Contrairement à ce que son nom peut laisser penser, la Cité des Electriciens constitue la plus ancienne cité minière du Pas-de-Calais. Construit à partir de 1856 à Bruay-la-Buissière, ce témoin du passé, récemment rénové et réhabilité par l’architecte Philippe Prost et l’agence BADP, multiplie aujourd’hui les expositions pour mieux comprendre l’impact de l’exploitation minière sur le paysage, l’urbanisme et la vie ouvrière de la région. Un regard sur l’histoire d’autant plus fascinant qu’il se couple à celui des créateurs contemporains.
Dans l’ancienne Maison de l’ingénieur, située à deux pas des logements de mineurs et désormais destinée à accueillir toutes les formes d’art, le collectif Aequo ravive l’histoire de tout un territoire en mêlant des objets anciens avec ceux créés par ses soins ou d’autres designers. Formé en 2018 par Arthur Lenglin, Tim Defleur et Benjamin Helle, le trio lillois a conçu cette exposition à la suite d’une résidence artistique dans l’un des gîtes aménagés au cœur de la Cité des Electriciens. L’occasion de rencontrer ses anciens habitants lors d’une série d’ateliers qui a depuis nourri et influencé leur collection.
En recueillant des témoignages et des objets symboliques de l’ancienne vie locale, en invitant des habitants à transformer la brique en objets de décoration, ou à travers un atelier de teinture végétale réalisé à partir de plantes endémiques, Aequo a d’abord cherché à valoriser l’histoire, les matériaux et les matières premières du bassin minier… avant de mieux les réinterpréter.
Dans une scénographie qui expose le fruit de ces ateliers, le studio de design signe par exemple un kit de point de croix qui rappelle l’engouement des familles ouvrières pour le canevas. Ou encore un set de tatouages éphémères dont la teinte bleutée évoque la couleur si particulière des cicatrices des mineurs, alors altérées par le contact du charbon.
Produite en édition limitée, la collection d’Aequo comprend également un miroir/soliflore porté par un socle en brique ainsi qu’une série de coussins teints avec des fougères. Des plantes glanées dans le bois d’à coté et qui ont notamment participé à la constitution du charbon, il y a quelque 300 millions d’années…
Plus ou moins évidentes, les références au patrimoine minier façonnent depuis quelques temps déjà la pratique du studio de design. Comme en atteste sa première collection, réunissant un vase à l’allure de terril ou une étagère qui détourne la silhouettes des « gueules noires ». Des créations que l’on retrouve d’ailleurs dans la dernière salle de l’exposition, aménagée comme l’intérieur imaginaire d’une famille de mineurs vivant au XXIe siècle.
Entre des réchauds de Maddalena Selvini et une baladeuse du studio PaulinePlusLuis, l’espace regroupe des créateurs émergents et incontournables. A l’instar des Eames et des Bourroullec, dont les oiseaux sculptés rappellent le rôle vital des canaris en cas de coup de grisou. Design et histoire se font ainsi écho à point nommé, alors que la métropole lilloise entame son mandat de Capitale Mondiale du Design.
> Exposition « Quand le design rend visite au patrimoine » du studio Aequo. Jusqu’au 9 août 2020 à la Cité des Electriciens, rue Franklin, 62700 Bruay-la-Buissière. citedeselectriciens.fr