, elle devient une référence dans les années 70 et 80. Les grands formats, conçus spécialement pour la Fondation, magnifient son goût pour l’abstraction et les matières.
La rédaction a également consacré une plus longue chronique à cette exposition à voir absolument.
> « Graciela Iturbide, Heliotropo 37 ». À la Fondation Cartier pour l’art contemporain, 261, boulevard Raspail, 75014 Paris, jusqu’au 29 mai. Fondationcartier.com