Comment s’est nouée cette collaboration avec Codimat Collection ?
Alexandre-Benjamin Navet : J’ai commencé à collaborer avec eux suite à une rencontre à la Villa Noailles, qui m’avait remis le prix Design Parade 2017, à Toulon. Nous avons commencé à travailler ensemble, d’abord sur des projets personnels pour des scénographies, puis à l’occasion d’Art Brussels, qui a marqué un vrai temps fort dans notre relation car Codimat Collection m’a accompagné dans la réalisation du tapis décor de mon solo show. C’était très symbolique, car je présentais mon travail pour la première fois en dehors de la France. Cette carte blanche prenait pied sur une envie de dessin de sols que nous avions initiée ensemble à la Villa Noailles, un sol de parquet et de tapis. À Bruxelles, nous avons pu pour la première fois aller plus loin dans cette démarche.
Comment est née la collection « Parcelles » ?
Tout est parti de cette envie commune de créer du parquet avec du tapis. L’étape suivante, c’était naturellement de lancer une collection. Je souhaitais développer mon travail dans la tridimensionnalité, en dehors de la toile. Dans mon travail, je cherche à faire entrer le spectateur dans mon carnet à croquis et il fallait évidemment que cela passe par le sol. Je dessine énormément pour des projets de fresque in situ pour des particuliers ou en collaboration avec des architectes comme Charles Zana ou Pierre Yovanovitch. C’était donc important pour moi d’aller sur le terrain du sol, de travailler un autre rapport au dessin que celui de la toile, du mur, de la fresque… J’ai commencé à dessiner cette collection à la fin 2019, juste après Art Brussels.
Un travail sur le trait
Parlez-nous de ces tapis…
Le tapis permet d’amener un dessin dans l’intérieur d’un particulier, en dehors d’une exposition, c’est un décor qu’on amène chez soi. Je suis parti de dessins originaux au crayon de couleur et j’ai fait un travail sur le trait. J’avais envie de simplifier mon travail pour qu’il puisse s’adapter, en légèreté et en finesse, à différents contextes. Il y a quelque chose de très dynamique dans mes couleurs et mon coup de crayon. C’est pour ça qu’on a fait évoluer les dessins, en travaillant sur l’échelle : les coups de crayons sont très amplifiés, on arrive à l’essence du dessin. On perçoit les vibrations, l’aspect analogique…
Vous avez aussi créé des dalles de moquette…
Les dalles permettent autre chose. Elles délimitent un espace en marquant son contour, comme un parquet. On peut s’en servir pour border un tapis, renforcer le dessin. Avec la dalle, on travaille un autre sujet, celui de la mosaïque, du carrelage et ça me fait rire d’aborder ces domaines chez un spécialiste de la moquette ! Les dalles sont pensées comme des carreaux à assembler, avec des teintes différentes qui amènent un rythme, une vibration dans une pièce. C’est la première fois que Codimat se lance dans cette typologie. Moi qui viens du design industriel, la partie technique me fascine car il faut un travail d’une extrême précision pour que le motif puisse se connecter et se répéter.
Plus le tapis est grand, plus le résultat est satisfaisant
Pour fabriquer cette première collection, Codimat Collection a privilégié l’impression…
En effet, dans un premier temps, nous proposons des modèles imprimés, mais l’envie est d’aller vers du tufté, fait-main. J’adore l’idée de partir d’un tracé de crayon et de produire un travail à la main pour le reproduire. Avec le tufté, on peut obtenir des dégradés subtils. De même, si les tapis sont proposés en 2 x 3 m, d’autres dimensions sont possibles sur mesure, ainsi que des adaptations de teintes. Plus le tapis est grand, plus le résultat est satisfaisant car on perçoit mieux le dessin.
Dalles et tapis ont vocation à être mariés ensemble…
Toute la collection s’appelle « Parcelles » pour lui donner une unité, mais aussi transmettre le fait que c’est une collection ouverte, qui peut être étendue. On peut jongler avec les différents motifs pour créer un espace plus « dense » au centre d’une pièce par exemple. Le jeu de ces tapis permet de créer deux territoires différents dans une même pièce, un salon et un bureau par exemple. L’idée est de les contraster ou de les juxtaposer. Certains peuvent les mettre au mur et ça se comprend, car ce sont des tableaux à part entière, même si c’est un renversement de ma démarche initiale !