Cela fait déjà trente ans qu’il travaille avec Patrizia Moroso. Lors du Salon du meuble de Milan 2024, c’est donc au showroom de l’éditrice italienne que nous avons rencontré le designer israélien Ron Arad, venu de Londres, où il vit depuis une cinquantaine d’années. De même qu’à la galerie Rossana Orlandi, les dernières versions de ses fauteuils cultes y rappelaient avec éclat sa passion pour l’expérimentation et l’avant-garde.
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IDEAT : Moroso valorise l’artisanat. Jusqu’à quel point cela a-t-il été déterminant pour vous ?
Ron Arad : Cela va plus loin. Avec l’artiste Abdou Salam Gaye, le mari de Patrizia, nous avons même mené d’autres expériences au Sénégal. Parmi les dernières versions de la Big Easy Chair, il en existe une réalisée avec le marbrier Chitco, qui agglomère des blocs minéraux pris dans une résine transparente. Nous avons travaillé en échangeant des photos. Le plus fantastique, c’est notre relation. Sans parler de Zio Marino, l’oncle prototypiste de Patrizia.
IDEAT : Ah ! Mais c’est vous qui l’avez surnommé Michel-Ange !
Ron Arad : Vous êtes bien renseigné! (Rires.) Oncle Marino travaillait d’une manière extraordinaire. Je peaufinais les prototypes en direct avec lui. Plus tard, cela lui a été difficile de voir ses compétences remplacées par la technologie.
IDEAT : Quand vous développez un projet, l’expérimentation a-t-elle encore sa place ?
Ron Arad : Oui, et cela excite aussi beaucoup mes interlocuteurs. Ces projets expérimentaux sont ceux que je suis le plus curieux de voir fabriqués. Le canapé Do-Lo-Rez (un sofa modulaire, NDLR), par exemple, est inspiré de l’univers des pixels.
En 2008, l’idée était d’avoir quelque chose de « sur-pixellisé », en trois dimensions. Nous avons travaillé avec l’éditeur de tapis Nanimarquina. Do-Lo-Rez a depuis été présenté lors de ma rétrospective au Centre Pompidou et au MoMA, à New York.
IDEAT : Comment travaillez-vous ?
Ron Arad : Parfois, je sais où je vais, parfois pas du tout. Il arrive que les idées surgissent les unes après les autres ou qu’elles naissent des possibilités offertes par la technologie.
IDEAT : Quel regard portez-vous sur le design ?
Ron Arad : Il existe toutes sortes d’expressions du design. Pour ma part, quand je vais voir une exposition, j’aime y éprouver un sentiment de jalousie. Si ce n’est pas le cas, cela signifie que ce n’est pas intéressant. (Rires.)
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