Nouvelle saison au Cap Moderne, trésor caché de la Riviera

Blotti entre Monaco et Cap Martin, le site de Cap Moderne recèle des trésors de l'architecture du XXe siècle signés Le Corbusier ou Eileen Gray. Longtemps laissé à l'abandon, il revit désormais grâce à une réhabilitation hors normes.

Photos Manuel Bougot

À Roquebrune-Cap Martin (Alpes Maritimes), le site de Cap Moderne réunit sous l’égide du Conservatoire du littoral des bâtiments remarquables (le Cabanon et les Unités de camping de Le Corbusier ainsi que l’Etoile de Mer et la villa E-1027 d’Eileen Gray). Démarrée en 2015 et prévue en différentes phases, sa restauration a permis de sauvegarder ce patrimoine inestimable. D’importantes interventions de consolidation de la structure ont été menés à bien, ce qui a ensuite permis de rénover salon, chambre et salle de bain afin qu’ils retrouvent leur aspect initial. Les travaux sont désormais concentrés sur la partie Est, ainsi que sur les détails de la décoration intérieure. Le visiteur découvre ainsi le Cabanon, l’atelier de Le Corbusier, le restaurant Etoile de mer et les Unités de Camping, avec leurs couleurs rayonnantes d’origine.

La villa E-1027 posée au-dessus de la Méditerranée.
La villa E-1027 posée au-dessus de la Méditerranée. Manuel Bougot

Après le succès remporté l’année dernière par la saison culturelle proposée au Cap Moderne de mai à septembre, plusieurs évènements vont à nouveau être organisés durant l’été 2018. Comme les brunchs et des diners de mécénat qui seront proposés sur les terrasses de la villa. Leurs recettes serviront à financer la restauration qui entre désormais dans sa phase finale. Depuis peu, une convention de partenariat a été signée avec avec le Centre des Monuments Nationaux afin que ce dernier assure l’exploitation du lieu, tandis que l’association Cap Moderne poursuivra les travaux. A partir de 2020, le CMN prendra seul la gouvernance du site.

La villa E-1027 d’Eileen Gray et Jean Badovaci
La villa E-1027 d’Eileen Gray et Jean Badovaci Manuel Bougot

Depuis la baie du Cabbé, on l’aperçoit, blanche, tout en longueur, nichée entre rochers et maquis. L’histoire de la villa E-1027 débute en 1926, lorsque Eileen Gray, designer d’origine irlandaise, décide de trouver un « refuge » en Méditerranée, soutenue par Jean Badovici, architecte et directeur de la revue Architecture vivante. Leur choix se tourne vers le Cap Martin, sur un terrain escarpé, à pic, avec une vue extraordinaire sur la Méditerranée. Eileen Gray travaille trois ans sur ce projet. Tel un petit paquebot, la maison est conçue en fonction de la lumière et du vent. Posée sur pilotis, d’une superficie de 120 m2, la structure est distribuée sur deux étages. Un escalier hélicoïdal réunit l’ensemble au toit-terrasse, assurant également une ventilation naturelle.

Salon de la villa E-1027.
Salon de la villa E-1027. Manuel Bougot

À l’intérieur, le blanc domine. La designer a porté une attention particulière au mobilier, fixe comme amovible. Tout est étudié dans le moindre détail. Des lieux, il se dégage une atmosphère très féminine alliée à un esprit rationnel, le tout saupoudré d’une pointe d’humour. En 1932, Eileen Gray décide de partir sur les collines de Menton pour construire une seconde maison qu’elle conservera jusqu’en 1950. Après son départ, la villa E-1027 sera occupée par Le Corbusier, ami de Badovici. Lors de ses séjours, il réalise huit fresques sur les parois de l’habitation. Eileen Gray sera offusquée par cette intervention, car elle modifie complètement la conception de l’espace. Passée ensuite entre plusieurs mains, longtemps laissée à l’abandon, la villa est finalement reprise par le Conservatoire du Littoral et la Commune de Roquebrune-Cap Martin qui entament aussitôt la restauration du bâtiment et de ses espaces verts. Une légende qui reprend vie, un voyage dans les années mythiques de ce lieu intemporel.

Détail de l’escalier de la villa E-1027 menant au toit-terrasse.
Détail de l’escalier de la villa E-1027 menant au toit-terrasse. Manuel Bougot

> Accessible par le sentier du littoral, le site Cap Moderne se visite par petits groupes, sur réservation uniquement. capmoderne.com
> Dans le hangar situé à proximité du site, exposition « Eileen Gray, une architecture de l’intime » (jusqu’au 30 octobre).

Salle de bains de la villa E-1027.
Salle de bains de la villa E-1027. Manuel Bougot