Longtemps abandonnée aux embruns de la Méditerranée, la villa E-1027 a finalement été acquise en 1999 par le Conservatoire du Littoral et classée monument historique dans la foulée. Un grand chantier de rénovation a alors débuté pour sauver l’édifice, non seulement son architecture mais également son aménagement intérieur, considéré comme un manifeste de la designer irlandaise. De nombreuses difficultés ont surgi : son mobilier, par exemple, avait été presque entièrement dispersé. D’où la nécessité de faire appel à des rééditions et des reconstitutions fidèles, chapeautées par l’association « Eileen Gray. Etoile de mer. Le Corbusier ». L’exposition « Sauver E-1027 » s’interroge justement sur la difficulté et les enjeux de cette rénovation. Dans le Hangar de la gare de Roquebrune-Cap-Martin, les différentes phases de ce chantier délicat sont retracées à travers différents clichés pris de 1999 à aujourd’hui.
Fleuron moderniste
La villa E-1027 a été pensée et construite par Eileen Gray et Jean Badovici sur la côte d’Azur, à Roquebrune-Cap-Martin. Figure de pointe de l’Art déco parisien, l’Irlandaise Eileen Gray se lie d’amitié avec l’architecte et critique d’art Badovici qui l’initie alors à l’architecture moderne. Elle sera fortement influencée par le travail de Le Corbusier (dont le Cabanon est voisin de la E-1027…). C’est ce style qu’elle retranscrira dans la villa du Cap-Martin, tout en souhaitant « humaniser » les lignes modernistes du maître. Sa réflexion va particulièrement porter sur le mobilier de l’habitation. Gray estimait qu’il devait faciliter la vie des habitants d’un logement. Pour la villa E-1027, elle fait donc venir plusieurs pièces de sa galerie Jean Désert à Paris mais surtout elle en dessine et construit elle-même.
Elle élabore ainsi une sorte de « mobilier de camping », escamotable, à double fonction et amovible, comme la table de chevet baptisée Table E-1027, un objet chromé et circulaire, réglable en hauteur par une chainette métallique. D’autres pièces sont, au contraire, fixes, comme la tête de lit du petit divan de la grande pièce. Quant à Badovici, il assumera un rôle de conseiller tout au long de la construction. Le nom même de la villa, choisi par Gray, rend hommage à cette collaboration : le 10 et le 7 indiquent respectivement la 10e et la 2e lettre de l’alphabet, soit les initiales JB (Jean Badovici)…
L’exposition « Sauver villa E-1027 » est ouverte au public jusqu’au 30 octobre.
Le Hangar, Gare de Roquebrune (06), Avenue Le Corbusier, 06190 Roquebrune Cap-Martin.