Ils ont dépoussiéré le Ken Club et fait du Klay un repère de sportifs trendy. Arthur et Frank-Elie Benzaquen voient encore plus loin avec leur nouveau club exclusif logé au numéro 21 de la rue Blanche, celui-là même où Isabelle Huppert, Jean Rochefort ou Juliette Greco firent leurs premières armes de comédiens au sein de la célèbre Ecole nationale supérieure des arts et techniques du théâtre. Blanche – c’est son nom – ouvre après quatre ans de travaux menés tambour battant par pas moins de trois équipes d’architectes qui eurent la (difficile) tâche de créer une piscine, un studio de sport high-tech, un restaurant trendy et une salle de cinéma ex-nihilo.
L’histoire des lieux est magique. En 1901, Paul de Choudens, à la tête de la maison d’édition qui publia notamment les livrets de Berlioz et Bizet, se fait construire un hôtel particulier en plein cœur de Paris et choisit l’un des architectes du Grand Palais et le père du Petit-Palais, Charles Girault, pour imaginer sa demeure. Sa façade Art Nouveau, son jardin d’hiver très Belle Epoque, son majestueux escalier intérieur et même sa toiture sont aujourd’hui classés Monuments Historiques.
L’hôtel de Choudens devient par la suite une école de théâtre réputée, qui voit éclore les plus beaux talents français. Une coïncidence ? La bâtisse se dresse à quelques pas du Théâtre de Paris. Quand l’école déménage à Lyon dans les années 90, le 21 rue Blanche est abandonné, sans qu’aucun repreneur ne réussisse à présenter un projet viable et durable… avant que les frères Benzaquen n’investissent les lieux officiellement en 2013.
Ce projet titanesque devenu le club Blanche a nécessité les talents de trois cabinets d’architectes : l’agence Perrot & Richard Architectes (les architectes qui œuvrèrent à la rénovation du Grand Palais, la boucle est bouclée…), l’Atelier d’architecture Franck Hammoutène (à qui l’on doit la prouesse d’avoir creusé une piscine à débordement sur les trois derniers niveaux) et Toro & Liautard (qui signent au premier étage le superbe restaurant B.B. Blanche).
En lieu et place du boudoir de Madame et de la salle à manger de l’hôtel Choudens se tient la nouvelle table du médiatique Jean Imbert. Après l’Acajou, le jeune chef relève le défi d’une cuisine de saison, locavore et respectueuse de l’environnement sublimée par un écrin d’exception. Pour leur deuxième collaboration avec Arthur et Frank-Elie Benzaquen – le duo a déjà signé la décoration exotique du Klay Saint-Sauveur –, Toro & Liautard en mettent plein la vue avec une scénographie tout droit sortie de Gatsby Le Magnifique : décadente, clinquante et chic.
Le marbre se mêle au velours, les parquets épousent les moquettes hallucinées, les plafonds (habillés de mosaïques de miroirs, de céramique ou des fresques) n’ont rien à envier aux murs (parés de tissus peints de verts profonds, d’or ou de mouvements psychédéliques). Un soin tout particulier a été apporté au mobilier qui, bien que différent, raconte une même histoire au fil des pièces, celle d’une vie antérieure glorieuse et fastueuse. La lumière s’échappe ainsi de sources d’or – tantôt d’appliques aux formes de coquillages, tantôt de lustre majestueux –, le cannage orne les assises individuelles, le velours s’applique aux banquettes, mais le clou du spectacle se déroule dans le jardin d’hiver…
Niché sous une alcôve, ce petit lieu confiné abrite le bar du restaurant et s’ouvre sur une terrasse extérieure. On y déguste des cocktails étonnants à l’ombre de deux palmiers géants et dorés qui poussent notre regard jusqu’au dôme recouvert de céramique. Tous les détails sont recouverts d’or, le sol, lui, joue avec plusieurs nuances de marbre. On reconnait bien là la patte anti-minimaliste du duo Toro & Liautard qui redonne au 21, rue Blanche ses couleurs d’antan.
> Blanche. 21, rue Blanche, 75009 Paris.
> Carte membre annuelle : 1 810 €, abonnement : 160 €/mois.