La revanche de l’Ouest
Alors qu’une tornade pousse le monde créatif toujours plus à l’est, le Design Museum a mis les voiles à l’opposé, sur la très chic Kensington High Street. « C’est bien d’être là où on ne vous attend pas », remarque le malicieux Deyan Sudjic, son directeur. En novembre dernier, le musée intégrait l’ancien bâtiment du Commonwealth Institute, une réalisation des années 60 dont les espaces ont été entièrement repensés. « La structure architecturale était déjà très présente. Il fallait un architecte comme John Pawson pour intervenir en toute sobriété », souligne Deyan Sudjic. De fait, John Pawson a créé un bâtiment dans l’ancienne structure et dessiné les salles d’exposition, un auditorium de 200 places, deux magasins de design et un café-restaurant. Tourné vingt-sept ans vers la Tamise, le musée prend ici un nouvel envol, multipliant par trois son espace en passant à 10 000 m2. « Pour la première fois, nous aurons une collection permanente à l’accès gratuit et, bien sûr, des expositions temporaires. Nous attendons près de 600 000 visiteurs par an. »
Bouillon de culture
Rien à voir avec les chiffres de la Tate Modern qui atteignait, en 2014, son chiffre record de 5,8 millions de visiteurs contre 5 millions en 2015. Il était temps de s’agrandir. 2016 marque donc l’inauguration de son extension, la New Tate Modern. Cette Switch House, une tour de dix étages habillée de brique et de béton, vient jouer les prolongations de l’ancienne centrale électrique réhabilitée en 2000 par les mêmes architectes, les Suisses Herzog & de Meuron. Sous ce nouveau toit, l’art prend une dimension spectaculaire. Un trait que l’on retrouve chez Damien Hirst qui a ouvert sa propre galerie d’art, Newport Street, où il expose sa collection personnelle d’œuvres d’artistes de sa génération. On peut aussi déjeuner à Pharmacy, son restaurant-installation. C’est à se demander si Hirst n’a pas perdu son costume d’artiste pour celui de businessman…
Nick Hartwright, lui, est à mille lieues des spéculations liées au monde de l’art. Avec son entreprise sociale The Mill Co. Project, il propose aux artistes des studios à prix accessibles – un véritable challenge à Londres ! Intégrant, avec l’aide des municipalités, des bâtiments inoccupés, il les sauve des bulldozers des promoteurs. Son hôtel, Green Rooms, est dans le même esprit. Il l’a monté avec Kurt Bredenbeck, le génial fondateur et propriétaire du premier hôtel The Hoxton Shoreditch (revendu depuis), qui bousculait l’hôtellerie en proposant des chambres à 1 livre sterling la nuit une fois par mois. « À l’époque, explique Nick Hartwright, Shoreditch était à la limite de Londres. L’implantation de l’hôtel a participé à la revitalisation du quartier. Notre ambition est la même avec Green Rooms, situé à Wood Green. Nous souhaitons impliquer les voisins, éviter la bulle financière et immobilière. » L’un de ses autres projets se dessine près de l’aéroport, dans l’ancienne usine Carlsberg-Tetley. Encore plus loin. Les frontières n’en finissent pas de se déplacer…