Julien Beller était le candidat idéal pour imaginer ce projet éphémère, voué à disparaître dans dix-huit mois car situé sur des terrains appartenant à la SNCF. Grâce à ses expériences en tant que membre du collectif XYZT et fondateur de l’atelier collaboratif 6b, l’architecte possédait la réactivité nécessaire à l’urgence et à la particularité de la commande.
Adepte des projets temporaires, il les apprécie pour leur capacité à créer la surprise et leur caractère événementiel qui, à l’image d’une performance artistique, nous pousse à nous questionner sur les usages actuels et futurs des rares espaces inoccupés de nos villes.
Pensés afin d’être entièrement démontables et réutilisables, les différents espaces du centre d’accueil des migrants de la Porte de la Chapelle sont organisés en différents pôles et sont conçus en collaboration avec d’autres architectes. D’anciens containers aménagés par Maryline Gillois, accueillent par exemple le magasin de première nécessité.
Hans Walter Müller a imaginé un espace d’accueil selon les principes de l’architecture gonflable qu’il expérimente depuis ses débuts dans les années 1960. A priori surprenante, l’immense bulle de 900 m2 offre en réalité un ratio intéressant entre surface couverte et rapidité d’installation.
Dans l’ancienne halle SNCF, 400 lits se répartissent dans huit quartiers comprenant chacun une douzaine de maisonnées. Chacune est composée de quatre lits, d’un bloc sanitaire, d’une cuisine et d’un espace réfectoire.
Réalisés à partir d’une structure en échafaudages conçue avec Frédéric Kieff pour être entièrement modulable, les espaces de vies peuvent alors varier en hauteur ainsi qu’en couleur grâce aux bâches tendues en toiture et sur les parois, qui diffèrent selon les quartiers pour simplifier l’orientation.
Visant à humaniser le centre, ces variations s’ajoutent aux perrons devant les chambres, aux bancs disposés aux coins des rues et aux terrasses en bois pour transformer le lieu en un réel village, bien loin des successions habituelles de préfabriqués.
Grâce une ambition politique inédite et à un travail mettant l’humain au centre des réflexions grâce aux notions de partage et d’évolutivité, Julien Beller signe un projet qui fera date au sein de l’architecture d’urgence, une branche sous-développée en France. D’ailleurs, il espère bien voir se poursuivre hors de nos frontières les pistes qu’il a lancées Porte de la Chapelle…