Attablé dans un café parisien, place de la Bastille, Stéphane Parmentier est un homme disert, qui dit volontiers « J’adore ! », mais aussi « Appelons un chat un chat ». Si cet ex-styliste, passé notamment par Lagerfeld et Givenchy, savoure une pratique enthousiaste du design, celle-ci ne repose sur aucun entrain de façade. Et malgré son humour, il peut aussi décocher quelques flèches sur les dérives de son monde. Il voit le design comme un verre plein, à remplir soi-même plutôt que de geindre. La mode lui a appris à « travailler sur un style et penser la mode comme un reflet de l’époque », explique-t-il. Pas question pour lui, de Paris à Saint-Barth via l’île Maurice ou Miami, que ses chantiers ressemblent à des décors figés. Car la mode lui a aussi inoculé la passion du détail.
Début 2000, il a fermé son propre studio de création. « Un concours de circonstances », dit-il avant d’évoquer sans s’attarder l’horrible forfaiture d’un associé. Le design et l’architecture d’intérieur le tentaient, alors il s’est lancé. Pour son premier chantier, le client lui a dit : « Stéphane, j’aime bien ton appart’, je te confie le mien, tu as carte blanche », omettant de préciser sa surface de 400 m2 et les cinq mètres de hauteur sous plafond, du côté de l’avenue Foch. Le designer n’a pas touché aux structures, mais ce fou d’objets a presque tout dessiné, des meubles aux tapis, et « chiné comme un malade ». « La mode vous pousse à exprimer les choses », analyse-t-il.
Il s’est vite vu un avenir dans le design et l’architecture d’intérieur. « The sky is the limit », dit-il aujourd’hui. Lors de l’exposition AD Intérieurs en septembre dernier, son stand cultivait l’opulence la plus tranquille. Du pur dépouillement chic. « Les gens confondent rigueur et minimalisme. Je suis plutôt adepte de l’essentiel », précise Stéphane Parmentier. En même temps, il n’y a rien de trop retenu sur le couvercle de ses coffrets en daim, créés pour l’éditeur italien Giobagnara, un spécialiste du cuir, pour qui il est à la fois designer et directeur artistique. Il arrive même que le dessus de ces boîtes à bijoux soit constellé de sphères réfléchissantes. Chez Giobagnara, sous sa houlette, la peau, le daim ou le nappa investissent toute la maison, sculptures comprises.
Il a essayé de désacraliser le cuir et considère même la patine dont ce dernier se couvrira comme « une preuve d’amour de l’objet ». Même intérêt pour les archives de la maison Vervloet, en Belgique, à qui il faisait réaliser, pour ses chantiers, des béquilles de portes (poignées longues et droites qui se différencient des boutons). La directrice, Isabelle Hamburger, a fini par lui demander un projet. Il a répondu par des dizaines de dessins, lesquels, une fois réunis, ont donné naissance à la première collection lifestyle de Vervloet, avec des produits en laiton doré, de la table basse à l’écritoire de bureau.