Elle règne sur la planète art depuis plus d’un siècle et a encore confirmé, sa suprématie à l’occasion de son vernissage le 10 mai dernier. Pléthorique, la Biennale de Venise cru 2017 donne le vertige au visiteur avec ses 87 pavillons nationaux, son énorme exposition collective façon déclaration d’amour aux artistes – baptiséeViva arte viva par sa commissaire, la Française Christine Macel – et ses dizaines d’événements disséminés sur toute la lagune, des plus obscurs aux plus paillettes. Parmi ces derniers, le show-monstre de Damien Hirst à la Fondation Pinault ne désemplit pas tandis qu’à la Fondation Prada, trois créateurs allemands délicatement low profile (Thomas Demand, Alexander Kluge et Anna Viebrock) ravissent les foules intellos. Une biennale des plus nourrissantes, en somme, et dont voici les plats de résistance.
Honneur d’abord à l’hôte, une Italie en forme cette année, dont l’énorme pavillon sis à l’Arsenale vous sidère d’emblée. On pénètre d’abord dans une salle remplie de machines, de silhouettes gisantes, de dômes en plastique… Une sorte de labo bizarre dans lequel Roberto Cuoghi, quadra star de l’art transalpin, dissèque et retravaille le classique de littérature catholique médiévale L’Imitation de Jésus-Christ à coups de sculptures vaguement anxiogènes. Vient ensuite un sas méditatif, la vidéo de la toute jeune Adelita Husni-Bey (32 ans), avant qu’on ne se laisse fasciner par l’installation du Vénitien Giorgio Andreotta Calo, un miroir d’eau XXL noyé dans la pénombre. Le pavillon italien s’appelle Il Mundo Magico, mais la magie, ici, est assurément noire !
De l’eau, il est aussi question à quelques pas de là, dans le pavillon sud-africain, où Mohau Modisakeng bouleverse : il filme des barques et des hommes immergés – flottant ou chavirant, on ne sait pas trop –, manière tragiquement puissante d’évoquer les drames migratoires. Quant à sa compatriote Candice Breitz, dans la pièce adjacente, elle frappe fort elle aussi avec son installation vidéo, où les Hollywoodiens Julianne Moore et Alec Baldwin nous racontent, avec des mots choisis, des trajectoires de simples migrants.