Rencontre : Benjamin Guedj, designer et concepteur d’intérieurs en 3D

À la fois designer d'objets et d'espaces, le Français Benjamin Guedj imagine des décors en 3D. Entretien.

Ses projections en trois dimensions font rêver tous ceux qui s’intéressent de près à l’architecture d’intérieur. À seulement 31 ans, Benjamin Guedj s’est fait un nom sur Instagram et au-delà grâce à ses décors fantasmés, minimalistes et hyper-réalistes. Entre lumière diffuse, formes rondes et teintes douces, son monde virtuel répond à un besoin de réconfort grandissant depuis le début de la crise sanitaire. Rencontre avec l’un des pionniers de ce nouveau courant du design d’intérieur.


IDEAT : Comment êtes-vous devenu designer ?

Benjamin Guedj : J’ai découvert Photoshop à l’âge de 13 ans grâce à mon grand frère qui avait une vieille version sur son Pentium II. J’ai tout de suite été curieux d’apprendre à utiliser ces outils et j’avais un besoin de m’exprimer en créant des choses. J’ai lancé pour m’amuser un service de SMS à l’âge de 15 ans, qui s’est vite transformé en mini-entreprise familiale avec mon père. J’avais du mal à jongler entre l’école et cette première expérience d’entrepreneuriat mais après le lycée j’ai décidé d’étudier le graphisme. Quelques années plus tard, je me suis lancé en tant que freelance spécialisé dans le design web. C’est là que j’ai eu la chance de collaborer avec des marques comme Sézane, Bulgari, Jean-Paul Gaultier… Il y a 4 ans, j’ai eu envie d’un nouveau domaine d’expression et je me suis mis à la 3D. J’étais frustré du support 2D et j’ai toujours été fasciné par les rendus d’intérieur : je me suis dit que c’était le bon moment pour apprendre. En 2021 et après avoir modélisé des dizaines d’objets, j’ai décidé de me lancer dans l’édition de mes propres design sous le nom Bureau Benjamin.

À gauche, Benjamin Guedj, designer et concepteur d’espaces en 3D. À droite, rendu 3D d’une chambre visiblement inspirée de l’esthétique des années 1970.
À gauche, Benjamin Guedj, designer et concepteur d’espaces en 3D. À droite, rendu 3D d’une chambre visiblement inspirée de l’esthétique des années 1970. Benjamin Guedj

IDEAT : Qu’est-ce qui vous a séduit dans la 3D ?

Benjamin Guedj : J’ai toujours été fasciné par les rendus réalistes d’intérieur. Je trouvais ça dingue qu’on puisse créer tout un univers en 3D qui paraisse réel juste avec un ordinateur. Mais cela restait très intimidant car ça demandait d’apprendre plusieurs nouvelles compétences, à commencer par la modélisation 3D. Une fois que j’étais un peu plus à l’aise, j’ai commencé à tester plusieurs moteurs de rendus jusqu’à trouver celui qui correspondait le plus à mes attentes car d’un moteur de rendu à l’autre, vous n’avez pas le même résultat concernant la lumière et les textures.

Pouvez-vous nous parler de votre premier projet ?

Mon premier vrai projet était le lancement des chaises Marcelle pour le magazine/éditeur Goodmoods. Il fallait modéliser la base d’une Marcel Breuer B32 avec le nouveau design de Goodmoods, tout ça dans un décor épuré et réaliste. A l’époque, je commençais tout juste la 3D et c’était un vrai challenge d’avoir un rendu crédible pour que les futurs clients puissent se projeter.

Villa et salle de bain futuristes en 3D
Villa et salle de bain futuristes en 3D Benjamin Guedj

Quelles sont les différentes étapes de création d’un espace en 3D ?

Je commence toujours par une envie de couleur et matière. Je suis très inspiré par le graphisme, ma première passion. Je peux tomber sur une image et me dire « Tiens j’ai très envie d’exploiter un rose poudré avec une forme ronde.» Ensuite je construis l’espace comme un grand cube vide dans lequel je vais créer des ouvertures pour y laisser entrer la lumière. Une fois que je suis à l’aise avec l’espace, je commence le travail d’architecture d’intérieur. C’est à cette étape que je m’amuse le plus en créant des meubles et en trouvant le mélange parfait entre la lumière ambiante et les matériaux de la scène. En parallèle de ce processus, je passe beaucoup de temps à gérer le travail de cadrage et la colorimétrie de l’image. Finalement, ce métier est un mélange entre architecture, design industriel et photographie. Pour avoir une image harmonieuse et créer une émotion, on doit travailler ces trois aspects.

En plus du design intérieur, vous travaillez les reflets, la lumière, les textures : est-ce dans l’optique de retranscrire, un jour, vos projets 3D dans la réalité ?

En grandissant dans un monde rempli d’écrans, j’avais un besoin permanent de me reconnecter à la réalité peu importe le moyen. Je pense que mes rendus sont une réalité fantasmée et j’adorerai, à l’avenir, créer certaines de ces pièces dans un lieu à visiter !

Quelle est la genèse de Bureau Benjamin, votre studio ?

Je rêvais depuis le début de passer du virtuel au réel, de partager mes émotions dans le vrai monde. J’ai toujours voulu imaginer les maisons de demain et c’est pourquoi j’ai commencé à étudier la possibilité d’éditer des objets en mon nom propre. Créer des objets en 3D pour ensuite les envoyer en fabrication est fascinant, c’est comme si quelqu’un imprimait devant vous ce que vous aviez à l’écran. J’ai donc lancé Bureau Benjamin il y a un an.

Lampe La Meringue par Bureau Benjamin
Lampe La Meringue par Bureau Benjamin Benjamin Guedj

Avec votre lampe « la Meringue », vous devenez également éditeur : pouvez-vous nous parler de cette création ?

En démarrant la 3D, je me suis vite rendu compte que le format d’une lampe m’amusait beaucoup ; d’ailleurs mon tout premier essai de 3D était une lampe. J’adore réfléchir à l’harmonie entre la base et l’abat-jour, il y a tellement de possibilités. J’ai donc mêlé mon obsession pour les vases à ma passion pour le design japonais, ce qui a donné le dessin de la Meringue : ça a tout de suite été une évidence, je devais la sortir ! Il a fallu ensuite aller convaincre un fabricant de m’accompagner sur ce premier objet puis de tester plusieurs prototypes pour arriver à un résultat proche de mon dessin.

Allez-vous bientôt dévoiler de nouvelles pièces ?

Tout à fait ! Je travaille à sortir toute une collection sur les mois, avec un lancement propre à chaque objet. J’ai hâte de vous les faire découvrir.

A quoi ressemblera la maison de demain selon vous ?

Elle sera est un compagnon de route qui change en fonction des saisons et des émotions. L’utile a toujours été au centre de la maison mais avec ce qu’on vient de vivre ces dernières années, on n’a jamais eu autant besoin de réconfort. Je pense que les objets doivent nous apporter de la gaité, par leur couleur et leur forme.

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