A Paris, l’Italie a le vent en poupe… Dans le sillage du géant Big Mamma Group, nombreuses sont les trattoria qui fleurissent dans les rues de la capitale, toutes promettant de savoureux produits locaux et des décors typiques. Pourtant, rares sont celles qui tapent vraiment dans l’œil. UNO fait partie de celles-là. Le restaurateur David Soussan et l’équipe de la pizzeria Tripletta, une institution dans son quartier de Belleville, allient leurs forces du côté du Châtelet. Avec UNO, le restaurant italien se paye un supplément d’âme, car ici, le cap est mis sur l’authentique : cuisine généreuse et sans fioriture, vins naturels et cocktails inventifs. Et côté déco ?
David-Olivier Descombes, fondateur de l’agence DOD et acolyte de longue date des restaurateurs à l’origine de ce projet, revient pour IDEAT sur la conception architecturale de UNO.
IDEAT : Comment avez-vous abordé la décoration d’un restaurant italien sans tomber dans les clichés de la trattoria ?
David-Olivier Descombes : Je suis reparti des fondamentaux, comme un projet d’école, pour lequel la forme doit matérialiser le fond qui remonte à la surface. L’idée était de faire naître un restaurant qui fasse écho aux matières, couleurs et artisanats d’une certaine Italie, celle de la région napolitaine, en adéquation avec la carte du restaurant (pâtes fraîches et pizzas dans la pure tradition de Campanie). Tout en s’assurant de la cohérence du lieu, nous avons imaginé un ensemble plutôt chargé, dépareillé, coloré et hétéroclite, justement pour faire un clin d’œil à la trattoria traditionnelle.
Quelles sont les inspirations majeures qui vous ont permises d’imaginer ce décor ?
Les couleurs de l’Italie, principalement napolitaine, mais les vraies ! Celles de l’Etna et de sa lave en fusion, celles des canots Riva aux bois rouge verni, celles des citronniers aux fruits jaune acide et au feuillage sombre, celles des rues de Naples avec ses échoppes aux teintes tendres, et celles, plus anciennes, des claies en bois de Gragnato à l’époque où les pâtes séchaient sur (ou sous) des matières brutes comme la toile, la corde, le bois… Un brin d’humour et de complicité avec les clients a fait le reste. A l’image de la salle du fond, volontairement kitsch et théâtrale avec son papier-peint façon Chapelle Sixtine, sa table en marbre « agua marina » et ses fauteuils en cuir que l’on imaginerait bien au Vatican.
IDEAT : Comment avez-vous remodelé l’espace existant ?
Etant à la fois architecte et architecte d’intérieur, quelle que soit l’échelle d’un projet, j’applique la même méthode. Pour moi, la conception d’espace se fait en relation avec l’environnement direct. J’essaie d’entretenir une relation étroite entre le contexte donné (un bâtiment existant, un secteur urbain, une parcelle à construire…) et la proposition de projet. Je tente ainsi d’obtenir de beaux espaces, qu’ils soient ensuite traités en béton, en marbre ou en plâtre. En ce qui concerne UNO, cet endroit était autrefois occupé par le Comptoir de Marrakech, dans lequel beaucoup de Parisiens ont de bons souvenirs ! Déposer le bar existant a donc été une décision difficile à prendre mais nous avons fait le choix de tout repenser car il fallait rationaliser les espaces de préparation et de stockage tout en théâtralisant le restaurant en deux zones. La première, à l’entrée, a une âme de pizzeria, connectée au parc qui lui fait face. Le four à pizza y trône tel un food truck en service continu. Au fond du restaurant, du côté de la mythique Poule au Pot, l’ambiance est plus cosy, avec ses grandes banquettes et ses alcôves.
IDEAT : Plus généralement, quels sont les maîtres qui vous ont influencé ?
J’ai été beaucoup inspiré par les touche-à-tout, les autodidactes… Nos études nous forment à concevoir tout type d’espace. Il faut ensuite entretenir cette capacité à répondre à toutes les demande. Le parcours de Peter Zumthor m’a inspiré car il a commencé par une formation d’ébéniste, puis d’architecte d’intérieur, pour terminer par des études d’architecture. Il dessine des espaces et des bâtiments dans lesquels les matériaux naturels ont une place centrale. Dans son travail, la limite entre design et architecture est infime. La créativité et la force de proposition (parfois même l’exubérance !) d’Édouard François m’ont également beaucoup apporté.
IDEAT : Après vos réalisations dans l’univers de la gastronomie, quels sont vos prochains projets ?
Aujourd’hui l’agence est en plein développement. Nous traitons régulièrement de nouveaux sujets, des restaurants évidement, mais également des projets résidentiels à Paris et en province (Bordeaux, Lyon et la Normandie), des boutiques, des bureaux et de l’hôtellerie. Nous livrons donc plusieurs chantiers par an, et nous participons également à des concours. Cette dynamique est porteuse de nouveaux horizons et de nouvelles rencontres. Si le développement de l’agence en France et à l’étranger est un objectif, la fidélisation est tout aussi importante. Je suis fier d’avoir aujourd’hui des clients qui me font toujours confiance après plusieurs années de collaboration. Quelqu’un qui recommande votre travail, tout en continuant à faire appel à vos services, est une grande satisfaction pour un architecte.
> Restaurant UNO. 37, rue Berger, 75001 Paris.