vocation publique. Mais sa posture vis-à-vis de l’écosystème et son intention de tisser des liens entre l’histoire de son pays, son langage visuel et la nouveauté des formes allaient à jamais le positionner comme l’un des grands orfèvres de la modernité mexicaine. Ce que le Pritzker Prize saluera en 1980.
Au sujet de cette fameuse quête identitaire, le célèbre poète Octavio Paz a déclaré, en 1990, lors d’une conférence Nobel: « La recherche de la modernité nous a conduits à découvrir notre passé antique, la face cachée de notre nation. Et cette leçon inattendue de l’Histoire, dont je ne suis pas sûr qu’elle ait été apprise par tous : entre la tradition et la modernité, il existe une passerelle. Lorsqu’elles s’ignorent mutuellement, la tradition se fige tandis que la modernité se volatilise ; mais lorsqu’elles se conjuguent, la modernité insuffle de la vitalité à la tradition tandis que cette dernière répond par sa densité et sa profondeur. » L’architecture contemporaine mexicaine n’a ainsi cessé de se développer dans un dialogue complexe, une confrontation permanente entre ces deux pôles, tantôt opposés, tantôt mis en regard et tantôt combinés.
Grâce à des personnalités hypercréatives et prolifiques telles qu’Enrique Norten, Michel Rojkind, Mauricio Rocha, Tatiana Bilbao ou Productura, entre autres, cette scène architecturale est d’ailleurs devenue en ce début de XXIe siècle, au même titre que l’art contemporain ou la production cinématographique locales, une source d’attrait significatif pour les amateurs du monde entier. Pour autant, il ne faudrait pas ignorer les nuisances auxquelles les habitants sont confrontés. Le gigantisme de la ville donne lieu à d’importants problèmes d’ordre environnemental – trac intense, gestion de l’eau difficile, énorme pollution de l’air – mais aussi à des complications de nature sociale génératrices de criminalité, de corruption et, de fait, d’une grande insécurité.
Des études montrent qu’en 2016 la métropole était à elle seule à l’origine de 2,5 % des émissions mondiales de gaz à effet de serre. Difficile encore de prévoir si le changement de statut de Mexico – passé en 2016 de district fédéral (DF) à une entité fédérative au même titre que les 31 États du reste du Mexique – et la mise en place d’un nouveau système politique – notamment l’élection d’un maire fin 2017 – vont permettre de faire bouger les choses. Cependant, des initiatives démontrent qu’un changement des mentalités est déjà en marche. Sur les 5,4 millions de véhicules évoluant dans l’agglomération, 1 million, jugés trop polluants, ont été retirés de la circulation au cours des dernières années. En outre, un projet consistant à planter quelque 18 millions d’arbres a été lancé pour tenter d’endiguer les émissions de CO2.
De jeunes architectes tels que Derek Dellekamp ou Fernanda Canales mettent leur expertise en œuvre pour ériger, dans des quartiers en proie à une grande pauvreté, des habitations à bas coût mais innovantes ainsi que des centres culturels polyvalents qui agissent comme des balises urbaines pour la population. Sans omettre la détermination d’Alberto Kaach, auteur de la spectaculaire bibliothèque Vasconcelos, qui se bat depuis trois décennies pour la « réimplantation » d’un lac au cœur de Mexico.