Future star du design : qui est Theodore Perdios, ce jeune talent à suivre absolument ?

Theodore Perdios, architecte et designer gréco-suisse basé à Zurich, lance sa première collection de mobilier, déjà diffusée à New York par la galerie Studio TwentySeven. Rencontre avec un jeune maître des volumes.

Cela commence comme une histoire toute simple. Après sept ans passées en agence d’architecture, soit 84 mois avec quelques rares fois où des meubles (sur mesure) font partie du projet, Theodore Perdios bifurque. Si passer de l’art de bâtir au design ne tient pas forcément de l’aller sans retour, le jeune Suisse hésite avant de se lancer. Destination danger ? Marché du design de collection saturé, les appréhensions de rigueur n’ont pas eu raison de sa conviction. Il lui semble pouvoir s’y exprimer davantage. Comme quoi, en se cherchant, on peut finir par se trouver. Aujourd’hui, il se sent mieux placé pour partager ce qu’il fait.


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Theodore Perdios à la recherche de nouveaux horizons

Il y a un an, Theodore Perdios commence à développer son projet. Ses envies personnelles se matérialisent. L’architecture lui a appris à habiter l’espace construit, d’où son affinité avec les meubles. Même avec des responsabilités différentes, l’architecte et le designer lui semblent complémentaires. « L’un crée la structure, le coquillage, l’autre l’habite », résume-t-il. Après la majorité de ses études passées à Lausanne, l’Helvétique basé aujourd’hui à Zurich se mâtine d’influences diverses. Le jeune européen biculturel s’envole pour un an à Munich grâce au programme Erasmus, puis enchaîne douze mois de stage à Londres, dont deux à la prestigieuse AA (Architecture Association School of Architecture AA). Une expérience qui lui ouvre l’esprit sur des horizons inconnus.

Le fauteuil Euclide de Theodore Perdios.
Le fauteuil Euclide de Theodore Perdios.

En Suisse, l’architecture, sorte de monolithe culturel admiré pour ses grands noms comme ceux de Peter Zumthor et d’Herzog & De Meuron lui semble aussi pêcher par un côté parfois trop conservateur. « Mes trois nouvelles pièces de mobilier me donnent l’impression de parler aujourd’hui mon propre langage, moins conventionnel », analyse le designer. Les contours de ses trois fauteuils sont plus osés, sa manière de voir une assise, différente, sans sans pour autant faire l’impasse sur l’ergonomie.

Très « cash » là-dessus, Theodore Perdios préfère expérimenter que de mettre à jour des volumes déjà vu. « Il y a dans le design une liberté infinie, la limite est où on choisit de la mettre. » Si faire un siège reste pour lui très pragmatique, il lui faut trouver l’équilibre entre l’ambition de ses expérimentations et la fonctionnalité. Mais le designer ne s’est pas bridé dans son envie de pièces sculpturales. Parce que pour lui, habiter l’espace n’induit pas l’usage exclusif de meubles utiles. Chacun doit pouvoir choisir un fauteuil ou encore un tableau comme on le ferait d’un vêtement.

Le Fauteuil Lilith de Theodore Perdios.
Le Fauteuil Lilith de Theodore Perdios.

Habiller l’espace habité

Lilith, du nom de la première femme du Adam de Adam et Eve, est un siège dont les volumes suggèrent qu’il tourne sur lui-même. Theodore Perdios rappelle comment cette figure mythique s’est enfuie du jardin d’Eden parce qu’elle ne pouvait y être son égale. De ce fait, la supposée traitresse est souvent représentée par un serpent enroulé. Pour le fauteuil Euclide, le designer évoque Le Corbusier, notamment. Il fait référence au fameux théorème du même nom, représentant les axes X,Y, Z de l’espace. « Ce qui m’a intéressé, c’est d’avoir une pièce qui représente cette idée de mesure dans un espace habité. » Johan, le dernier fauteuil du trio, évoque quant à lui le mouvement à l’arrêt à travers son usager assis droit dans une assise faussement penchée et tendue de tissu Dedar.

Le fauteuil Johan de Theodore Perdios, faussement penché.
Le fauteuil Johan de Theodore Perdios, faussement penché.

Cette première collection est également visible chez Studio TwentySeven de New York que Theodore Perdios a lui-même contactée. La galerie s’est montrée intéressée, ce langage visuel, ce type de design n’étant pas dominant dans le secteur du collectible. Cette lisibilité, cette sobriété, correspond plus à la sincère expression de son langage de designer qu’à une volonté de se tenir farouchement à distance des lignes très expressives qui font fureur. «Je crois avoir fait quelque chose de familier qui n’est pas ordinaire. » Pour la fabrication, le designer a choisi l’Italie. « On peut confectionner du mobilier en Suisse mais la main-d’œuvre coûte cher », rappelle-t-il. De Zurich, les artisans de la région de Milan et de Côme ne sont pas loin.

Né à Lausanne, ses premiers souvenirs de design remontent à loin. Il se souvient de son pot de jeune enfant, peut-être jaune, auquel l’adulte qu’il est devenu attache quelque chose de l’ordre du jeu et de l’ergonomie. « Nos goûts sont conditionnés par notre environnement mais on a déjà, à cet âge, un avis. Vêtements ou autres objets, on a déjà – ou pas – des affinités avec eux », poursuit le Suisse. Aujourd’hui, son savoir acquis dans l’architecture ne se dissout pas dans la pratique du design. Il sent en lui une compréhension des géométries qu’il intègre dans ces pièces.  L’architecture et le design lui paraissent deux mondes parallèles l’un à l’autre mais qui cultivent des liens. « Le construire et l’habiter sont deux mondes en synergie constante. » Theodore Perdios se souvient enfin de l’influence de sa grand-mère française qui faisait de la céramique et des chaises, et de son homologue grecque, une socialite tournée vers les arts et la culture comme un tournesol vers le soleil. La création filtre mais se nourrit de tout.

> Plus d’informations sur Theodore Perdios ici.


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