Dans la petite ville de Wohlen trône la villa Isler, demeure néoclassique conçue pour August Isler, l’un des barons de la paille suisse. Il se faisait appeler ainsi, car l’industrie du tressage de cette tige de graminées fit les beaux jours de la région pendant presque deux siècles. Depuis 2023, la maison réaménagée accueille le Schweizer Strohmuseum ou musée de la paille dont les trésors (tresses à chapeaux, broderies, hauts-de-forme, ornements…) représentent des tours de force réalisés à partir de cet humble matériau.
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Paille d’or
Passionnées par cet art millénaire et quasiment disparu, les designeuses Flavia Brändle et Margrit Linder ont décidé d’en faire une exposition « Field of Brooms », après une recherche historique et géographique de la technique spécifique du tressage de paille, développée dans la région alpine de Hoche Ybrig.

La matière s’y décline en dizaines de balayettes, photos, installations et films présentés au rez-de-chaussée du musée. Margrit Linder y expose son émouvante série de films portraits des dernières Suisses qui maîtrisent encore ce savoir-faire. De son côté, Flavia Brändle revisite une brosse à légumes, qu’elle avait découverte lorsqu’elle était étudiante en design, pour présenter Ybriger, une version robuste et petite.
L’exposition fait la part belle à la vitalité des traditions locales en révélant des dizaines d’exemples historiques et contemporains prélevés en Afrique, en Asie et en Océanie, en Europe et dans le canton d’Argovie, où se trouve la villa Isler.

Les balayettes démontrent la diversité, la survivance et la richesse d’une tradition omniprésente, tout en alertant sur la pollution qui menace la biodiversité des terres de culture de la paille, parmi tant d’autres espèces végétales et animales. La présentation ne laisse planer non plus aucun doute sur l’importance du balai, qu’il soit doté d’un manche court ou long.
S’il est le plus souvent assigné au rôle d’attribut de la domesticité et des tâches ménagères féminines, quand il n’est pas associé aux sorcières censées le chevaucher pendant le sabbat, on comprend, avec les témoignages filmés, qu’un objet aussi banal et quotidien peut utilement attester du combat mené par des femmes en faveur d’un savoir-faire ancestral.
> « Field of Brooms ». Schweizer Strohmuseum, Bünzstrasse 5, Wohlen (Suisse), jusqu’au 1er mars 2026. Schweizer-strohmuseum.ch À lire : Field of Brooms, de Flavia Brändle et Margrit Linder, Christian Merlan Verlag, en anglais et en allemand.
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