Peint en 1932 par Oskar Schlemmer, le fameux tableau L’escalier du Bauhaus montre le ballet des étudiants de l’école allemande se croisant entre deux cours comme dans un défilé de mode. Les épaules et les tailles sont marquées, le reste suit, coupe de cheveux au carré comprise. Les jupes et pantalons droits sont gris mais associé à des sweaters orange foncé ou blanc. Si le Bauhaus ne s’intéressait pas officiellement à la mode, on y produisait malgré tout des costumes pour des spectacles et des fêtes. Ces derniers inspirèrent notamment feu Karl Lagerfeld, fan des ballets triadiques d’Oskar Schlemmer et de ses costumes de Bibendum stylisés. Et c’est encore le Bauhaus que le styliste disparu avait choisi comme thème pour la collection 2020 de la marque de vêtements à son nom.
Source d’inspiration inoxydable, le Bauhaus valorisait la création pour le plus grand nombre. De ce point de vue, la collection « Archive Éditions » de COS tombe à pic. Ces douze pièces réparties entre Homme et Femme s’adressent à un public large, pas à une poignée de dandies. Chez COS, on fait des vêtements mais on assume aussi de faire de la mode. Dans les archives de la maison londonienne, six pièces pour femme et six pièces pour homme ont été choisies et restructurées dans un « esprit Bauhaus » : géométrique, moderne et fonctionnel.
« Dieu est dans les détails », dit la fameuse maxime de Mies van der Rohe, dernier directeur du Bauhaus. Eh bien cette collection baptisée « Archive Editions » élève le détail au rang du sacré. Voilà pourquoi la boutonnière du manteau sans col de l’homme a disparu. Ledit manteau est gris, mais subtilement arrondi aux épaules pour adoucir sa rigueur. De la même façon, le chemisier à plastron de la collection femme ne met pas bêtement le buste en avant sans l’effacer non plus. Il n’y a pas d’affèterie ni d’assignation à être serré dans son vêtement. Au contraire, il rappelle la dimension sensuelle, aussi bien tactile que visuelle de sentir de l’air entre le corps et la peau. Quant à la palette, elle est volontairement réduite au noir au blanc et au gris.
Le pantalon de l’homme est droit mais large. Distinguée par ses plis, la robe grise de la femme revêt en partie le corps comme le ferait un pan d’écharpe. Autre modernité, parfois sensible au Bauhaus, l’androgynie, comme celle de l’encolure pas du tout bateau du sweater de l’homme. En général, ces détails sont plus courants chez les grands créateurs belges ou japonais. En les rendant accessibles sans les déprécier, COS ne pouvait rendre un hommage plus humble et sincère au Bauhaus…
> La collection « Archive Edition inspired by Bauhaus » est disponible en ligne sur le site de COS et dans une sélection de magasins (en France, celui de la rue des Rosiers à Paris).