Franco Albini a 24 ans lorsque, diplôme du Politecnico de Milan en poche, il visite, scotché, le célèbre pavillon de Mies van der Rohe à Barcelone (1929). Il fraye ensuite à Paris avec les célèbres stagiaires, aussi bien slovènes que japonais, du Corbusier. Après avoir débuté chez Gio Ponti et Emilio Lancia, Albini s’installe très vite en solo pour bâtir dans le Milan de 1931 des logements sociaux. Le jeune homme devient aussi une des grandes signatures de Casabella, une revue phare de l’époque. Avant guerre, ses créations entre autres pour l’éditeur Cassina préfigurent sa conception stylistique rationaliste.
Après guerre, Albini posera les bases de la modernité entre intérieur et extérieur, en collaboration avec Franca Helg. Il n’hésitera pas à utiliser la technique traditionnelle du rotin pour réaliser un siège « contemporain ». Aujourd’hui, ses fauteuils fifties, Margherita et Gala notamment, sont considérés comme des icônes absolues.
Pétri de rationalisme, Albini est aussi un novateur fou de matériaux. Dès 1939, sa première radio en verre, qui laisse voir ses composants, est encore trop moderne pour trouver un éditeur. Mais Albini connaîtra plus tard des industriels italiens qui soutiendront ses audaces, de Cassina à Poggi, en passant par Vittorio Bonacina et Arflex. Son fauteuil Luisa lui vaut un Compasso d’Oro en 1955.
Sa bibliothèque Infinito, conçue en 1957 chez Poggi, est aujourd’hui éditée par Cassina, pour lequel il apparaît comme le maître incarné du design italien. Il est vrai que son autre bibliothèque Veliero, rééditée depuis 2011 par Cassina, est une création unique. Elle a l’élégance et la légèreté d’un voilier, dont elle tire la logique structurelle.
Albini, toujours de son temps, a aussi bien créé une télévision pour Brionvega que des lampes pour Arteluce. À Milan, il a signé des sublimes stations de métro. Mais son tour de force d’architecte, c’est à Gênes qu’il l’a accompli, avec la restauration de la galerie de peintures du Palazzo Bianco. Entre rigueur et créativité, il a su insuffler de l’émotion à l’espace tout autant qu’aux lignes de son mobilier.