Cette chambre que nous visitons vient d’être remise en ordre après le passage du défilé d’une grande maison de couture française. « Ils ont tout enlevé », nous avoue-t-on en souriant. Pourtant, ici, chaque pièce de mobilier, chaque objet décoratif – et même chaque pli de tissu – semble pensé au millimètre. Comme si tout avait toujours été là, alors que cette maison de prestige, baptisée Villeroy en hommage à ses premiers propriétaires, opère dans l’ombre seulement depuis une poignée de mois.
Un hôtel particulier historique
Le Triangle d’Or parisien ne tire pas son nom d’une rumeur. Sur le trottoir défilent les boutiques des puissantes maisons de luxe et les façades tape-à-l’œil. Au numéro 33 de la rue Jean-Goujon, rien n’annonce la magie de l’adresse, si ce n’est un duo d’arbustes et quelques marches molletonnées comme on en a tant croisé. Et pourtant…
L’hôtel particulier de la famille Villeroy, érigé en 1907, a longtemps abrité les bureaux de diverses entreprises après sa revente. Son architecture majestueuse, organisée autour d’une rotonde et à la hauteur sous plafond sans pareille, s’est donc murée dans le silence pendant près d’un siècle. A l’aube des années 2020, le destin sourit à nouveau au numéro 33 qui passe sous le pavillon du groupe The Collection, marque regroupant un portefeuille unique de villas, de résidences privées et d’hôtels résidentiels de prestige à travers le monde. Une pandémie plus tard, le lieu a trouvé sa superbe et accueille ses premiers invités, locataires de l’une de onze clés de l’hôtel, membres de son club très privé et gourmets avides de découvrir sa table étoilée.
La première impression est la bonne
Le spectacle commence en haut de cette volée de marches. A la façon d’une œuvre d’art sciemment encadrée pour être mieux admirée, le lobby s’ouvre dans l’œilleton d’un garde-corps de fer forgé à volutes. Coiffé d’une constellation lumineuse, le décor donne le ton de la visite.
Maison Villeroy écrit sa propre définition du luxe. Parce qu’elle préfère le terme de « maison » à celui d’« hôtel », l’adresse ne considère pas ses guests comme des clients. Ceux-ci sont invités à se sentir comme chez eux — « mais en mieux » s’amuse-t-on — dans les onze appartements, chambres et suites qui s’enchaînent dans les trois étages. Marbres (italien, portugais et même chinois, d’un raffinement rare avec ses stries délicates) bruts ou polis à la main, parquets massifs, couronnes de laiton, assises en velours… Le luxe se décline sous toutes ses formes décoratives dans ces cocons XXL.
Au niveau inférieur, Officine Universelle Buly 1803 prend les commandes du spa, son tout premier à Paris. La plus ancienne marque de cosmétique française a développé pour la maison une carte de soins (massage et visage) sur mesure. Un sauna, un hammam, un bain à remous et une douche d’hydrothérapie complètent cette retraite des sens, et restent accessibles en continu pour les hôtes et les membres du club The Collection. Une maxi terrasse fait le lien entre ce temple du bien-être et sa salle de fitness attenante, équipée des machines dernier-cri de Technogym. Le décor, lui aussi, reprend les codes établis dans les étages résidentiels et distille la magie d’un jeu de lumière opéré sur un marbre précieux, tout en assurant une intimité absolue à ceux venus se relaxer.
Le Trente-Trois, restaurant étoilé de la Maison Villeroy
Un tel degré de prestige se devait de livrer une table d’excellence. Le célèbre Guide rouge, passé par là lors de sa tournée accélérée de 2020, a récompensé le travail de Sébastien Sanjou, alors tout juste placé aux commandes des fourneaux. Si certains macarons peuvent faire l’objet de débats, celui accordé au Trente-Trois est amplement mérité.
Le chef Sanjou a su rapidement imposer son style, naturaliste et graphique, généreux et responsable, pour faire du Trente-Trois une adresse à l’image de sa maison-mère : confidentielle et audacieuse. C’est donc une cuisine de saison élaborée à partir des meilleurs produits qui s’échangent entre fourchette et couteau, à l’image d’une « simple » salade tiède de petits pois cuisinés en ragoût ou d’une poêlée de champignons (girolles, cèpes et mousserons) braisés à l’estragon.
Le cadre de cette bulle gastronomique vaut lui aussi le détour. Le décor, moins contemporain que dans les étages, fait la part belle aux codes haussmanniens (parquet en point de Hongrie, plaquage de bois sculpturaux aux murs, moulures soulignées à la feuille d’or…). Le mobilier, confortable, s’éparpille à distance réglementaire pour offrir aux convives toute l’intimité qu’ils sont venus chercher. Enfin, le bar, magistral, s’affiche au travers d’un cadre en bois festonné, comme si chaque partie de la Maison Villeroy évoluait dans sa propre temporalité…
> Maison Villeroy. 33, rue Jean-Goujon, 75008 Paris. Réservations.