Une couleur ?
Studio KO : Nous avons mis du temps à appréhender les couleurs : nous en avions un peu peur car nous craignons plus que tout les effets de mode. Nous avons résolu ce problème en utilisant des teintes liées à l’environnement des projets. Nous choisissons très rarement une couleur pour des raisons purement esthétiques. Elle doit être associée à son contexte, son choix doit avoir un sens.
Un matériau ?
Le béton, il permet justement d’obtenir une grande variété de couleurs ainsi qu’une grande liberté, aussi bien à l’intérieur qu’à l’extérieur. Le matériau dedans-dehors est une obsession pour nous.
Un motif ?
On peut facilement se faire plaisir avec des moquettes. Nous sommes capables de faire le grand écart entre une maison très minimale et un intérieur très chargé. On aime par-dessus tout les motifs de créateurs qui viennent de l’illustration, du dessin. Et on adore tout le travail de Madeleine Castaing (antiquaire et décoratrice, 1894-1992, NDLR).
Un éditeur ?
Les grandes maisons de tissu et de tapis françaises qui prennent le risque de mettre au point et de développer de nouvelles créations. On travaille beaucoup avec la Galerie Diurne, Pierre Frey, Nobilis, Dedar…
Une pièce de la maison ?
La salle de bains, l’endroit de la maison où l’on est nu et seul, distrait par rien. Nous venons de finir un projet pour un client de Los Angeles qui prend deux bains par jour. Dans son jardin, nous avons construit un pavillon comme une cathédrale, tout en béton, de cinq mètres de haut, meublé simplement d’une cheminée et d’une baignoire. Nous étions effarés par la consommation d’eau du propriétaire, alors nous avons fait en sorte de récupérer celle de ses bains pour arroser le jardin.
Un meuble ?
Le canapé, à propos duquel j’ai une théorie : lorsqu’on ne peut pas changer de vie, on change de canapé. La décoration apparaît comme un dérivatif. Il se joue quelque chose autour de cette pièce de mobilier, quelque chose de très sentimental, par les traces sur le tissu notamment.
Un designer ?
Isamu Noguchi (artiste américano-japonais, 1904-1988, NDLR), ses œuvres sont à cheval entre la sculpture et le design. Où que l’on place ses lampes, c’est toujours sublime, parfait. Nous aimons aussi beaucoup Nelson Sepulveda (styliste et designer chilien vivant à Paris NDLR), qui est très proche de notre façon de pratiquer le métier. Il fait des merveilles avec trois brindilles.
Un mouvement ?
Le modernisme, notamment brésilien. C’est hyper à la mode mais tant pis, on assume. Car le modernisme correspond à l’idée que l’on se fait de la modernité. Être moderne, c’est tout ce qui, du passé, nous parle encore aujourd’hui, ce qui a su rester pertinent pour nos sens, notre goût, nos besoins.
Un photographe ?
François Halard. Nous aimons le personnage, sa maison à Arles, ses photos qui ont toujours l’air d’être habitées, très incarnées. C’est l’inverse de tout ce qui se fait en photo de décoration. Il a compris qu’un lieu était le portrait de celui qui y habite et, sans nous montrer cette personne, il nous la fait toucher du doigt. L’absence de personnage devient présence.
Un architecte ?
Studio Mumbai (une agence internationale, pluridisciplinaire qui mise sur l’artisanat et les matériaux naturels, NDLR) ou l’architecte japonais Junya Ishigami. Nous aimons les personnes qui ont une pratique particulière, originale, unique, et qui arrivent à avoir suffisamment de recul pour l’expliquer. Elles ont à la fois les mains dans le cambouis et sont capables d’avoir un regard analytique sur leur démarche.
Un lieu ?
Les thermes de Vals, en Suisse (une construction de Peter Zumthor, NDLR). À chaque fois que nous nous plongeons dans leur bain, nous finissons toujours par discuter avec d’autres architectes. Qu’ils soient japonais ou américains, tous viennent dans ce lieu unique pour son architecture, pas pour les thermes. Ils sont seulement là pour sentir et vivre ce bâtiment.