La voix et le rire de Ionna Vautrin au téléphone lui donnent une telle présence que la rencontrer dans son biotope est presque accessoire ! Pourtant, c’est ici, dans son studio du Nord-Est parisien, qu’elle phosphore en équipe depuis deux ans et demi. Jusqu’alors, la designer travaillait chez elle, où elle a gardé son bureau. On suppute que le design est présent dans sa vie au-delà des heures réglementaires. Si elle veut croiser Stéphane Arriubergé, son éditeur chez Moustache, elle n’a que 200 mètres à parcourir, comme pour aller voir un copain.
Elle vit et travaille entourée d’objets et de meubles à histoires et pas dans un showroom à sa gloire. D’autant qu’un certain nombre d’entre eux ont pour fonction d’être les inspirateurs de projets futurs. De l’appartement-bureau au bureau-bureau, il flotte un naturel aux antipodes du stylisme maniaque. De fait, elle ne choisit et ne dessine que du design dans lequel le travail esthétique est consistant. Ensuite, on a l’impression qu’il lui suffit de poser les choses pour que leur charme agisse.
Avant d’évoluer dans ce qu’elle appelle sa « bulle » et avec ses éditeurs étrangers (Foscarini, Sancal ou Serralunga), Ionna Vautrin a bien bougé. Cela ne l’empêche pas de souligner que, dans son métier, rien n’est acquis. Elle ne se repose pas sur le succès de sa lampe Binic (Foscarini) qui lui a valu un Compasso d’Oro et qui s’est vendue à plus de 100 000 exemplaires. D’où cette étiquette de designer de petits objets qui lui colle à la peau, alors qu’elle a conçu la table Baobab à deux plateaux (Moustache), une autre en bois tourné partiellement laqué (Sancal), et un sculptural banc Luba (Serralunga). Elle investit des terrains plus lointains. En ce moment, avec le photographe Michel Giesbrecht, elle prépare une exposition sur les objets ronds.