À malin, Malouin et demi

Designer canadien basé à Londres, Philippe Malouin pense avoir eu de la chance dans son parcours. Son opiniâtreté est plus sûrement responsable d’une réussite qui, après des débuts expérimentaux, a révélé un designer industriel et un architecte d’intérieur sachant aussi utiliser sa créativité de chercheur.

Bien que d’abord étiqueté arty, le designer d’origine canadienne Philippe Malouin se réjouit du retour aux fondamentaux du design industriel, « des produits abordables, bien dessinés et qui fonctionnent ».
Bien que d’abord étiqueté arty, le designer d’origine canadienne Philippe Malouin se réjouit du retour aux fondamentaux du design industriel, « des produits abordables, bien dessinés et qui fonctionnent ». Karen Roze

Philippe Malouin, alors imberbe, achève ses études à la faculté d’aménagement, d’architecture, d’art et de design de Montréal avec des envies d’ailleurs. Si l’enseignement technique reçu lui sera précieux, ce boursier voit son avenir à Paris, direction l’École nationale supérieure de création industrielle (Ensci). Plus d’expérimentations, un projet avec Hermès : du neuf. Pourtant, ce fan de Droog Design et d’Hella Jongerius refait bientôt son sac. Direction la section Man & Living de la Design Academy d’Eindhoven, période Li Edelkoort. Philippe Malouin perce vite et, bien qu’étudiant, il est exposé et repéré à Milan par, notamment, les magazines Wallpaper* et Frame. « Montréal, Paris, Eindhoven… Cela a fini par faire un très bon mélange. Mes camarades à Eindhoven n’avaient pas forcément le même bagage technique que moi », se souvient-il.

Au terme de ses cinq nouvelles années d’études, le jeune diplômé intègre le studio du designer star Tom Dixon. En 2009, il fonde son propre studio homonyme, auquel il adjoint Post-Office, une agence d’architecture qui va notamment signer les bureaux londoniens d’Aesop. « La scène créative londonienne était très intéressante. Mais je ne pensais pas à Londres comme à une plateforme internationale, je voulais juste survivre. En même temps, j’avais choisi la ville la plus chère du monde, c’était con. Les débuts ont été très durs. J’ai eu beaucoup de chance. Je me suis fait repérer par pas mal de monde. » Il ne renie pas ses débuts expérimentaux, se réjouissant de voir l’artisanat revalorisé, ce qui, pour lui, popularise la figure du designer constructeur. De fait, les composants de sa collection de luminaires « Gridlock » (Roll & Hill), coupés à la machine, sont assemblés à la main. « Un travail d’orfèvre qu’aucun robot ne peut faire », souligne-t-il.

À Milan, il répond présent cette année avec des pièces en marbre pour Marsotto Edizioni et une grande table chez Hem. Chez Nude, il présente du verre pour la table. Auparavant, on avait remarqué Tent (Campeggi), un fauteuil aussi beau et graphique que l’était le sofa Mollo (Established & Sons), une langue en mousse souple. Lui qui n’aime pas l’éphémère du design trendy conclut : « Il y a beaucoup plus de travail qu’on ne le croit pour faire quelque chose de simple. » Le surlendemain, il partait pour Venise travailler avec une compagnie chinoise. Le designer reflète son époque.

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