En 2017, Odile Mir parle à sa petite-fille de son envie d’éditer, en série limitée, le fauteuil David, qu’elle a conçu autrefois. En travaillant avec elle sur le projet, la jeune femme, stupéfaite, découvre dans ses archives une quarantaine de pièces dessinées entre 1966 et 1974. La grand-mère sculptrice se révèle aussi designer. Pendant trois ans, Léonie planche sur une monographie, chinant des pièces chez les antiquaires ou en vente aux enchères. Elle en trouve quarante dont trente-cinq que personne ne connaît.
Odile Mir sculptait beaucoup le métal, de grandes feuilles d’acier soudées, recouvertes ensuite de plâtre ou de cuivre. En 1966, elle réalise Phare, une sculpturale paire de lampes pour son propre usage. Elles sont ensuite exposées à la fameuse galerie Lacloche. Maïmé Arnodin et Denise Fayolle, fondatrices de l’agence Mafia, les voient. La première lui recommande Delmas, un fabricant de luminaires dans le Sud-Ouest. Son directeur mettra à sa disposition un atelier pour une semaine.
Les fauteuils David et Filo de Lomm Editions
Elle forge alors elle-même deux lampes dans la semaine. Deux mois après, Delmas la rappelle pour le Salon des arts du luminaire. Odile Mir et l’éditeur vont collaborer sept ans. On retrouve dans ses créations des éléments standards produits par l’usine, telles les doubles sphères de la lampe Duo. Elle en tirera trois luminaires différents, avant de créer les fauteuils David et Filo. Exposés chez Delmas, ces derniers sont repérés par des acheteurs de Prisunic, qui réagissent : « – Alors maintenant, vous faites du mobilier ? – Ah, non, c’est la modéliste qui s’amuse. » Une réplique qui ne fait toujours pas rire la créatrice.
Les Galeries Lafayette exposent ensuite les deux sièges à côté du fauteuil Triangle. Après l’incendie de l’usine Delmas, Odile Mir ne s’intéresse plus qu’à la sculpture. En 1998, la première Biennale de Saint-Etienne présente le fauteuil David lors d’une exposition sur Prisunic. En 2008, le VIA (association Valorisation de l’innovation dans l’ameublement) lui consacre aussi une exposition.
Léonie Alma Mason vient de faire fabriquer à Pantin, en 25 exemplaires originaux, le lampadaire Duo, imaginé en 1972. Suivront bientôt le fauteuil Filo, à l’assise en cuir végétal (tanné sans produit toxique), le pouf, le repose-pied et le porte-revues, très graphique. « Les créations d’Odile Mir sont là aussi pour rappeler qu’il y avait peu de femmes designers dans les années 60 », note la petite-fille. Elle qui, aujourd’hui encore, se fait trop souvent appeler « la décoratrice » sur les chantiers, alors qu’elle a fait des études d’architecture.
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